Chapitre 5 : Crise

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Le lendemain, après avoir été réveillée encore une fois à l'aube par Paula - à qui je réussis à dire que je devais retrouver mon duo ce soir -, je me promis d'acheter un réveil. Et une fois de plus, je me retrouvai très à l'avance devant le lycée... et devant Ash. 

- Bonjour ! le saluai-je. Comment ça va ?

Étant donnée la façon dont il me regardait, je commençai à me demander si ma peau n'avait pas virée au bleu pendant la nuit.

- Pas la peine de me regarder comme si j'était une folle, grognai-je.

- En même temps, qui d'autre qu'une folle pour adresser la parole à un dangereux garçon ? J'imagine que Marie a dû se faire un plaisir de me dépeindre sous un jour très sombre. 

- Ah ça... marmonnai-je. Mais je pense qu'elle se trompe. 

Il haussa un sourcil. 

- Ah oui ?

- Ben oui. Sinon, tu ne serais pas entrain de discuter tranquillement avec moi. Et tu n'aurais pas été aussi sympathique hier. Et puis...

- Luna, Luna, Luna... soupira-t-il. 

Je me rendis compte qu'il était très proche de moi. Très très proche. 

- Recule, le prévins-je. 

Loin d'obéir à mon injonction, il me saisit le menton. 

- Très chère Luna... Si innocente et naïve... Je ne suis pas pour les commérages, mais tu devrais parfois les écouter... Qui te dit que je ne suis pas un coureur de jupons ? Qui te dit que je ne suis pas dangereux ? Qui te dit que je n'ai pas envoyé des gens à l'hôpital ? Qui te dit que je n'ai pas tué des gens ? Qui te le dit, Luna Aguilera ? Qui te le dit ?

Je me détachai de lui et lui répondit d'une voix froide : 

- Qui me le dit ? Ma logique. Mon cerveau. Tes actions. Toi. Tout. Tu essaies de te faire passer pour un homme cruel et joueur, mais en réalité, tu n'es qu'un ado comme les autres qui aime la musique. Tu mens à tout le monde, même à toi. Ça crève les yeux pour peu qu'on discute deux minutes avec toi. 

Il gronda et me fixa dans le yeux. Ah il voulait jouer à ce jeu-là ? Aucun problème. Jamais je n'avais connu de défaite. Mes yeux contenaient tellement de nuances de vert qu'ils déstabilisaient facilement mes adversaires.

Très très très mauvaise idée, me prévint la voix. Romps le contact, il est dangereux.

Je ne l'entendis même pas, tellement habituée à l'ignorer. Ce combat n'était pas comme les autres. J'avais l'impression qu'un marteau me pilonnait le crâne.

Il va tout découvrir ! Romps le contact ! Il va me découvrir, il va découvrir tous tes secrets ! 

La voix criait, à présent. 

Il ne peut pas, rétorquai-je. Personne ne peut. Il ne peut pas accéder aux tréfonds de mon esprit. Pourquoi pourrait-il ?

J'avais vraiment très mal à la tête. Je m'efforçai de ne pas grimacer de douleur. Je tremblai.

PARCE QU'IL EST COMME TOI IDIOTE ! hurla-t-elle. ROMPS LE CONTACT ! MAINTENANT !

Je tombai à genoux, les yeux que je croyais invincibles remplis de larmes de douleur.

Douleur de ma tête pilonnée, douleur de l'intrusion de mon esprit, douleur de souvenirs que je croyais disparus, douleur d'une couleur d'yeux que je voudrais oublier, douleur d'une voix qui me rappelle trop la sienne, douleur d'une défaite cuisante, douleur de ma tête tapant contre les pavés inégaux, douleur du sang sortant par ma bouche, douleur... de douleur.

Je ne sais pas ce qui s'est passé ensuite. Je n'ai jamais vraiment su. Je me suis évanouie, je pense. Ha ha, quel beau spectacle j'ai dû offrir ! Inanimée sur le sol et crachant du sang, on a rarement vu mieux. Quoiqu'il en soit, lorsque je me réveillai, j'étais allongée sur un lit inconnu, dans une pièce inconnue. Un visage flou se pencha au-dessus du mien. 

- Ça va mieux ?

Je hochai la tête, avec l'impression qu'elle allait exploser. Où étais-je ? 

- Je suis Madame Louis, l'infirmière scolaire, se présenta le visage.

- Luna Aguilera, articulai-je avec difficulté. Ma langue était engourdie.

Tu l'as mordue dans ton inconscience, m'informa la voix.

Oh... Et merci de m'avoir tirée du combat, lui répondis-je.

Combat ? T'es jamais dans l'abus toi, ricana-t-elle. Mais de rien. C'est mon rôle de te protéger après tout. 

Son rôle ? Mais qui est cette voix au juste ? Bon, encore un autre mystère. Tant pis.

- En tout cas, j'ai eu sacrément peur en voyant Ash débarquer avec toi évanouie dans ses bras, crachant du sang et criant. Que s'est-il passé ? 

- Le pire, c'est que je n'en ai aucune idée, marmonnai-je. 

- Sinon, tu parlais dans ton sommeil. 

Je levai brusquement la tête, mouvement qui eu pour résultat de faire tanguer la pièce  devant mes yeux. 

- Tu répétais "No, no !" et un prénom, "Juana", continua-t-elle.

Elle me regarda d'un air compatissant. 

- Tu veux en parler ?

- Non, ne vous inquiétez pas... soupirai-je. Ça fait bien longtemps que j'ai surmonté mes traumatismes.

- Si c'était le cas, tu ne ferais pas de crise aussi violente, contra-t-elle. 

- Je vous assure que je les ai surmontés, persistai-je. 

- Très bien, très bien, capitula-t-elle. Bon, les cours commencent dans cinq minutes, tu veux y aller ou tu préfères te reposer ici ? 

- J'y vais, répondis-je en commençant à lacer mes chaussures. 

Je me levai.

- Bonne journée ! lançai-je en sortant de la pièce. 

Je courus pour arriver à la salle et je fût accueillie par une Marie affolée.

- Luna ! Où étais-tu ? Tu vas bien ? T'as rien ?

- Tout va bien, la rassurai-je. J'ai juste eu un petite problème, ne t'inquiète pas. 

Ses sourcils se froncèrent. Je crus qu'elle ne me croyait pas, mais son regard était fixé sur un point au-dessus de ma tête.

- Qu'est-ce que tu viens faire ici ? gronda la belle blonde. 

- Euh... J'ai cours ici peut-être ? railla Ash. 

- Ne t'approche pas de nous.

- Mais pourquoi tant de violence ? se plaignit-il. 

- Parce que vu la façon dont Luna évite de te regarder, il me semble que son "petit problème" a été causé par une personne nommée Ash Ferrat.

Je me figeai. Il me jeta un bref coup d'œil, puis se détourna. La porte de classe s'ouvrit et nous entrâmes, Ash sur mes talons. Il était si proche de moi que je sentais son souffle sur mon cou. Je m'assis à ma place et sortit mes affaires, scrutée par son regard inquisiteur. 

La journée se déroula sans incident, bien que je sentais mon "cher" duo me surveiller sans cesse. Marie s'inquiétait que ses amis ne soient toujours pas arrivés au lycée. Je la rassurais du mieux que je pouvais, bien qu'une secrète peur m'étreignit le cœur.

Ne t'inquiète pas, jamais il ne pourra s'évader, tentai de ma rassurer la voix. 

Tu sais que rien n'est impossible pour lui, était ma réponse à chaque fois. Il veut me retrouver. Et il me retrouvera.


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