Chapitre 7

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Le regard grenouillesque de Jean est à tomber.


Petit battracien trempé qui couine la bouche ouverte.

Choupi.





Hmm ... il ne bouge plus ?



... c'est long.

Son cerveau semble avoir court-circuité. Ha, il cligne des yeux.

Je suis rassurée.


Sa capacité à rester photogénique malgré son air d'imbécile heureux est admirable, c'est à croire qu'un petit metteur en scène invisible le suit partout. 

Sa peau est parfaite, sa nuque réchauffée par la lueur orangée de ma lampe de chevet dessine une courbe sensuelle  sur le mur, en ombres chinoises. Et je me perds dans les gouttes brillantes des larmes illuminant ses yeux délicatement gonflés, car leurs iridescences dimanantines innondant d'aberrations chromatiques le pourtour de ses paupières me ..


Hem.

Excusez-moi. Ne pas o-b-j-e-c-t-i-v-e-r.  

Oups.





L'empathie n'est pas mon fort,  je le crains, surtout quand j'ai faim.


Mais bon.  

Fleurion est clairement fatiguée d'avance par leur cirque, le père essaye d'avoir l'air honteux, les pommettes de Madame Mère se colorent  d'une délicate teinte rosée, mais elle semble bizzarement de bonne humeur. 



Je suis  très occupée à ne pas bouger d'un quart de poil.

J'aimerais leur faire oublier ma présence. Une affaire de survie, dirons-nous.

Je commence à soupçonner cette bande d'hurluberlus enmafiosés de vouloir vider leur linge en famille, ici et maintenant, sur le parquet plastifié de mon huit (virgule cinq) mètres carrés.

Cela veut dire révéler beaucoup de choses, devant moi. Un baptème criminel dont je me passerais bien, si possible.



Si ma commère intérieure est ravie à l'idée de découvrir les secrets de mes invités, car elle est friandes de ragots , de cette dramaturgie naturelle de l'existence et de l'exorcisation de ces problèmes personnelles à travers l'écoute de ceux des autres ; elle n'en reste pas moins minoritaire au conseil décisionnel résidant sous ma caboche.

Car, notez bien, j'ai bien dit, "problèmes [...] des AUTRES." avec emphase. 

Pas les miens. Pas ceux qui m'impliquent. Pas ceux qui me touchent réellement. 

Ceux là, je les garde pour moi (ou pour un brunch mimosa-mimosa-geuledebois avec Claudia). L'information se déformant à mesure qu'elle se propage, il est plus pratique de régler les problèmes en privé, sans en attendre les conséquences  et avant que leurs ingrédients ne décident de remettre le couvert question sottises.

Reverse Mafia BossOù les histoires vivent. Découvrez maintenant