Chapitre 2 - La fuite

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J'avais élaboré un plan toute la soirée. Il devait être parfait, nous ne pouvions pas nous permettre de nous tromper. J'avais la désagréable impression qu'Ash n'était pas aussi bonne qu'elle tentait de nous le faire croire. Je ferme les yeux, respirant un grand coup avant le début de l'opération. Ils sont aussi fêlés l'un que l'autre, finalement. Elle n'allait pas tarder à descendre. Je répète encore rapidement le plan à Elven, pour être sûre qu'il n'oublie rien.

- Je sais, maman ! Finit-il par souffler. Tu me l'as déjà répété plusieurs fois.

Je me baisse pour me cacher, en boule derrière l'étagère en bois, et recouvre ma cachette avec la couverture. Je vérifie que la clé de la salle de bain est bien dans ma poche. J'inspire rapidement. Ça va aller. J'entends la porte qui s'ouvre et découvre l'ombre descendre lentement les escaliers. Cette dernière ne semble pas, étrangement, porter de plateau-repas. Que se passe-t-il ? Mon pouls commence à accélérer. Quelque chose ne va pas, mais je ne sais pas exactement ce qu'il se passe. Je crains de risquer notre plan si je me dévoile pour regarder. L'ombre semble s'avancer et se mélange avec celle de Elven. Je comprends, finalement, lorsque la voix se met à parler :

- Où est ta maman ?

La voix grave et rauque d'Aloïs s'élève dans la chambre comme un couteau dans ma cage thoracique. Putain ! Je vois la frêle main d'Elven pointer vers la salle de bain, comme initialement prévu dans le plan. Mon coeur accélère. Qu'est-ce qu'il fait là, putain?! Je serre plus fort mes jambes contre moi, angoissée. Ça ne devait pas se passer comme ça, du moins, pas avec lui. Il n'est jamais descendu depuis la première nuit, merde ! Pourquoi forcément aujourd'hui ?

Soudain, je vois l'ombre d'Aloïs attraper violemment ce que j'imagine être le cou d'Elven. Mes yeux s'écarquillent sur le combat d'ombres chinoises qui se dresse devant moi, un sursaut brutal tendant tous mes muscles. Un faible bruit étouffé commence à emplir la pièce et semble bourdonner dans mes oreilles. Mon souffle se coupe mais je ne peux pas bouger. Je suis comme paralysée. L'image de son corps qui se débat et le bruit de suffocation me transpercent. Mais je n'arrive pas à bouger. Je reste figée. Le temps s'arrête sur cette image, mes yeux toujours grands ouverts mais mon souffle coupé. Mon cerveau et mon corps refusent de fonctionner. J'ai mal de partout, je ne comprends pas ce qu'il se passe, du moins, je refuse de le croire.

Je ne sais pas combien de secondes ou minutes s'écoulent comme ça. Ça me semble être une éternité. Mon cœur cesse de battre, le corps d'Elven se fait de moins en moins puissant. Il ne se débat presque plus et seule sa voix étouffée résonne dans la pièce. Je suis tétanisée. Mes yeux restent fixés droit devant, sans cligner. Je suis impuissante. Tu es faible. Faible. Ce mot résonne en moi, transperçant mon âme comme une lame dans ma poitrine, m'empêchant de respirer et de réagir. Puis, tout va très vite. Son avant-bras tremble et il finit par le lâcher, d'un geste rapide. Elven s'écroule au sol, le souffle coupé. Je l'entends tenter de reprendre sa respiration. Je reste figée, ne comprenant pas ce qu'il se passe. Il l'a lâché.

- Merde... Dit-il d'une voix presque inaudible.

Elven tousse, reprenant petit à petit de l'oxygène. Je me sens de nouveau respirer à mon tour. Le temps semble reprendre, bien que difficilement. Aloïs se tient droit devant Elven puis décide de s'approcher de la salle de bain d'un pas assuré. Mon corps semble paralysé encore. Je n'arrive pas à bouger. Cela me rappelle mes crises d'angoisse, lorsque je n'arrive plus à réfléchir. Lorsque mes membres ne répondent plus. Freyja, un mouvement après l'autre, j'entends ma voix résonner au fond de ma tête. J'arrive à bouger un doigt, puis un autre. Enfin, comme si tout le reste de mon corps venait de se libérer, je me relève d'un bond, court vers la salle de bain dans laquelle le fou venait d'entrer et regarde désormais, incrédule, la pièce vide. Je m'empresse d'attraper la poignée et ferme rapidement la porte en attrapant la clé dans ma poche. Je sens la poignée attrapée de l'autre côté et tirée dans l'autre sens pour la rouvrir. Je contracte la mâchoire et, de toutes mes forces, l'adrénaline coulant dans mes veines, réussis, tant bien que mal, à enfoncer les clés dans la serrure, non sans trembler. Je tourne, clic. Mes épaules s'abaissent instantanément, mon corps se détend. J'ai réussi. Je souffle profondément et essuie quelques gouttes qui perlent sur mon front, les mains tremblantes, les muscles douloureux.

FreyjaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant