2.2 Maxine

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Il est sept heures lorsque, rassurée, je daigne m'extraire du lit. Discrète, je ne dérange pas ma colocataire qui continue de ronfler quand j'empoigne mon kit de toilette et quitte la chambre.

La salle de bain commune est plus propre que je me l'imaginais. Il y a une petite queue, mais je m'y attendais. On se prépare toutes lors de créneaux horaires identiques, c'est chiant, néanmoins c'est ça la vie en communauté. Je ne doute pas en ma capacité d'adaptation alors je sais que pour les prochains jours, je m'y habituerai.

Au bout d'une vingtaine de minutes, c'est enfin à mon tour. Je pénètre dans une des petites cabines de douche, me déshabille et me dépêche de me laver.

En un claquement de doigts, je me sèche et enfile mon uniforme. Pas d'extravagance, j'ai toujours apprécié me fondre dans la masse. Cependant, un sentiment de révolte m'envahit chaque fois que je songe aux cases dans lesquelles l'établissement nous enferme.

Une jupe noire, assez courte puisqu'elle ne descend pas plus bas que le genou, pour les filles.

Un pantalon à pince noir pour les garçons.

Pourquoi, le fait que je n'ai pas de pénis, m'empêche de porter un putain de froc ?

Il serait temps d'évoluer !

Et encore, je ne parle même pas de la différence de couleurs au niveau des chemises : rose et bleue. Ouais, pas de commentaire sur qui revêtit quelle nuance !

L'année dernière, mon papier journalistique concernait cette opposition constante entre l'homme et la femme.

Sur ce qui pousse encore la société à nous traiter comme le sexe faible, diminué, voire inutile.

Sur ces conneries qui affirment que nous ne méritons pas un salaire équitable parce que notre torse comporte une paire de nibards.

Bordel, j'ai interviewé un nombre incalculable de personnes afin d'obtenir un résultat qu'aucun homme ne pourrait démentir...

Combien de femmes ont été insultées de putes ou de salopes alors qu'elles usaient de leur corps à leur guise ?

Un corps qui leur appartient !

Combien ont été humiliées, harcelées, rabaissées sous prétexte qu'elles n'avaient pas le droit aux mêmes libertés que les connards qui les jugent ? Qui leurs sommes de se tenir derrière une cuisine et de leurs préparer la bouffe du soir ?

Inutile de préciser qu'à peine imprimé, mon article se faisait déjà démonter.

Je me hisse face aux miroirs, crachant :

— Putain de société patriarcale !

— Ah, bonjour à toi aussi, Max, me salue Isabella, un sourire amusé sur les lèvres. T'as l'air d'une humeur massacrante.

Je n'avais pas remarqué sa présence, mais je ne sursaute pas au son de sa voix, il y a une bonne dizaine d'étudiantes dans cette salle de bain et beaucoup se parlent entre elles.

Je termine de nouer mes longs cheveux bruns en un chignon approximatif, puis me tourne vers ma meilleure amie, occupée à se chouchouter le visage avec ses petites crèmes préférées.

— Je ne m'habituerai jamais à cet uniforme ! me plains-je en tirant sur un bout de tissu.

Elle hausse les épaules.

— Allez, ce sont tes derniers mois, tu vas survivre.

Théâtralement, je roule des yeux, rétorquant :

Baker Hall AcademyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant