Nos Mornes Remords - Tome II

CHAPITRE 16

L'obscurité déviait pour laisser place aux premières lueurs de la lumière du soleil tandis que les voix de mes camarades s'élevaient autour de la petite table ronde au milieu du séjour. Je regardais les branches des arbres se défaire des gouttes de pluie qui étaient tombés quelques heures plus tôt. Je tournais à nouveau le regard, scrutant les traits de chacun. Personne n'était autant bouleversé que moi. Il manquait Delilah autour de cette minuscule table en bois à laquelle tous étaient accoudés dans l'attente.

Après quelques instants, elle descendit les marches, aussi calmement que je lui connaissais. Cette nuit, j'avais eu le temps de réfléchir après nitre rencontre. Si bien que je n'avais pas fermé l'œil. Lorsque Delilah arriva à notre niveau, tous arrêtèrent de jaser avant de relever le regard vers elle. Elle leur fit signe de continuer à converser. Ce qu'ils firent. Cela me rappela des moments passés, des souvenirs que je ne voulais pas revivre. Au plus profond de mon être, je savais pourtant que les choses allaient se reproduire.

"Que devons-nous faire pour ta mère ?" avait donc demandé Delilah tandis que j'étais toujours collé à son épaule. "Je n'en sais rien." avais-je répondu en faisant attention à ne rien laisser paraître sur les traits de mon visage.

Je savais ce que tous voulaient faire. Je savais qu'il le fallait. Néanmoins, dans l'abysse de nos mornes remords, je savais tant bien que je n'en ressortirais plus comme je l'étais maintenant.

– De quoi est-il question ?, questionna Isaac, concentré.

Ses yeux plissés témoignaient de son désire de connaître la raison pour laquelle Delilah l'avait fait s'assoir au bord d'une table, tous ensemble, tandis qu'il pourrait bénéficier de ce temps.

Delilah s'avança davantage sur sa chaise, face à la mienne. Les regards se croisèrent puis vinrent se poser sur elle.

– Je sais pour quelles raisons je vous ai fait venir ici, au beau milieu de nulle part, avoua-t-elle.

Tous l'examinèrent minutieusement, ils étaient à l'écoute. Elle continua :

– Je souhaitais que l'on se retrouve. Cela peut paraître suspect venant de ma personne et je vous l'accorde, j'ai moi-même hésité. Malheureusement, la seule manière de véritablement nous rassembler est le passé.

– De quoi est-ce que tu parles ?, s'exclama Elio qui tenait la main de Clara, assises à côté de lui, sous la table.

Ses sourcils se froncèrent vivement tandis que sa copine laissa une main réconfortante sur son épaule.

– La mère de June a un comportement étrange. Bizarrement, nous savons uniquement que Thomas est en sa compagnie, se lança Delilah, le visage fermé.

J'attendis.

– Nous n'allons rien effectuer, murmura-t-elle comme si elle voulait que cette parole me soit spécialement réservé.

Je rigolais d'un rire jaune. Mon sang bouillait. Ma mâchoire se contracta tandis que je la dévisageais en portant ma haine dans mon regard.

"Je vérifierai que rien ne pourrait lui arriver, demain."

Un énième mensonge.

Mon frère attrapa son col de ses doigts, se jetant violemment sur la table. Clara le rattrapa pendant qu'Isaac essayait de l'arracher à Delilah. Impuissante, je regardais Delilah. Immobile. Je touchais mon front à l'aide de ma main, comme pour me retenir de tomber de ma chaise, je sentis les tremblements de mes membres se propager jusque dans mon crâne.

J'avais attendu tant de temps. J'avais attendu qu'elle comprenne que tout ce que je demandais été les mêmes sentiments que je lui réservais en retour. Je me levais, avant de me précipiter sur la terrasse à l'extérieur. Je poussais la vitre afin qu'elle se referme, elle claqua.