Un été imprévu

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L'été venait de commencer, et je me sentait déjà piégée. Je n'avait jamais été aussi contrariée par mes parents. Passer deux mois dans un village isolé au bord de la mer ? Quelle idée ! Tous mes amis étaient restés à la ville, profitant des cafés en terrasse et des longues soirées à refaire le monde. Quant à moi, je me retrouvait coincée dans une vieille maison de pêcheur avec pour seule distraction des balades sur la plage et des livres que j'avais apportés par précaution.

— « Ce sera bien, tu verras ! Un peu de déconnexion te fera du bien », me dit ma mère, trop enthousiaste.

Pour moi, ce serait surtout long et ennuyeux. Je traînais mes pieds sur les planches grinçantes de la maison, découvrant à contre-cœur chaque recoin. La mer scintillait au loin, mais je n'y prêtait pas attention. Ce paysage avait beau être pittoresque, il ne changeait rien à mon humeur maussade.

Le premier soir, je décida de faire un tour sur la plage. Le soleil descendait à l'horizon, colorant le ciel de teintes roses et orangées. Je laissais mes pieds nus s'enfoncer dans le sable frais, essayant de me débarrasser de ma frustration. C'est alors que je le vit pour la première fois.

Il était assis seul, dos à moi, face à l'océan, un carnet à la main. Ses cheveux bruns ondulaient doucement sous la brise, et il semblait complètement absorbé dans son dessin. Intriguée, je m'arrêtais un moment à quelques mètres de lui, hésitant. Je n'étais pas du genre à aborder les inconnus, mais il y avait quelque chose dans sa solitude qui résonnait avec la mienne.

— « Beau coucher de soleil, non ? » lançais-je finalement.

Le garçon leva à peine la tête, son regard bleu se posant brièvement sur moi avant de retourner à son carnet.

— « Ouais », répondit-il simplement, sans grand enthousiasme.

Déconcertée par sa réponse froide, je sentis une pointe de frustration monter en moi. Je m'apprêtais à m'éloigner, mais quelque chose me retient. Peut-être était-ce son expression, ou la manière dont il semblait vouloir disparaître dans son propre monde. Quoi qu'il en soit, je décida de ne pas en rester là.

— « Tu dessines souvent ici ? » insistais-je

Cette fois, le garçon soupira, referma son carnet, et se tourna complètement vers moi.

— « Écoute, je viens ici pour être tranquille, pas pour discuter, d'accord ? » me lança-t-il, visiblement agacé.

Surprise par la rudesse de sa voix, je haussa les sourcils.

— « Désolée, je voulais juste être sympa », répliquais-je avant de tourner les talons, vexée.

Je regagna la maison en marmonnant pour moi-même et fredonnant une chanson afin de m'apaiser. Sympa, hein ? Si tous les gens du coin étaient aussi accueillants, cet été allait être encore plus long que prévu.

Le lendemain, malgré moi. Je ne pouvais m'empêcher de repenser à ce garçon. Son comportement m'avais irritée, mais je ne parvenais pas à chasser cette image de mon esprit. Qui était-il ? Et pourquoi était-il si renfermé ?

Je retournai sur la plage, espérant secrètement le revoir, même si je ne voulais pas me l'avouer. Il était là, exactement au même endroit, carnet à la main. J'hésitai un instant avant de me diriger vers lui, cette fois plus prudente.

— « Salut », rétorquais-je simplement en m'asseyant à quelques mètres de lui, comme pour montrer que je n'étais pas là pour l'envahir.

Il ne répondit pas tout de suite, mais après quelques secondes, il ferma son carnet et soupira.

— « Écoute, désolé pour hier. J'ai eu une journée compliquée », avoua-t-il, un peu maladroitement.

Je hochai la tête, reconnaissant l'effort.

— « C'est pas grave. Moi aussi, je n'ai pas choisi d'être ici », répondis- je avec un léger sourire.

Un silence s'installa, mais cette fois, il était moins tendu. Je pris le risque de poser une autre question. Sachant tout de même qu'elle risquait de le frustrer.

— « Tu dessines quoi ? »

Le garçon hésita, puis, avec un geste hésitant, il me tendit son carnet. Les pages étaient remplies de croquis magnifiques, principalement des paysages, mais aussi quelques visages. Je tournais les pages, impressionnée.

— « C'est incroyable. Tu es vraiment doué », lançai-je sincèrement.

— « Merci », murmura-t-il, rougissant légèrement.

— « Je m'appelle Élise, au fait », ajoutai-je.

— « Théo », me répondit-il.

Et c'est ainsi que notre étrange amitié commença. Jour après jour, on se retrouvait sur cette plage, partageant de longues conversations, des silences complices, et parfois, des rires. Peu à peu, Théo s'ouvrait à moi, révélant ses peurs, ses rêves, et ce qui l'avait conduit à se replier sur lui-même.

Quant à moi, je découvrais que cet été, que je croyais perdu, pourrait être bien plus important que je ne l'avait imaginé. Théo et moi étions peut être seulement deux âmes perdues, cherchant un peu de lumière dans un monde parfois trop sombre. Après tout c'est à ça que nous servent les amis.

Les battements de l'été Où les histoires vivent. Découvrez maintenant