Chapitre 1

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la saison des sorcières atteignait son paroxysme, les feuilles mortes se détachaient de leurs branches, tandis que les couleurs automnales des arbres influençaient l'humeur des hommes et des femmes du village. Les sorcières émergeaient enfin de leurs tanières, tandis que les sorciers, regagnaient leurs foyers.

Le premier jour du mois revêtait toujours une importance cruciale dans les traditions du village. Comme dans chaque conte de fées, un immense château se dressait au sommet de la plus haute colline de la région. Dans l'une des tours de cette forteresse, une fenêtre brillait, illuminant une pièce obscure ; c'était la seule source de lumière visible dans l'édifice. La lune, teintée d'un rouge sanglant, menaçait d'un air sinistre la silhouette du château. Cette fenêtre donnait sur une vaste et spacieuse salle, divisée en deux parties distinctes. La première moitié était vide. Quant a le deuxième, emplit de mystère, laissait entrevoir un semblant de vie.

La porte était grande ouverte, laissant filtrer des sanglots provenant du fond du couloir. Une voix douce et réconfortante, celle d'une femme, apaisait des pleurs. Cette voix, empreinte de sérénité, répétait inlassablement les mêmes mots, et les sanglots semblaient se dissiper lentement. Dans la pièce d'où émergeaient ces larmes, deux jeunes femmes étaient allongées sur le carrelage froid de l'arrière-cuisine. L'une d'elles, aux cheveux clairs, était blottie dans les bras de l'autre. Son corps était secoué de hoquets de chagrin, tandis que ses mains s'agrippaient désespérément au manteau de la seconde femme, qui se contentait de caresser longuement les cheveux bruns de celle qu'elle aimait.

« Je ne peux plus supporter cela, Agatha. Tu ne peux pas continuer à tolérer ça, » murmura-t-elle, sa voix tremblante trahissant sa difficulté à achever sa phrase.

Agatha, quant à elle, restait silencieuse, accablée par le poids de ses responsabilités.

La jeune femme, poursuivi son discours chargé de sentiments.

« Nous allons partir, d'accord ? Je ne peux plus te voir comme ça, mon cœur.» insista la jeune femme en redressant le visage d'Agatha, ses mains enveloppant doucement ses joues. Les yeux bouffis de celle-ci révélaient toute la détresse dans laquelle elle se débattait.
« Rio nous savons très bien toi et moi, que ce n'est pas possible »

« Pourquoi ça ne le serait pas hein? » fit Rio, son étreinte se resserrait contre Agatha, la tristesse dans laquelle se trouvait son amante lui brisait un peu plus le coeur. Il y avait encore de l'espoir mais plus les jours passaient, plus il s'éteignait a mesure que les journée se raccourcissait.

La jeune femme ne répondait pas, elle se contenta de l'étreinte de Rio.

La tour du château était plongée dans une obscurité épaisse. Agatha et Rio, enlacées, partageaient un moment de tendresse en espérant trouver un peu de réconfort a travers tout ce désarroi.

Le temps s'écoulait, comme un ruisseau indolent, lorsque Agatha se redressa, son cœur battant à l'unisson de ses émotions tumultueuses. Elle plongea son regard dans les yeux de Rio, qui demeurait assise sur le sol, le souffle court. Leurs âmes, comme deux étoiles perdues dans l'immensité d'une nuit étoilée, s'entrelacèrent dans un silence lourd de promesses. Une énergie fragile, presque palpable, circulait entre elles, murmurant des serments silencieux : « Nous nous protégerons, coûte que coûte. Jamais plus je ne te laisserai affronter ça seule. »

C'était Agatha qui, la première, rompit cette étreinte protectrice, ses mains glissant lentement des paumes de son amante, comme si chaque contact était un fil d'or déchiré. Elle savait qu'elle devait affronter la vérité, se mesurer à la colère et à la désapprobation de sa mère. Elle se leva, la lumière vacillante des torches projetant des ombres inquiétantes sur les murs de pierre, puis disparut dans l'obscurité labyrinthique des couloirs du château.

La nuit était tombée, enveloppant le royaume d'un manteau de mystère. La plupart des sorciers dormaient paisiblement, inconscients des tumultes qui se tramaient dans l'ombre. Les hommes s'occupaient des affaires du château, laissant les femmes porter le poids des anciennes traditions. À travers la fenêtre du dernier étage, où Agatha se tenait, une lueur bleuâtre scintillait au loin, comme un phare dans la nuit. C'était la lumière de sa mère, émanant d'un pouvoir saphir, une lueur qui promettait à la fois protection et destruction.

Dans le grand séjour du château, l'affrontement qui se profilait promettait d'être sans précédent. La pièce, ornée de tapisseries anciennes et de chandeliers en cristal, était imprégnée d'une tension palpable. Agatha se tenait face à sa mère, le cœur battant à tout rompre. « Je t'en supplie, laisse-la rester avec moi ! » hurla-t-elle, ses mots résonnant comme des éclats de verre brisé. « Je ferai tout ce que tu veux ! Je serais tout ce que tu as envie que je sois, je serais la fille que tu as toujours rêver d'avoir si c'est ça que tu désirs tant ! »

La voix de sa mère, froide comme l'acier, résonna dans la pièce. « Oh, ma fille, tu sembles méconnaître la gravité de ta situation. Tu n'as de compte à rendre qu'à toi-même. Mes autres filles et moi avons délibéré. Ce soir, le rite exige que la sorcière qui enfreint nos règles les plus sacrées perde tout pouvoir et s'adonne pleinement au néant grandissant. Tu es désormais à la merci de notre volonté. Tu as enfreint les règles de Salem, le procès se déroulera demain à la première heure. »

Dans un élan de désespoir, Agatha s'enfuit, le cœur affolé. Jamais elle n'avait couru aussi vite, les couloirs se transformant en un dédale sans fin. Elle se perdait, se heurtant aux ombres des souvenirs, traversant des lieux familiers devenus hostiles. Chaque pas l'enfonçait un peu plus dans les abysses du château, un labyrinthe où aucune issue ne l'attendait. Mais, soudain, une main s'étendit vers elle, interrompant le tourbillon de pensées sombres. Agatha releva la tête et croisa le regard de Rio, où brillaient à la fois espoir et une résolution tranquille. Dans cette expression, Agatha sentit une promesse silencieuse : celle de Rio, prête à tout pour la protéger, à faire face à l'adversité sans hésitation.

Rio incarnait cette force rassurante, prête à les défendre contre les dangers qui les guettaient. Suis-moi », murmura Rio, sa voix tremblante mais résolue, trahissant une inquiétude palpable dans ses gestes. Ensemble, elles s'enfoncèrent dans la forêt de Lonevale, les feuillages bruissant comme des secrets chuchotés. Dans l'obscurité accueillante de la forêt, elles espéraient trouver refuge, même pour un temps.

Le monde s'éteignait autour d'elles, mais au cœur de cette obscurité, une lueur de détermination brillait, alimentée par l'amour indéfectible qu'elles se portaient.

Les Mystères de LonevaleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant