Prince pantin [MxM - α/Ω - DarkRomance]

Chapitre 2 - Les enchères et les acheteurs, les articles et l'argent

 En ouvrant les yeux dans le grand lit clair, je mirai ma droite pour trouver le matelas vide de toute présence. Je me redressai, soulagé, et tendis l'oreille. L'appartement semblait silencieux, calme, désert. Je ramenai mes jambes contre moi et les entourai de mes bras un instant, le temps de remettre mes idées en place. Finalement, Adryan avait eu raison de renvoyer Isaac ; j'avais fini par perdre connaissance. Au moins, il avait eu la bonté de me laisser cuver ma perte de conscience ici pour une fois...

L'effet des drogues s'était estompé. Elle aidait à survivre, mais n'atténuait pas les douleurs. Elle ne faisait qu'engourdir les sensations pour quelques heures. Je soupirai affligé d'une journée qui s'entamait à peine. À travers les rideaux, je devinai le soleil déjà levé et la météo magnifique à laquelle j'aurais droit.

Je m'extirpai des draps sans les soulever, la seule façon de ne pas voir le sang qui les souillait chaque fois que je passai la nuit ici. Je me rendis dans la salle de bain qui jouxtait la chambre d'un pas lent et pris une douche longue qui détendit un peu mes muscles endoloris. J'avais peu de souvenirs de la veille. Des sensations plus que des images. J'avais pleuré, supplié, comme d'habitude. Son rire me revint en tête. Combien de temps est-ce que tout ça avait duré ?

Sous l'eau, je tentai de laver mon corps et mon esprit, sans y parvenir. Je sentais toujours l'alpha vieillissant, le sexe et la peur. Je déambulai ensuite jusqu'à la cuisine, où un petit déjeuner de roi m'attendait. Viennoiseries, boissons chaudes, fruits, charcuterie... J'avais tout à disposition, mais mon ventre se serrait davantage à chaque bouchée. J'avalai un chocolat brûlant, assis sur l'un des tabourets hauts qui devançaient l'îlot de cuisine de cet appartement luxueux. Sa demeure était à son image, d'un blanc immaculé, de bonne facture et absolument tout puait le fric.

Je croquai dans un chausson aux pommes. La pâte feuilletée croustilla sous mes dents et ma langue se recouvrit de compote de pommes encore chaude. Malgré moi, je léchai mes lèvres. Il savait que j'adorais ça, il y en avait toujours après nos temps ensemble, comme une récompense pour les sévices endurés. Comme un enfant à qui on donne un bonbon pour avoir bien fait ses devoirs.

Je ne tardai pas à partir, sans rien ranger du bazar que j'avais mis. Il avait des gens pour ça. Il avait des gens pour tout. Je pris un Uber qui me déposa au club. Jusqu'à midi, j'utilisais la salle d'entraînement. Danser, oublier, la musique dans les oreilles et l'esprit déconnecté. J'évitais les autres comme la peste, incapable de leur faire face aujourd'hui. Eux et leur vie misérablement douce et appréciable.

Le corps encore ankylosé, je fis mon possible pour me préserver en vue de la soirée. Après un an de dressage, les oméga promis à la Famille l'an dernier seraient mis aux enchères ce soir. Une grande fête était donc organisée et tous les gros bonnets y festoieraient. C'était à cette réunion que chacun pourrait se pavaner avec son ou ses oméga.

Lorsque je retournai dans ma loge, une large boîte enrubannée de blanc m'attendait. Elle avait été déposée pendant mon absence, certainement par Isaac et depuis, elle patientait pour me narguer.

Tous les ans, Adryan redoublait d'inventivité afin de me dégoter des tenues qui en dévoileraient plus qu'elles n'en cacheraient, et pour cause, c'était exactement la raison de ma présence là-bas, comme tous les autres de ma caste. Sauf que moi, je devais faire bonne figure, montrer à tous à quoi devait ressembler un oméga parfaitement dressé, aux ordres de son maître alpha.

Assis sur mon large fauteuil rembourré, je m'examinai d'un œil maussade dans le miroir qui me faisait face. Au fil des années, j'étais devenu le portrait craché de ma mère, une créature minable, décharnée, plus proche du zombie que de l'humain. Les mêmes yeux clairs cerclés de cernes profonds, la même peau grisâtre et terne...