Chapitre 6

109 8 3
                                    

Samedi 13 février 2021 :

Je suis dans les tribunes du stade Ernest Wallon accompagnée de mon meilleur ami et ses parents pour la rencontre avec Pau. Étant la fille de Vincent Clerc, sous la tutelle de Ugo Mola et meilleure amie des Ntamack, j'ai bien évidemment un accès facile aux places pour les matchs, et je ne me prive d'ailleurs pas pour en profiter puisque j'adore ça.

Cependant aujourd'hui je ne suis pas particulièrement enthousiaste. C'est la reprise de Romain, c'est la première fois qu'il joue depuis sa blessure en décembre et depuis son opération. Et mon inquiétude ce soir est au plus haut point. D'ailleurs, sa mère assise à côté de moi est tout à fait d'accord avec moi. Et malgré le fait que les doctors aient donné leur feu vert, et qu'ils aient attendu un peu plus longtemps que la normale pour une reprise sans risque, je ne peux m'empêcher d'avoir le ventre nouée à l'idée de voir Romain sur le terrain.

Heureusement il était seulement remplaçant, j'ai donc pu profiter légèrement de la première mi-temps. Mais quand je l'ai vu entrer sur le terrain à la 47e minute, je me suis tout de suite crispée. Malgré son apparence plus que jamais attirante dans son maillot, je ne pouvais m'empêcher de me faire un sang d'ancre pour lui. Je le vois encaisser après quelques instants un premier plaquage et je m'accroche à mon siège à cette vue.

  - Détend toi, me conseille Théo assis à mon autre côté, il est solide quand même.

  Je lui réponds par un sourire crispé, et reporte mon attention sur le match, ou plutôt sur Romain, que je ne quitte plus du regard.

  C'est lorsque j'entends enfin l'alarme qui marque la fin du match et que Thomas Ramos tape un coup de pied en touche que je peux me détendre. Le stade gagne sont match 31 à 9, et Romain sort du terrain sain et sauf.

  Théo, Emile, Marie-Christine et moi quittons les gradins vers la voiture des Ntamack, mais je voulais à tout prix voir Romain pour vérifier par moi-même qu'il allait bien. Mais les parents de Théo étaient très fatigués et n'avaient pas la force d'attendre Romain pendant un moment, alors ils sont rentrés avec Théo et j'ai attendu devant les vestiaires que mon ami sorte.

  Mais il n'est pas le premier à être sorti. En effet, quand la porte des vestiaires s'ouvre pour une première fois, c'est Antoine Dupont qui en sort. Je connais bien Antoine, quand il est arrivé au Stade en 2017, il passait souvent à la maison et même si je n'avais que 16 ans on s'est très vite bien entendus.

  - Emma ça va ? il me demande avec le sourire

- Et bah oui très bien et toi ?

  - Après un match comme celui-là ça peut que aller. Enfin mentalement je veux dire, physiquement c'est autre chose, il ajoute en se massant les épaules. Qu'est-ce que tu fais là ?

  - J'attends Romain.

  Je vois un léger sourire apparaître sur son visage à l'entente de ma réponse.

  - Quoi ?

  - Non non rien.

  - Antoine ? je demande d'un ton grave

  - Bah je sais pas mais vous vous êtes plutôt rapprochés en ce moment non ?

  - Euh, pas plus que d'habitude. Au contraire même, on s'est disputés et on a passé une semaine sans se parler, ça ne nous était jamais arrivé.

  - Oh bah du sais ce qu'on dit, l'amour vache. il continue toujours en souriant

  - Ah non mais je t'arrête tout de suite ! C'est vraiment pas le cas.

  - Okay okay, si tu le dis. il concède finalement en haussant les épaules.

  À ce moment là, la porte des vestiaires s'ouvre à nouveau pour laisser sortir cette fois-ci Maxime Médard. Celui-ci me fait un grand sourire quand il me voit et vient me prendre dans ses bras avant de me faire la bise. Maxime est arrivé au Stade Toulousain en 2004, quand j'avais trois ans. Encore une fois, étant la fille de Vincent Clerc j'étais un peu la mascotte des joueurs et mon préféré était de loin Maxime qui jouait souvent avec moi. Et puis depuis je le croise toujours autant, c'est en quelque sorte comme un grand frère pour moi.

  - Qu'est-ce que tu fais là ? il me demande

  - Je suis venue voir le match.

  - Oui merci je m'en doute, mais qu'est-ce que tu fais la maintenant ?

  - Elle attend Romain. répond Antoine à ma place

  Maxime ne dit rien et se contente de faire une tête pleine de sous-entendus.

  - Quoi ? Pourquoi tu fais cette tête là ? je lui demande

  - Tu veux que je te rappelle la dernière fois où je vous ai retrouvés dans une pièce rien que tous les deux ou c'est assez clair pour toi.

  Bien sûr qu'il n'avait pas oublié. Après cet « incident » Maxime n'a jamais mentionné ce qu'il s'est passé ce soir là, alors j'espérais intérieurement que c'était parce qu'il était simplement trop saoul et qu'il avait oublié. Apparemment j'avais tord, malheureusement.

  - Non c'est bon pas la peine, je réponds instantanément, rouge de gêne.

  J'éviterai de mentionner que mes souvenirs sont quand même assez flous vu la quantité d'alcool dans mon métabolisme ce soir là.

  - Il s'est passé quoi ce soir là ? demande Antoine curieux

  - Rien ! je m'exclame tout aussi tôt

  Maxime quant à lui, se contente de se prendre lui même dans ses bras en imitant des bruits d'embrassade. Alors que j'étais déjà rouge de honte, Romain sort des vestiaires pile à ce moment là.

  - Je chercherai même pas à savoir, il se contente de commenter alors que Maxime éclate de rire et que Antoine me regarde les yeux écarquillés. Mes parents sont rentrés ? il me demande

  - Oui ils étaient fatigués, ils se sont dit que tu me ramènerais.

  - Oui bien sûr, aller viens.

  - Bonne soirée les gars, à bientôt, je salue les deux rugbymen alors que j'emboîte le pas de Romain

  Une fois éloignés du reste du monde, je me jette au cou de Romain qui semble au départ surpris mais qui me rend mon étreinte.

  Quand je desserre mon embrassade, je garde quand même mes bras autour de son cou et je pose mon front contre le sien, les yeux fermés, pour mieux profiter de ce moment.

  - Non pas que j'aime pas ça mais que me vaut tout cet amour ? il questionne en rigolant

  - Je m'inquiétais juste pour toi. je lui répond en me détachant de lui à mon plus grand regret

  -Pourquoi avoir attendu qu'on soit sur le parking ? il me demande alors que nous nous remettons à marcher

  - T'as vu les deux zigottos qui étaient avec moi ? J'allais pas de sauter dessus devant.

  Il ricane à la formulation de ma phrase ce qui lui vaut un coup du dos de ma main dans le bras. Auquel il réagi exagérément pour se moquer de mon manque de force, alors que je l'ai juste tapé extrêmement doucement.

  Nous arrivons à sa voiture, une peugeot, et je peux enfin me mettre au chaud quand je m'assieds à la place passager. Nous commençons à rouler et le retour se passe au calme, aucun de nous ne parle mais le bruit sur la voiture de la pluie qui s'était mise à tomber crée une ambiance apaisante. Jusqu'à ce que prise d'un coup de stress, je vérifie mon sac, ne me rappelant pas avoir pris mes clefs. En effet, je comptais rentrer avec les Ntamack et donc dormir chez eux, mais le changement de plan en a décidé autrement. Je n'ai donc aucun endroit où dormir.

  - Et Romain ? Si je te dis quelque chose qui risque de ne pas t'enchanter, tu promets de pas t'énerver ?

  - Qu'est-ce que t'as fait encore ? il me demande avec un sourire apparaissant sur ses lèvres

  - J'ai peut être oublié mes clefs j'ai moi, je lui annonce tout doucement

  Il me répond par un long soufflement accompagné d'un secouement de tête ainsi que d'un haussement des yeux.

  - T'inquiète pas, tu peux dormir chez moi.

Un jourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant