Killer #5

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Il se plaignait sans avoir l'intention de s'arrêter, déniant toutes responsabilités. Le sort s'était jeté sur lui, ses mots, non les miens. Oui, ce n'est jamais sa faute. Il avait du mal avec ce concept, assumer ses responsabilités. C'est pour ça qu'il ne voyait pas de problèmes lorsqu'il jetait ses poings sur le premier malheureux. Ils se moquaient de ce retournement de situation, des répercussions de ses propres actions. Ils avaient bien raison. Mais ça l'agaçait, l'enfant qu'il est ne pouvait pas supporter de telles railleries. Mais quand cette personne exacte est dans votre entourage, vous ne pouvez éviter les railleries. C'est pour ça que les interactions entre les deux ne pouvaient qu'ajouter de l'essence au feu. Les commentaires déplaisants fusaient des deux côtés, j'observai cette scène alors qu'une étrange sensation, proche à un nœud, envahissait mon ventre. Le premier exigeait du second qu'il stoppe ses agissements, qu'il se taise définitivement. Il couronna le tout en ajoutant des menaces qui faisaient seulement rire le deuxième parti. Sa réaction fût de déblatérer des plus belles, lançant propos insensés sur propos insensés. J'avais le souffle coupé, le cœur battant en assistant à telle scène dès mon réveil. Et... Ils commencèrent à crier, enfin, c'est ce que je pense car...

Pour être franc, il est compliqué de savoir si Dust avait simplement oublié de désactiver la touche majuscule de son clavier. J'avais les larmes aux yeux et j'avais bien du mal à reprendre mon souffle alors que je riais silencieusement dans le noir de ma chambre. Je riais depuis tellement longtemps que je sentais mon abdomen se contracter douloureusement.

Je lisais les messages qui défilaient sur l'écran en reprenant mon souffle. La discussion était d'un ridicule qui la rendait marrante, mais idiote. C'était pourtant évident que Error et Dust, même si celui-ci était moqueur et provocateur, prenaient la conversation au sérieux. Mais en faisant tous les efforts du monde pour mimer leur attitude face à la situation, je ne plongeais qu'encore plus dans le fou rire qui devenait de plus en plus incontrôlable. Je n'avais pas le droit de faire du bruit à une telle heure, mes parents risquaient de me déshériter si je les réveillais. Après tout, eux travaillent alors que moi non.

Lorsque mon regard se reposa sur la lueur de mon écran, plusieurs messages défilaient sans que je comprenne la tournure qu'avait prise la conversation. Je marmonnai les propos qui s'affichaient à ma vue, tous plus scandaleux les uns que les autres.

Mais, tout le monde sait une chose, c'est qu'à cet âge-là rien n'est très sérieux : on reste des adolescents. Donc lorsqu'Horror envoya une photo d'une chauve-souris s'étant réfugiée dans sa chambre, tout le monde oublia le désagrément maintenant passé. Je fis même remarquer ma présence, sortant du silence, en rigolant de la situation avec eux.

C'est à ce moment que je remarquai que Horror se trouvait dans la conversation de groupe. Il se faisait tellement discret à l'école que j'avais oublié qu'il pouvait lui aussi lire les messages qu'on s'échangeait. Était-ce la première fois qu'il envoyait un message ? Peut-être qu'il les lisait tous mais n'y répondait pas, même si cette possibilité me paraissait peu probable. Après tout, il n'a jamais le temps de passer du temps avec nous en dehors de l'école. Et, s'il lisait les messages, il ne serait pas sorti de nulle part pour se plaindre d'une chauve-souris alors que la situation était si tendue. Ou bien, il savait...

Je soupirai bruyamment, me coupant dans mes propres pensées. Je reposai ma tête sur mon bureau, les bras ballants. Mon oreille collée au bois froid, je pouvais sentir mon corps se détendre tandis que les seconds passaient lentement. Ce serait cliché que de décrire cet instant comme "Le temps s'était arrêté", car ce n'était pas le cas. C'est bien plus complexe, le temps et sa perception.

C'était plus comme une distorsion, un courant d'eau instable. Mon corps souffrait du temps qui passait sans cesse, des efforts supplémentaires qu'il devait endurer par la faute de mon esprit, de l'énergie qu'il puisait dans des réserves qu'il n'avait pas en sa possession. Et moi, je l'ignorai alors qu'il s'endettait encore et encore, m'envoyant comme seuls signaux des tentatives désespérées de stocker un peu de force par tous les moyens. Mais aucun ne pouvait compenser celle qu'il n'arrivait pas à obtenir, car mes pensées l'empêchaient de réclamer ce besoin primordial.

Interfectivus amor Où les histoires vivent. Découvrez maintenant