Chapitre 15: Ma raison de vivre

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La maison était plongée dans l'obscurité, seule la faible lumière de la lune traversait les rideaux tirés des fenêtres du salon. Cléa se tenait là, son violon à la main, ressentant une pression insoutenable sur sa poitrine. Les critiques acerbes de sa mère résonnaient encore dans son esprit, des mots tranchants comme des lames qui l'avaient de nouveau fait vaciller.

Elle ferma les yeux, cherchant à calmer son esprit tourmenté. Le violon avait toujours été son refuge, une échappatoire aux dures réalités de sa vie quotidienne. Ce soir-là, elle avait plus que jamais besoin de cette échappatoire.

Après une énième dispute avec sa mère sur son apparence, Cléa s'était sentie étouffée, incapable de trouver un répit dans sa propre maison. Lou ne manquait jamais une occasion de lui rappeler ce qu'elle considérait comme ses défauts, l'exhortant à perdre du poids et à « s'améliorer » pour être digne d'un homme comme Timothée.

« Tu ne te rends pas compte, Cléa, avait dit Lou plus tôt dans la soirée, sa voix cinglante. Tu penses que Timothée restera avec toi si tu ne fais aucun effort ? Regarde-toi, tu ne fais rien pour changer. »

Cléa avait senti les larmes lui monter aux yeux, mais elle s'était retenue de pleurer devant sa mère. Elle avait appris à ne pas montrer sa vulnérabilité, à ne pas donner à Lou la satisfaction de la voir brisée.

Maintenant, seule dans le salon, Cléa leva son violon et positionna son archet. La première note résonna, douce et mélancolique, se propageant dans le silence de la maison endormie. La musique était son langage, son moyen d'expression le plus pur, un reflet de son âme tourmentée.

Elle laissa ses doigts courir sur les cordes, les mouvements familiers apportant un semblant de paix à son esprit troublé. Chaque note était imprégnée de ses émotions refoulées, une catharsis nécessaire pour évacuer la douleur et la frustration accumulées.

La mélodie qu'elle jouait était une improvisation, née de l'instant et de ses sentiments. Elle oscillait entre des passages doux et apaisants et des crescendos puissants, chaque variation reflétant les montagnes russes émotionnelles qu'elle traversait. Cléa jouait avec une intensité croissante, perdue dans son propre monde musical.

Elle se souvenait des moments de bonheur qu'elle avait partagés avec Timothée, de leurs promenades au parc, des conversations profondes et des éclats de rire. Ces souvenirs lui donnaient de la force, la conviction que, malgré les doutes semés par sa mère, elle méritait d'être aimée pour ce qu'elle était. Mais chaque note de bonheur était rapidement suivie par une dissonance, un rappel des mots cruels de Lou qui rongeaient sa confiance.

La musique devint plus sombre, plus intense, alors que Cléa pensait à toutes les fois où elle avait essayé de répondre aux attentes impossibles de sa mère. Les régimes imposés, les commentaires sur son apparence, les regards de jugement... Tout cela la poursuivait, comme des fantômes refusant de la laisser en paix.

Les larmes coulèrent finalement sur ses joues, mais elle ne cessa pas de jouer. La musique était sa seule consolation, et elle jouait avec une passion dévorante, transformant sa douleur en quelque chose de beau et d'expressif. Le salon était rempli de cette symphonie nocturne, chaque note résonnant avec une clarté poignante.

Alors qu'elle atteignait le climax de sa pièce improvisée, Cléa sentit une libération cathartique. Elle joua les dernières notes avec une douceur retrouvée, la mélodie s'éteignant progressivement, comme une flamme vacillante. Elle laissa son archet tomber lentement, le violon encore collé contre son épaule, ses doigts tremblants.

La maison était de nouveau silencieuse, mais cette fois, Cléa ressentait une étrange sérénité. La musique avait calmé la tempête en elle, au moins pour l'instant. Elle s'assit sur le canapé, le violon toujours à la main, et respira profondément.

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