18 | 𝔖𝔱𝔞𝔫𝔦𝔰𝔩𝔞𝔴

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EQUATION RÉSOLUE

Chaque problème a sa solution.
Chaque flamme a sa jumelle.
Chaque âme a sa sœur.

— Tu nous emmènes tu sais où, hein ? Marmonne Zaviyar dans sa barbe.

Située derrière moi, sa sœur attrape son pull, souhaitant faire partie de la confidence. Elle prétend bouder quand il reste camper sur ses positions, refusant catégoriquement de lui indiquer notre destination. Quant à Beatrix installée à ma droite, elle a le regard plongé dans le vide.

— Tu as une question ? me surprend-t-elle.

— Pourquoi ?

— Tu me fixes, Stanislaw.

À l'arrière, Zaviyar se crêpe encore le chignon avec sa frangine, nous prodiguant un instant d'intimité.

— Tu te méprends, nié-je.

— Tu me toisais aussi cette nuit-là, sous le clair de lune, marmonne-t-elle.

Dans sa voix, un soupçon d'espoir virevolte. Je le perçois. Son profil fièrement dressé, elle fait mine de ne pas sentir mon attention brulant son épiderme.

— Tu es autant belle que ce satellite. Je n'ai pas menti.

Avant que nos pupilles se croisent, je m'accroche au volant, la vision accaparée par l'autoroute. Quant à Beatrix, elle m'épie de longues secondes sans esquisser le moindre geste, sans articuler la plus infime des syllabes.

— Je sais où on va ! s'esbaudit Sabine tout en applaudissant. Zaviyar, tu es un génie !

Ma voisine se retourne, cherchant à en apprendre plus, mais sa camarade refuse de lui révéler quoi que ce soit.

— Dis-moi, me souffle-t-elle.

Je rechigne.

— On est presque arrivés, Bea. Sois patiente.

Elle n'insiste pas. Calée dans son siège, sa tête est tournée vers l'extérieur, les troncs d'arbres défilant à toute vitesse sous un épais voile de pellicules diaphanes. Derrière nous, mon meilleur ami et sa sœur abordent divers sujets. Sabine spécule sur l'état de santé de ses parents et demande à son frère quand ils lui rendront visite. Il lui rétorque qu'avec le travail, ils ne trouvent pas de temps. Je jauge sa réaction par le biais du rétroviseur. Elle se mord l'intérieur de la joue.

— Tu sortiras bientôt, la réconforté-je. Ce n'est plus qu'une question de semaines.

Elle me sourit mollement.

— Quand tu reviendras à la maison, on se ressourcera au Maroc, ajoute Zaviyar. Ça te fera du bien.

— Vraiment ? rayonne-t-elle. Maman et papa sont d'accord ?

— Bien sûr. De toute manière, qu'ils le soient ou pas, nous irons en vacances.

Excitée par la nouvelle, ses éclats de joie ne faiblissent pas. Nous avançons dans la nuit noire sous les rires de Sabine et les gags de Zaviyar. Par moment, je surprends les lèvres de Beatrix se recourbés, mais le mouvement est bref. J'en viens à m'interroger sur la lucidité de mon esprit jusqu'à ce qu'une énième blague pourrie de mon meilleur ami.

— Qui est la plus intelligente entre la blonde, la rousse et la brune ?

Sabine, pliée en deux, n'écoute qu'à moitié. Zaviyar tapote mon bras, m'incitant à lui donner une réponse.

— Je ne sais pas, la brune ?

— Non ! s'insurge-t-il. T'es trop bête. C'est la rousse !

Un silence d'aplomb s'abat aussitôt au sein de l'habitacle. Les rires de Sabine s'évanouissent. Zaviyar et moi échangeons un regard par le biais du rétroviseur. Je fronce les sourcils et il s'écrie :

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