Rouge ballon | Rendu de concours

7 3 0
                                    

Ce texte a été écrit dans le cadre du 'Concours d'un fée' de @Une_Petite_Fee

711 mots

TW: violence, mort, deuil, abandon

_______

Ce matin, Andreo m'a offert un ballon. Il est rouge et grand, bien lisse, retenu à mon poignet par un fil. Il flotte à côté de moi, fidèle compagnon d'hélium et de latex. Sa couleur visible s'ajoute au jaune vif de mon anorak préféré et à celui de mes bottes adorées.

Quand il m'a passé le fil a poignet, Andreo a bien insisté. "Ne le perd pas, Antonio" a-t-il répété "Tant qu'il sera avec toi, tu seras protégé"

Après ça, il est parti. Leandro dit qu'il s'en va pour un monde meilleur et que les docteurs vont s'en assurer. J'ai pas tout compris. Ensuite, vu qu'il était très tôt, j'ai pu prendre deux bols de céréales avant de m'habiller. J'ai dû retirer le ballon pour mettre mes vêtements et mon anorak.

Le ballon est parti au plafond. Trepilio a dû monter sur un escabeau pour le récupérer parce que je pleurais. Je me souviens des larmes chaudes sur mon visage et de la rougeur de mes joues, mon expression déformée par l'angoisse dans le miroir pendant que Leandro tentait de me calmer.

Ils ne comprennent pas. Andreo me l'a offert. Il a dit que je devais le garder, qu'il me maintiendrais en sécurité. Trepilio est descendu de l'escabeau et m'a redonné le ballon. Lui et Leandro se sont regardés d'un air entendu mais, avant qu'ils ne puissent me retenir, je suis sorti, mon ballon dans mon sillage.

Dehors, il faisait chaud. La pluie, déterminée à nous inonder, tombait en un rideau violent, le bruit assourdissant résonnant dans mes oreilles. J'ai mit mon capuchon, faisant attention à ne pas lâcher le ballon.

Le vent, agressif, brûlant, a failli m'arracher mon ballon. Non! Si je perds le ballon, je perds Leandro! Hors de question! J'ai retenu le fil de mes petits bras tous maigres, mes bottes jaunes glissant sur la boue et les rochers.

Mes pieds tant bien que mal ancrés dans le sol, mon corps frêle ployant face à la force des courants d'air puissants, je me suis avancé sur le sol mouillé, mes pieds s'enfonçant de quelques centimètres, l'humidité pénétrant mes bottes usées.

Tandis que je me décalais au gré des déplacements d'air plus forts que moi et que j'évitais les rochers, mes pensées ont dérivé. Je pensais à Andreo, parti ce matin pour un monde meilleur, à Trepilio, toujours prêt à aider mais cabossé par la vie, à Leandro, qui avait tout prit en main quand Emilio s'était envolé et je pensais à Emilio.

Emilio, c'était mon grand frère. Le notre, à Leandro, Andreo, Trepilio et moi. Il avait tout prit en charge après l'accident. Il avait rempli les papiers des hommes en noir qui étaient venus à la maison. Il avait aménagé un petit coin pour mes jouets dans la pièce où il travaillait.

Mais un jour, Emilio avait voulu prendre une pomme sans donné les ronds brillants au monsieur et le monsieur s'est énervé. Il a saisi le t-shirt d'Emilio, l'a plaqué au mur, tapé et puis il l'a lancé. Emilio, silencieux, tout mou, s'était retrouvé sur le toit d'une maison cabossée et branlante. Leandro était arrivé quelques heures après, avait récupéré mon corps refroidi par l'attente et nous avait emmené dans cette cabane au fin fond de nulle part.

On mangeait moins, depuis, mais les autres s'assuraient que j'avais assez. Ce matin, Andreo était parti vers un monde meilleur pour qu'on gagne quelques pièces brillantes et un peu de nourriture chacun. Je les avais entendu discuter, le soir, caché. Ils disaient qu'une maigre part divisée en trois était toujours mieux qu'une maigre part divisée en quatre.

Soudain, le vent s'arrête. La pluie aussi. La brume monte et je regarde autour de moi. Le ciel gris et sombre et, sur cette couleur menaçante se découpe une forme encore plus effrayante. Cette forme, imposante, se découpe nettement du ciel grâce à sa couleur flamboyante.

La forme dégouline d'un liquide gluant et lumineux qui fait mal aux yeux. Cette couleur, je la reconnais instantanément. Je n'ai aucun mal à l'identifier et elle me fascine. Je reste planté là, à regarder l'explosion vive et les brumes qui se tortillent autour de mes chevilles, fasciné parce que je connais la couleur de ce liquide, cette couleur si voyante.

L'explosion est rouge ballon.

Vous avez atteint le dernier des chapitres publiés.

⏰ Dernière mise à jour : 3 days ago ⏰

Ajoutez cette histoire à votre Bibliothèque pour être informé des nouveaux chapitres !

Le bazar de RiverOù les histoires vivent. Découvrez maintenant