Le Véritable Amour

La rencontre

Lucie observait l'horizon, les pieds dans le sable frais du matin. Le soleil se levait à peine, et la lumière douce de l'aube baignait la petite plage déserte d'une lueur rose et dorée. Elle aimait ces moments d'évasion, seule face à la mer, un appareil photo à la main et l'esprit libre. Après des mois de travail acharné et de fatigue, elle s'était offert quelques jours de repos dans ce coin reculé, espérant puiser de l'inspiration dans la tranquillité de cette ville côtière.

Ce matin-là, Lucie longeait la plage, capturant les détails que seuls les lève-tôt pouvaient apercevoir : la trace d'un crabe sur le sable, une plume blanche flottant au gré du vent, et les vagues qui caressaient doucement le rivage. Absorbée par sa passion, elle ne remarqua pas tout de suite la silhouette qui se dessinait au loin.

À mesure qu'elle avançait, elle aperçut un homme assis sur un rocher, une sorte de carnet à la main, le regard rivé vers l'horizon. Curieuse, Lucie ralentit le pas, hésitant entre faire demi-tour pour respecter sa tranquillité ou continuer sa marche et l'ignorer. Pourtant, quelque chose la poussa à avancer. Le vent emportait par moments une mèche de cheveux sur le visage de l'homme, qu'il chassait distraitement, comme un réflexe. Il paraissait absorbé par ses pensées, à la fois proche et distant, comme s'il appartenait plus au paysage qu'au monde réel.

Lucie se rapprocha sans un bruit. Puis, ne pouvant contenir sa curiosité, elle leva son appareil photo et prit discrètement un cliché de la scène. Le clic, pourtant à peine audible, fit réagir l'homme. Il releva la tête et tourna son regard vers elle, surpris.

Leurs yeux se croisèrent. Lucie sentit un léger frisson parcourir son échine. Il avait un regard profond, chargé d'une intensité qu'elle ne s'expliquait pas. Pendant un instant, elle eut l'impression que cet inconnu pouvait lire en elle, voir au-delà de ses masques et toucher quelque chose d'essentiel.

- Désolée, je ne voulais pas déranger, dit-t-elle, gênée.

L'homme lui sourit, d'un sourire timide , comme s'il n'était pas habitué à être interrompu.

- Ne vous inquiétez pas, répondit-il d'une voix calme. La lumière était parfaite, je comprends. Vous êtes photographe, n'est-ce pas ?

Lucie hocha la tête, surprise de la perspicacité de l'inconnu. Elle se rapprocha, se sentant étrangement à l'aise malgré le silence qui s'installait entre eux.

- Oui... enfin, j'essaie. Je suis ici pour trouver un peu d'inspiration.

L'homme la regarda un instant, comme s'il analysait chaque mot. Il fit un geste vers le rocher à côté de lui, l'invitant silencieusement à s'asseoir. Lucie hésita, mais finit par accepter. Il lui offrait un refuge inattendu dans ce matin naissant.

- Et vous, écrivain ? demanda-t-elle, en observant son carnet.

Il acquiesça, l'air pensif.

- Thomas, se présenta-t-il simplement.

- Lucie.

Ils échangèrent un sourire. Quelques minutes passèrent, chacun plongé dans ses propres pensées, sans qu'aucun n'éprouve le besoin de parler. Lucie observait discrètement Thomas, fascinée par la façon dont il semblait s'imprégner du paysage, comme s'il cherchait à s'en inspirer ou à y puiser quelque chose de vital.

Brisant le silence, il finit par lui poser une question :

- Vous trouvez souvent l'inspiration ici ?

Elle haussa les épaules en souriant.

- C'est la première fois que je viens. Je suppose que j'espérais quelque chose... de nouveau.

Thomas hocha la tête, comme s'il comprenait parfaitement. Sa voix était basse, presque un murmure.

- Parfois, l'inspiration surgit là où on s'y attend le moins.

Il regarda Lucie un instant, et elle se sentit déstabilisée par cette intensité dans son regard. Il y avait quelque chose de mystérieux, presque mélancolique en lui, comme s'il portait un poids invisible que seuls les sensibles pouvaient percevoir. Lucie se sentit inexplicablement connectée à cet inconnu, une sensation étrange mais douce, comme si elle avait enfin rencontré quelqu'un capable de comprendre les nuances de ses pensées.

Ils échangèrent encore quelques mots, des banalités, puis se levèrent. Avant de partir chacun de son côté, Thomas lui lança un dernier regard, un sourire léger sur les lèvres.

- À demain peut-être ? murmura-t-il, presque imperceptiblement.

Lucie le regarda s'éloigner, le cœur étrangement léger. Elle ignorait pourquoi cette rencontre l'avait tant marquée. Peut-être parce que, dans le regard de Thomas, elle avait entrevu quelque chose d'inédit, quelque chose qui faisait écho à ses propres tourments et aspirations.

Elle se surprit à espérer le revoir, sans raison précise, si ce n'est cette impression d'avoir trouvé, en l'espace d'un instant, une âme sœur, un reflet d'elle-même.

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Fin du chapitre 1.