Killer #6

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"Qu'est-ce que tu fous ?" Me questionna-t-il en grimaçant.

Pour une raison inconnue, je fus surpris comme si j'avais des choses à me reprocher. Pourtant, je n'étais coupable d'aucun péchés, d'aucune faute.

"T'as fait tomber ça." Me justifiai-je dans la hâte.

"Bon chien ?" Il n'avait pas l'air de savoir comment répondre.

Je balançai la pince sur son livre. Je n'aurais même pas dû faire cet effort pour lui. Je reposai mon menton sur la paume de ma main tout en regardant la poussière flottant dans cette pièce. Et dire que j'avais l'intention de l'aider à bien la mettre. Avec tous ses cheveux, ce serait plus simple de prendre une plus grosse pince que ça. Mais cet insolent n'était pas assez malin pour s'en rendre compte tout seul et se contentait d'une frêle bobépine.

"Merci, Killer." Entendis-je étouffer dans un rire silencieux.

Ça devait être une blague, impossible. Il se foutait de ma gueule. Je me tournai pour lui faire face. Je sentais ma mâchoire se crisper alors qu'il ne me jetait même pas un regard. Bon sang lui et ses livres, il pouvait au moins daigner de reconnaître ma présence. Je suis à sa putain de droite, pas à des milliers de kilomètres !

Je remarquai un léger mouvement de tête de sa part. Je suivis du regard la direction qu'il pointait. Elle me souria par-dessus son ordinateur portable. Son sourire était forcé, il ne fallait pas être devin pour comprendre qu'on faisait trop de bruits pour celle-ci. Les professeurs d'anglais sont moins casse-couilles que ça d'habitude… Surtout que nous n'étions même pas sept dans cette vieille pièce. Je regardai aux alentours et… oh ! Je n'avais pas vu, mais elle est là aussi ! Elle a dû trouver le portail fermé tout comme moi. Tout à l'heure, je pense qu'elle était bien plus agacée que moi en voyant que personne n'était devant la salle de classe. Mais qu'importe.

Je me faisais chier. Je n'avais plus envie de m'incruster dans la lecture de Nightmare. Il lisait lentement et, dans tous les cas, son bras m'empêchait d'apercevoir les pages du livre. Et puis je n'étais pas d'humeur pour avoir quoi que ce soit à faire avec lui. Ça finissait toujours comme ça avec lui, tout le temps… Je sais même plus pourquoi je continue encore à le fréquenter !

Je continuais de m'énerver seul dans mon coin en ignorant celui qui était à la racine de mon esprit bouillonnant de colère. Puis, de manière totalement impulsive, je dois l'admettre, je bondis de ma chaise et attrapai mon sac à dos. La chaise soupira de façon grave et inquiétante alors qu'elle fut soulagée du poids l'écrasant. Je me dirigeai sans attendre une seconde de plus vers l'avant de la classe. Je m'installai en milieu de ranger, un choix bien étrange connaissant mes préférences. Je ne regardais pas en arrière, par fierté et parce que lorsque je réalisai ce que je venais de faire, la honte et l'embarras m'empêchaient de prendre en considération sa présence.

Je sentais un regard sur moi. Je la regardai et elle me regarda en retour en souriant poliment. J'avais pu voir sa grimace quand elle détourna son attention de moi. Je ne pouvais pas entièrement lui en vouloir, j'aurais eu une réaction encore plus exécrable à sa place. Je devrais peut-être changer de place, après tout, je ne connaissais même pas son prénom alors qu'elle connaissait le mien. Et faire de nouveau toute une scène ? Autant creuser ma tombe là tout de suite, juste ici, Killer ! Merci, mais je me passerai de cette attention supplémentaire dans ma vie… Comme si je n'avais pas déjà assez attiré l'attention sur moi comme ça. Il valait mieux que je fasse profil bas jusqu'à la fin de l'heure, songeais-je sagement en déglutissant…

Et c'est ainsi que je pouvais ajouter un nouveau souvenir aux "moments les plus gênants de ma vie que je n'oublierai jamais".

La fin de l'heure arriva après de longues minutes d'attente. Lorsque j'entendis la sonnerie, je me retins de courir en dehors de cette cage moisie. Je respirai l'air frais, sentant mes poumons rajeunir de 15 ans. Cette pièce avait le don de me faire sentir sale jusqu'à la moelle et j'étais bien content d'en être sorti.

J'accourrai vers la salle de physique. J'adorai mes cours optionnels, mais c'était bien la première fois que je pressai le pas pour m'y rendre. J'eus le plaisir d'admirer ma place préférée de libre. Au moins, c'était un mal pour bien. Si je n'avais pas été aussi embarrassé, je n'aurais pas eu cette place. Enfin, ce bien me paraissait de plus en plus ridicule. Le fait de sortir de la salle d'étude me rendait trop optimiste et pourtant je suis défaitiste de nature…

"Mais tout le plaisir est pour moi, mon très cher Error !" Lui répondit-il en faisant une révérence. J'en profitai pour lui donner un coup derrière la tête, bien placé si je puis me permettre autant d'éloges. "Putain ! Aïe !"

"Mais quelles viles expressions, vous utilisez sieur… Que c'est désolant que votre esprit soit si restreint que pour se contenter de telles grossièretés. Je vous pensais plus noble, vous qui étudiez les plus grands lettrés aux côtés des premiers ploucs en leur domaine." Je jetai un regard à un des ploucs en question, fier de mon improvisation qui ne présentait même pas un simple bégaiement.

"Surveillez votre langage, vulgaire sot !" Rajouta un tierce con qui saluait d'une expression d'approbation mon monologue.

Nous étions inarrêtables, essayant chacun de renchérir avec des termes plus obsolètes les uns que les autres. Cross, qui continuait de frotter l'arrière de sa tête, s'en sortait bien mieux qu'Error ou moi. Même si Error était catastrophique dans ce domaine. Je ne pouvais contenir cependant le besoin de jeter un regard ici et là à Nightmare qui lisait non loin. Même lorsque j'avais insinué qu'il était un plouc, il n'avait pas daigné de lever le regard des pages entre ses mains. Il n'avait pas l'air énervé par rapport à ce qui était arrivé ce matin, pas que ça me préoccupait, mais ne donnait même pas l'impression de vouloir se moquer de moi pour ça. Et ça m'agaçait que lui n'en avait rien à faire alors que ça m'avait tellement travaillé que j'avais fini par me mettre dans l'embarras.

"Dis, Killer a fumé quelque chose en chimie qu'il a refilé aux deux autres-là ?" Demanda précautionneusement le plus discret.

"C'est la troisième fois que je te dis qu'on était en putain de physique juste avant Horror. T'as un trou dans la tête ou quoi ?" Lui répondit chaleureusement Dust avant de croquer dans un biscuit.

J'écoutais d'une oreille distraite leur conversation alors que je continuais de discuter avec les "deux autres-là". Je n'avais pas eu à les écouter longtemps, la conversation avait vite pris fin sans compter le haussement de ton de chacun avant d'en arriver à ce stade. Notre jeu aussi avait vite pris fin, sur un rage quitte de Error qui n'en pouvait plus de nous entendre aussi snobs.

C'était entre ces situations aux mille émotions et distractions que je passais mes pauses. Et bien que j'en sois reconnaissant, il fallait avouer qu'autant d'agitation drainait mon énergie. Ce qui était certain, c'est qu'elle ne drainait pas celle de Nightmare qui n'avait pas levé les yeux une seule fois !

Interfectivus amor Où les histoires vivent. Découvrez maintenant