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VIII - Et maintenant ?

Et la vie continuait. Max se concentrait plus sur sa thérapie que sur le reste de sa vie. Étrangement, il semblait que ces moments lui apportaient quelque chose dont il ne se doutait pas. Il me surveillait de près également. J'étais toujours avec Sam et Jimmy, mais la reine vérifiait régulièrement ma présence. Son côté contrôlant à l'extrême m'avait fait découvrir une puce GPS dans un pendentif qu'il m'avait offert. Lorsque j'avais grogné en découvrant le pot aux roses, il avait simplement répliqué que tout bon labrador devait avoir un collier. Il avait demandé ensuite à Jimmy s'il pouvait me tatouer l'adresse de la maison dans l'oreille. J'avais été horrifié. Jimmy avait failli mourir de rire. La vie continuait. J'avais malgré tout noté une sensibilité plus grande de la grande reine. C'était difficile et je le voyais bien. Sam ne disait rien mais fronçait les sourcils par moment tout en regardant Jimmy. Nous nous inquiétons.

En fait, nous nous préoccupâmes au point même que Sam et Jimmy avaient accepté que Max installe son métier dans leur salon pour ajuster ses perles sur la gaze de sa future robe d'impératrice comme il se plaisait à nous l'enfoncer dans les oreilles voire dans le crâne. Et pendant des heures et patiemment, il agitait un petit crochet, du fil et des perles qui perçaient un tissu. Il faisait cela pendant des heures dès qu'un moment se libérait. Je pouvais constater les avancées de la création et je devais bien convenir que je voyais le même résultat sur des robes haute couture dans les défilés. Il était plus que doué et il fallait bien reconnaître ce talent caché. J'avais appris, pendant toutes ces années, que Max se donnait beaucoup de mal pour Pepper. Peu de moyens, donc beaucoup de travail, c'était un de ses mantras. Les tenues de Pepper étaient toutes cousues main et imaginées par Max lui-même. Tout était réalisé par des mains habiles. Et quand je parlais de cousu main, il s'agissait vraiment de cela. Je n'avais jamais vu une machine à coudre dans l'appartement. J'avais posé la question et la réponse fut : pas la place, pas les moyens financiers du rêve de la machine idéale donc tout à la main parce que c'est ça la vraie haute couture, espèce de clebs. C'était du Pepper tout craché.

Aujourd'hui était un grand jour, Max avait terminé le travail du tissu et avait terminé d'assembler les différentes parties de son ouvrage. Ce soir, c'était la grande soirée mensuelle et évidemment Pepper devait briller. Je la soupçonnais de vouloir briller encore plus. C'était étrange. J'avais rejoint le café et Max qui s'était installé son coin "naissance de la queen" dans le noble établissement. Cela lui avait fait gagner une bonne surface supplémentaire dans son petit appartement. Il n'y avait pas eu le choix puisque j étais resté et qu'il me fallait à moi aussi quelque peu d'espace. J'arrivais donc à mon habitude et Max commençait à disparaître pendant que Pepper se préparait à faire bouffer des perruques aux autres queens. Elles étaient plus nombreuses depuis quelque temps. Pepper tenait son monde d'une main de fer et les autres apprenties reine, comme il se plaisait à les nommer, n'en étaient pas moins admiratives du modèle sous leurs yeux.

La Pepper que j'avais en face de moi semblait plus fatiguée et usée, moins flamboyante. La robe fourreau avec franges, bustier et broderie sur perle était absolument superbe et digne d'une impératrice, j'en convenais, mais la reine qui la portait semblait s'éteindre. Elle avait les yeux dans le vide, rêvant à quelque chose qui m'était inaccessible. Elle ne m'avait même pas remarqué. Je pris doucement les pinceaux, le maquillage et le reste du nécessaire et je commençais doucement mon travail. Pepper sursauta puis se détendit, fermant les yeux au contact délicat des poils de martre et me laissant œuvrer. C'était entre nous, c'était notre intimité. Un nid de silence et d'esthétique. Nous passâmes un long moment dans cette atmosphère calme avant que Pepper ne commence à parler.

- Merci pour l'aide. Je dois être absolument fabuleuse ce soir. Il faut que ça brille et que ça pète et que ces grognasses voient ce qu'est une vraie impératrice du marais.