Nos âmes perdues

Chapitre 1

5 ans plus tard  : Kyle

Je me réveille en sursaut. Mon souffle est rapide, trop rapide, et mon cœur bat dans mes tempes. La pièce est plongée dans une obscurité étouffante, brisée uniquement par le faible halo lumineux de la ville filtrant à travers les stores. Une fois de plus, ce sont ces mêmes yeux verts qui me poursuivent dans mes cauchemars. Ce regard, intense et perçant, qui me suit. Cela fait cinq ans que ces cauchemars me hantent, mais cette nuit-là semble toujours vouloir revenir. Cette nuit où j'ai eu un accident de voiture.

Je me redresse dans le lit, laissant mes pieds glisser sur le sol froid. Mes muscles sont tendus, comme si mon corps refusait de sortir de l'état de combat dans lequel il était plongé. Mon t-shirt est trempé de sueur. Il ne se passe plus un mois sans que ces cauchemars ne me réveillent, et pourtant, je ne parviens toujours pas à comprendre ce qu'ils signifient. Des yeux. C'est tout ce dont je me souviens. Un regard figé dans le temps. Rien d'autre ne semble vouloir émerger de ce brouillard de confusion.

Je me lève, m'appuyant sur la table de chevet pour retrouver mon équilibre. La pièce est silencieuse, presque oppressante dans son calme. Je jette un coup d'œil à l'horloge : 04h30.

Comme chaque nuit.

Je fais quelques pas dans la pièce, mes pieds nus résonnant à peine sur le sol en bois. Sans réfléchir, je me dirige vers la baie vitrée qui donne sur la ville. Mon appartement est perché assez haut pour que je puisse voir New York dans toute sa splendeur nocturne, la ville qui ne dort jamais. Les lumières des bâtiments clignotent au loin, créant un contraste saisissant avec le silence qui règne ici, dans cette pièce où je me sens de plus en plus étranger à moi-même.

Je m'appuie contre la vitre, mon front touchant le verre froid. La sensation est réconfortante, en un sens. Un choc de réalité après l'intensité du rêve. Pourquoi ces yeux me hantent-ils ? Pourquoi cette sensation de perte, comme si quelque chose d'important m'échappait constamment ? Ces questions tourbillonnent dans mon esprit, sans jamais trouver de réponse. Je sais que cela a un lien avec l'accident. L'accident qui m'a laissé avec ces cauchemars et ce trou béant dans ma mémoire. Mais rien ne semble vouloir remonter à la surface.

Je pousse un soupir, la frustration montant en moi. Cette routine est devenue un cercle vicieux. Je me réveille, hanté par ce même cauchemar, puis je passe le reste de la nuit à essayer de me rendormir sans succès. Chaque matin, je me retrouve épuisé, incapable de me concentrer pleinement sur quoi que ce soit.

Mon téléphone est posé sur la table de chevet, et sans réfléchir, je l'attrape pour vérifier l'heure une nouvelle fois. 4h50 maintenant. Je sais que je ne devrais pas, mais je déverrouille l'écran et ouvre mes messages. Diana. Une fille parfaite, dans tous les sens du terme. Belle, intelligente, ambitieuse. Tout ce que je devrais vouloir. Mais malgré tout, je ressens toujours ce vide, ce manque. Comme si une partie de moi restait inaccessible, même dans notre relation. Ce n'est pas sa faute, bien sûr. C'est moi. Quelque chose me retient, mais je ne sais pas quoi.

Sans trop réfléchir, j'écris un message.

Moi :

Tu dors ?

Je pose le téléphone, regardant la lumière bleue de l'écran s'estomper dans l'obscurité. Je ne m'attends pas à une réponse immédiate, mais à ma grande surprise, le téléphone vibre quelques secondes plus tard.

Diana :

Je viens de me lever. Pourquoi ? Ça va ?

Je fixe le message pendant un moment, mon esprit est en proie à des tourments que je ne peux expliquer. Je devrais lui dire ce qui se passe. Je devrais lui parler de ces cauchemars qui me rongent depuis des années. Mais je n'y arrive pas. Je n'arrive jamais à en parler à personne.