Chapitre 11

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Depuis combien de temps se voilait-il la face ?

Depuis combien de temps espérait-il l'impossible ?

Depuis combien de temps croyait-il en un mensonge ?

Ces questions se répétaient sans cesse dans sa tête, inlassablement, jusqu'à ce qu'il en devienne fou de douleur, fou de chagrin. Kyousuke releva la tête, observant le ciel d'un bleu si pur du haut de la tour d'Inazuma. Bleu comme ses yeux. En cet instant, il aurait aimé sentir le vent sur sa peau. Mais l'air restait indéfiniment immobile, l'enfermant toujours plus dans sa solitude.

Au fond, il ne comprenait même pas comment ils avaient pu en arriver là. Tout s'était déroulé si vite, il avait suffi d'un instant pour que tout bascule. Tenma avait trouvé ses lettres, ces fichus lettres que Kyousuke aurait dû brûler depuis longtemps. Et, depuis, rien. Plus aucune nouvelle. L'amnésique devait être bouleversé, et tout ça par sa faute. Kyousuke n'avait pas osé aller en cours, ni même essayer de l'appeler ou de lui envoyer un message. Il avait peur, bien trop peur de se confronter à la peine qui devait résider dans le regard de Tenma.

Il se sentit idiot, tout à coup, et aussi terriblement hypocrite. Après tout, il y avait quelques semaines à peine, il avait osé crier sur Munemasa pour avoir ramené Tenma au club de football. Il avait houspillé comme jamais l'une des seules personnes de l'équipe qui acceptait encore de lui adresser la parole, et rechignait toujours à le revoir depuis. Pourtant, ce que Kyousuke avait fait ne valait pas beaucoup mieux, d'une certaine façon. Il s'était menti à lui-même, en se persuadant que tant qu'il refoulait son envie de rejouer au football, tout irait bien. Que garder son désir le plus profond sous silence protégerait Tenma. Mais le silence avait tout détruit. Le silence l'avait enfoncé bien plus bas que la parole ne l'aurait jamais fait.

Il jeta rapidement un coup d'œil à son téléphone lorsqu'il le sentit vibrer. C'était encore un message de Hikaru, qui s'inquiétait de son absence en cours et de son silence depuis le matin. Mais Kyousuke n'avait pas la force de répondre. Il voulait juste qu'on l'oublie, s'effacer des mémoires pour de bon. Peut-être qu'au moins, comme ça, ses fautes seraient plus facile à supporter, s'il ne restait personne pour les lui rappeler.

Peut-être qu'il n'aurait jamais dû revenir dans la vie de Tenma. Peut-être qu'il aurait mieux valu que celui qu'il aime poursuive son existence sans plus jamais le regarder, sans plus jamais lui offrir ce sourire dont lui seul avait le secret. Car ce sourire, à cause de Kyousuke, peut-être qu'il ne verrait plus jamais la lumière du jour.

Alors que l'adolescent chagriné s'apprêtait à ranger son portable, il reçut un autre message, qu'il ne put cette fois-ci pas ignorer :

[Conversation privée Inazuchat : Takuto_Maestro]

Takuto_Maestro : Tu comptes pleurer encore longtemps ?

Kensei_Lancelot : ???

Takuto_Maestro : Ne me prends pas pour un idiot. Tenma est venu au club aujourd'hui, et il a dit qu'il savait tout. Il était censé être chez toi tout le week-end, donc il a dû se passer quelque chose. Et le fait que tu ne sois pas venu en cours aujourd'hui le confirme, parce que te connaissant, tu dois t'en vouloir comme jamais à cause de cette même chose.

Kensei_Lancelot : T'es chiant à être trop intelligent

Takuto_Maestro : Je sais, Mun me le répète tous les jours.

Kensei_Lancelot : Et pour ce qui est de chialer dans son coin, t'es mal placé pour me faire la morale

Takuto_Maestro : Au contraire, c'est parce que j'ai fait l'erreur que je peux t'assurer que c'est une mauvaise idée. J'ai passé des semaines à me morfondre sans prendre en compte le fait que je faisais souffrir ceux qui tenaient à moi. On en a discuté avec Mun après le match contre Tengawara. Il m'a avoué qu'il m'en voulait un peu d'avoir ignoré toutes ses tentatives de me remonter le moral, et je peux le comprendre. Donc, s'il te plait Kyousuke, ne fait pas comme moi. Explique-toi dès maintenant avec Tenma, car tu verras que plus tu attendras, plus il te sera difficile d'essayer de remonter la pente.

Quand le vent soufflera - KyoutenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant