Chapitre 3 Germination 3/4

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Oussmane, désemparé, ne voyait maintenant plus que la silhouette d'une fille qui avait illuminé sa soirée, s'enfoncer dans l'obscurité. Cela faisait maintenant trois semaines que Fanta avait commencé à travailler. Chaque matin, elle se réveillait à l'aube, au son de l'appel du Muezzin qui annonçait l'heure de la prière de Fajr. La prière de Fajr offrait des bienfaits divins si immenses que s'en priver revenait sans aucun doute à se mettre des bâtons dans les roues. Après avoir accompli sa prière, elle entamait une nouvelle journée de travail. Elle arrivait au grand marché à neuf heures pour débuter sa longue journée. Fanta vendait de tout : des claquettes, des légumes, de l'eau. Lorsque l'affluence des clients diminuait, elle quittait le marché pour trouver des zones plus fréquentées, déterminée à augmenter ses gains coûte que coûte. À la fin de ces journées exténuantes, Fanta était si épuisée qu'elle ne tenait plus debout. Quelle femme courageuse ! Sortir à six heures du matin et rentrer à vingt-trois heures, jour après jour, cela exigeait un courage incommensurable. Et du courage, Fanta n'en manquait pas.

Son ambition était implacable, sa détermination plus solide que le métal. Ses allées et venues commencèrent peu à peu à perturber son oncle Bouba, habituellement doux et calme comme le père de Fanta. Il commença à se poser des questions : « Mais que fait-elle de ses journées, pour sortir si tôt et rentrer si tard ? » Kady, qui se trouvait à ses côtés, n'en manquait pas une pour répliquer : « Je te l'avais dit, cette fille ne nous apportera que des ennuis. J'en suis sûre, si ton frère la voyait, il aurait honte d'elle, et de toi aussi. Il se demanderait comment tu peux laisser sa fille faire n'importe quoi, traîner dehors tard la nuit. On ne sait pas ce qu'elle fait, mais je suis certaine qu'elle est avec des garçons ! » Son « frère » était en réalité son meilleur ami, mais en Afrique, un ami proche, un meilleur ami, devient un frère, un cousin. Dès que des liens forts se créent, le reste de la famille suit et il devient un membre à part entière. Ainsi, Bouba et le père de Fanta étaient devenus des frères. Kady reprit : « De toute façon, est-ce que ton frère aurait pu contrôler cette gamine insupportable qui aime crier sur tous les toits qu'elle est une femme libre ? »

Fanta, qui venait de finir sa longue journée, se tenait devant la porte et avait entendu toute leur conversation. Elle attendit sur le seuil pour écouter le reste. Kady, qui aimait monter les gens les uns contre les autres, éleva la voix : « Tu vois, je te l'avais dit, on n'aurait jamais dû récupérer cette fille. Elle ne fait que nous causer des ennuis toute la journée. Et la famille, tes frères et sœurs, que vont-ils penser ? Que diront les voisins ? Penses-y un peu, c'est ton honneur qui est en jeu. »

Bouba répondit avec une extrême violence, ayant un ton déconcertant : « Ne me parle plus jamais d'honneur ! As-tu perdu la tête ? Crois-tu que je sois un idiot, pour gober toutes tes idioties lancées sans réfléchir ? Tu ne manques pas d'air ! En vérité, tu es arrogante. Tu ne t'imposeras jamais dans ma tête et tu ne te mettras jamais entre moi et ma petite fille, jamais, tu m'entends ! » Kady, sans attendre, vicieuse et sournoise, répliqua : « Tu vois, on ne peut jamais parler avec toi, tu t'énerves toujours, tu n'es jamais content. Je t'aurai prévenu. » En réalité, elle était en colère car elle savait que Fanta se trouvait devant la porte et elle voulait que son mari parle mal d'elle. Deux minutes plus tard, les clés retentirent dans la serrure. Kady était partie se laver, et Bouba était assis sur le canapé. Bouba demanda alors des explications à Fanta, ce qui était somme toute normal, car il tenait à elle. C'était sa petite fille, et leur relation n'était pas conflictuelle. Au contraire, ils avaient une véritable relation père-fille. C

ependant, il restait un vieil homme, âgé de soixante-trois ans, et il devenait peu à peu fragile, vieillissant dans de telles conditions. Personne ne mérite cela. Kady était en grande partie la cause de tous ses maux, mais il avait décidé de ne jamais la quitter, en raison de l'histoire qu'elle avait subie. Donc, il restait là, se disputant parfois avec elle, mais se retenant toujours, gardant ses mots pour ne pas la blesser brutalement. Il lui disait toujours la vérité, mais sans excès. Ainsi, lorsque sa colère éclatait, c'était que Kady avait vraiment dépassé les bornes. Fanta comprenait son oncle et le soutenait toujours. Elle savait qu'il n'avait plus beaucoup de moyens, et que l'argent disponible devait subvenir aux besoins de toute la famille, y compris ses autres enfants et sa seconde femme. Elle ne voulait pas être une charge supplémentaire. Elle était grande maintenant, et pour elle, il n'y avait pas de distinction : Bouba était son père. Il s'était toujours tenu aux côtés de Fanta pour la protéger du mieux qu'il pouvait. Pour lui aussi, elle était sa fille, et elle ne lui en voulait pas, car il n'était pas responsable des difficultés qu'ils traversaient.

Les maux de FantaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant