Cent Fois

8

Ils se retrouvèrent tout deux, au milieux de la mer, sans rien autour, mise à part les rochers et l'eau transparente. Ils étaient complètement seuls, ils naviguaient depuis presque dix minutes mais aucun des deux n'avait réellement prit la parole. Il était difficile de briser ce silence qui paraissait assez paisible pour Gabriel. Mais Jordan n'était pas vraiment du même avis, il arrêta le bateau et se tourna vers lui, qui était assit sur la banquette en cuir. Jordan s'appuya sur le tableau de bord et croisa les bras sur son torse. Il fixa Gabriel quelques secondes et se mit à sourire.

« - Qu'est ce qui te fait sourire comme ça ?, demanda Gabriel, visiblement légèrement agacé qu'il puisse se moquer de lui.

- Je vois que tu es beaucoup sur la défensive avec moi. Tu ne l'est pas autant quand il s'agit de me répondre lors de débats, ricana Jordan en lui faisant un clin d'œil. »

Gabriel leva les yeux au ciel et rapprocha ses genoux près de son torse, les entourant avec ses bras.

« - C'est pas pareil, tu es mon adversaire, donc je dois te battre. Sans me vanter je me débrouille plutôt bien pour te mettre hors course. »

Jordan ricana de nouveau et vint s'installer à côté de Gabriel, le poussant légèrement.

« - Tu penses ? Peut-être que je fais exprès de te laisser gagner pour mieux t'achever ensuite. »

Gabriel le regarda en souriant légèrement, il ne s'était pas senti aussi bien depuis un moment, discuter de manière si naturelle avec un garçon était devenu assez rare pour le jeune ministre. Il ne pensait plus en être digne et il était prêt à lâcher l'affaire, mais Jordan était la petite lueur d'espoir, malgré leurs désaccords politiques, il pourrait très bien être celui qu'il attendait depuis longtemps.

« - Tu en serrais capable ?, demanda Gabriel, toujours le même sourire sur les lèvres.

- Il faut savoir faire quelques sacrifices dans la vie, mais j'avoue que celui là reste assez difficile. »

Jordan le regarda avec beaucoup de délicatesse, Gabriel pouvait presque se sentir flotter dans ses yeux, il se sentait libre et bien plus à l'aise qu'il n'aurait imaginé. Il baissa ensuite légèrement le regard sur les mains de Jordan, reposant sur ses cuisses, quelques veines ressortirent sur sa peau blanche, lui aussi avait besoin de soleil, il avait besoin de s'éloigner du mauvais temps parisien.
Son cerveau commençait à lui jouer des tours, le laissant imaginer les idées les plus sombres, les fantasmes les plus fous qu'il voudrait réaliser avec ces mains. Il secoua la tête et regarda le paysage autour de lui, essayant de retirer les images de sa tête, mais impossible, Jordan était bien présent avec lui, la tension se faisait ressentir, les deux hommes étaient bien trop prêt l'un de l'autre. Mais aucun des deux ne tenta quoi que ce soit. Ils savaient l'un comme l'autre ce qu'ils risquaient, juste le fait d'être seul au milieu de la mer, pouvait paraître suspect.

Après une bonne heure sur l'eau, les deux hommes regagnèrent la terre ferme. Ils se rendirent vers la voiture de Jordan, une sorte de cabriolet décapotable, datant des années mille-neuf cents soixante-dix, une Chevrolet Corvette, jaune éclatant, très tape-à-l'œil. Mais c'est ce que Jordan aimait.

« - Je te dépose ?, demanda Jordan en montant à bord de son bolide. »

Gabriel hésita une demi seconde avant de monter également. Il avait l'habitude des voitures de luxe, voitures de fonction, et autre. Mais là c'était différent.
Jordan démarra la voiture et se dirigea vers chez Gabriel avec les instructions de ce dernier. Il le regarda conduire, et il était vrai que c'était un spectacle plutôt agréable, les muscles de son visage étaient détendu, son regard était doux, ses cheveux n'étaient pas aussi ordonnés que d'habitude. Une de ses mains sur le volant très fin, et l'autre sur le levier de vitesse, il avait quelque chose en plus. Il était attirant.