Chapitre 3 : L'appel du désespoir

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Les gouttes frappaient les trottoirs avec une régularité presque apaisante, pour Élisabeth Berger, rien dans ce moment n'était paisible. Son cœur battait la chamade, elle sentait une urgence viscérale la pousser en avant, malgré le poids du désespoir qui alourdissait ses pas. Ses cheveux détrempés lui collaient à la peau, mais elle n'y prêtait pas attention. Tout ce à quoi elle pouvait penser, c'était Annie. Sa fille avait disparu depuis maintenant plusieurs heures, chaque heure écoulée ne faisait qu'accroître la peur terrible qu'elle ne la reverrait jamais. Chaque pas résonnait comme un écho dans les ruelles silencieuses, tandis qu'elle se dirigeait vers un bistro qu'elle connaissait trop bien. Ce n'est pas un endroit où elle aime aller, mais c'était là que se trouvait la seule personne qui, selon elle, pouvait l'aider.

Elle avait vu Charles David au bar quelques heures auparavant. Il avait une réputation. Ancien policier, il avait résolu des affaires complexes, des disparitions non élucidées et des homicides qui avaient longtemps laissé les enquêteurs sans voix. Mais aujourd'hui, Charles n'était plus ce qu'il avait été. Propriétaire de ce bistro miteux au coin de la rue des Carmes, il était connu pour noyer ses propres démons dans l'alcool, tout en restant distant et froid. Les rares fois où il engageait la conversation, c'était pour servir des réponses acides ou cyniques à ceux qui osaient lui poser des questions sur son passé.

Mais malgré sa déchéance apparente, Élisabeth savait qu'il restait en lui une part de l'homme qu'il avait été. Un enquêteur brillant, un homme capable de voir ce que les autres ne voyaient pas. C'est pour cela qu'elle se trouvait là, devant cette porte usée, sous la pluie battante. Elle leva la main, hésitant une fraction de seconde avant de toquer. Trois coups fermes résonnèrent dans la nuit. Aucune réponse. Elle toqua de nouveau, plus fort cette fois, frappant avec l'énergie du désespoir.

Au bout de quelques instants, la porte s'ouvrit, et un homme massif apparut dans l'encadrement. Charles. Ses traits étaient marqués, son visage ridé par des années de chagrin et de solitude. Il la regarda sans la reconnaître immédiatement. Ses yeux gris étaient ternes, voilés par l'alcool, mais malgré cette apparence négligée, il restait imposant.

« Qu'est-ce que tu veux ? » Sa voix était rauque, trahissant un mélange d'ennui et d'agacement.

Élisabeth sentit une vague de panique monter en elle. Elle n'avait pas réfléchi à ce qu'elle allait dire, elle n'avait qu'un besoin primal d'obtenir son aide.

Élisabeth sentit une vague de panique monter en elle. Elle n'avait pas réfléchi à ce qu'elle allait dire, elle n'avait qu'un besoin primal d'obtenir son aide. Mais elle savait aussi que pour le convaincre, elle ne pouvait pas se contenter de la sincérité de son désespoir. Elle devait être plus stratégique. Plus subtile.

Elle prit une profonde inspiration et changea d'attitude, faisant appel à ce qu'elle avait appris au fil des années, à ces gestes délicats et ces regards appuyés qui avaient souvent fait tourner les têtes. Elle s'approcha de Charles, réduisant la distance entre eux, leva lentement les yeux vers lui, son regard émeraude captant le sien.

« Je t'en prie, Charles... » Elle laissa sa voix glisser, douce et sensuelle, presque un murmure entre ses lèvres. « Je sais que tu peux m'aider. Je n'ai personne d'autre à qui m'adresser... »

Elle posa délicatement une main sur son bras, ses doigts froids de pluie effleurant la chaleur de sa peau. Un sourire se dessina sur son visage, tremblant mais enjôleur. Ses lèvres, d'un rouge discret mais captivant, esquissèrent une expression de supplication charmeuse. Elle savait que chaque détail comptait, que chaque geste pouvait être une clé pour atteindre cet homme verrouillé de l'intérieur.

Charles détourna légèrement la tête, comme pour échapper à l'intensité de son regard, mais elle n'abandonna pas. Elle fit un pas de plus, son parfum se mêlant à l'odeur de la pluie et de la fumée de cigarette. Sa voix se fit plus basse, un souffle entre deux respirations.

Aline Où les histoires vivent. Découvrez maintenant