CUERO DI PIETRA

05

La pièce semblait se rétrécir autour de moi alors que le silence s'installait après les mots de mon père. Alonzo s'assit en face de moi, calmement, comme s'il venait de m'annoncer une nouvelle tout à fait banale. Je ne bougeais pas, incapable de réagir. Mon esprit travaillait frénétiquement à comprendre l'ampleur de ce qu'il venait de dire.

Moi: Qu'est-ce que je dois savoir pour ce voyage ? (dis-je finalement, d'une voix plus ferme que je ne l'aurais cru.)

Alonzo: Tu vas partir pour Solikamsk, dans la région de Perm, (explique-t-il)Une ville perdue dans l'Oural, loin de tout ce que tu connais. Là-bas se trouve une prison de haute sécurité, la Baleine Noire.

Il marqua une pause, laissant planer ses paroles dans l'air.

Moi: Pourquoi cette prison est-elle si spéciale ?(demandai-je, mon ton trahissant un mélange d'appréhension et de défi.)

Alonzo laissa échapper un petit rire, une note de sarcasme perçant sa voix.

Alonzo: Spéciale ? Cette prison est un véritable enfer sur terre. IK-6, comme on l'appelle officiellement, est réservée aux criminels les plus dangereux de Russie : meurtriers, terroristes, chefs de gangs... Là-bas, les détenus sont condamnés à une vie d'isolement presque total. Les conditions sont si rudes qu'elles brisent même les plus durs. Certains passent jusqu'à vingt-trois heures par jour enfermés dans des cellules minuscules, sans lumière naturelle. Les gardiens n'hésitent pas à utiliser la force pour maintenir l'ordre, et les rumeurs de tortures ne manquent pas. Les rares qui en sortent ne sont plus les mêmes.

Je déglutis, essayant de ne pas montrer l'inquiétude qui s'insinuait en moi.

Moi: Et pourquoi devrais-je aller là-bas ? (demandai-je, la voix plus sèche que je ne l'aurais voulu.)

Son sourire disparut, remplacé par une expression froide et calculatrice.

Lui: Tu n'as pas à comprendre les raisons, (répliqua-t-il avec une brusquerie glaciale.) Ce que tu as à faire, c'est d'obéir. L'infiltration à la Baleine Noire est un ordre, et tu ne seras pas seule. Asad t'accompagnera.

Je restai sans voix un instant, essayant de digérer l'information. Une infiltration dans l'une des prisons les plus dangereuses de Russie ? Avec Asad ? L'idée seule était absurde, presque suicidaire.

Moi: Et qu'est-ce qu'on est censés y faire ? (insistai-je, refusant de lâcher l'affaire.)

Alonzo: Cela ne te concerne pas, (trancha-t-il sèchement.) Ton rôle est d'entrer avec Asad et de suivre les instructions qu'il te donnera. Tout ce que tu dois savoir, c'est que cette mission peut nous rapporter gros si elle réussit. Tu feras ce qu'on te demande, et tu rentreras.

Je le fixai, cherchant une trace d'humanité dans ce visage qui m'était pourtant si familier. Mais il n'y avait rien. Juste l'indifférence d'un homme qui avait depuis longtemps oublié ce que c'était d'être un père.

Je me redressai, mon expression se refermant sur un masque de neutralité glacée. Assise devant cet homme qui était censé être mon père, j'avais l'impression de n'être rien de plus qu'un pion sur son échiquier. Il m'envoyait littéralement dans un enfer, accompagnée d'un psychopathe.

Moi: Super, (murmurai-je finalement, mon ton tremblant à peine d'ironie.)

Alonzo se contenta d'un bref hochement de tête, comme si l'affaire était déjà réglée, avant de se détourner pour reprendre ses activités. Je quittai le bureau sans un mot de plus, mes pensées tourbillonnant dans un chaos que je ne parvenais pas à ordonner.

{...}

Je passai les heures suivantes dans ma chambre, fixant le plafond sans vraiment le voir. Pourquoi m'envoyait-il dans cette prison, et pourquoi avec Asad ? Les explications étaient insuffisantes, les motivations de mon père opaques. Chaque théorie que j'échafaudais semblait plus invraisemblable que la précédente. Était-ce pour tester ma loyauté ? Me punir ? Me sacrifier ? Rien n'avait de sens, et cela m'angoissait d'autant plus.