Unfair - Hyunlix-

Chapitre 5

 A minuit pile, Félix appuya sur le bouton rouge, le jingle de l'émission résonna dans la pièce et sur les ondes. Sa voix grave, profonde, le remplaça rapidement dans une sorte de ronronnement presque sensuel.

« Wakey, wakey, mes p'tits chats... Come On, it's time to wake up... C'est BbokAri à l'antenne et vous allez passer ces trois prochaines heures avec moi... »

Le blondinet avait trouvé ce travail dans une radio locale il y avait plusieurs mois. Il devait animer en direct l'émission de nuit, de minuit à trois heures de matin, passant les chansons qu'il avait sélectionnées, annoncer quelques nouvelles, lancer les publicités. Il avait presque le champs libre pour l'animer comme il voulait. Pas qu'il rêvait de faire de la radio, mais ses patrons trouvaient que sa voix allait très bien pour l'heure de diffusion, et ses heures étaient plutôt bien payées, ce qui était une aubaine pour lui. En plus les heures de nuit étaient généralement plus calmes que le jour, peu de gens appelaient, seuls quelques insomniaques parfois. Ses journées habituelles étant généralement assez éprouvantes, il avait eu de la chance de trouver ce job calme, il pouvait se reposer en travaillant, même s'il grignotait ses précieuses heures de sommeil. Ce soir, heureusement que Chan l'avait laissé dormir, il n'aurait sans doute pas pu assurer sinon.

« Cette nuit, j'espère que je vais réussir à combler vos oreilles, et peut-être plus qui sait... »

Félix parlait généralement à la radio en forçant un peu la profondeur de sa voix, la rendant plus rauque, plus sensuelle. Il ajoutait aussi parfois quelques soupirs, ou des respirations un peu plus prononcées. Ses supérieurs le lui avaient suggéré afin de rendre ses auditeurs plus accroc à sa voix et ainsi les fidéliser. Il n'oserait sans doute jamais parler ainsi en dehors de la radio, c'était pour ça qu'il utilisait un pseudo, Bbokari, pour garder l'anonymat une fois sorti des locaux. Seules quelques personnes savaient qui il était, dont Chan qui l'avait deviné rapidement.

Il enchaînait les chansons, variant les styles, parlant entre deux , racontant parfois l'histoire de la chanson qui allait suivre ou des histoires urbaines. Il lisait aussi parfois des petits bouts de livres qu'il avait aimés, lisait des messages envoyés à la radio ou parlait juste de tout et de rien, pour combler le silence,faire entendre sa voix. Ca semblait plaire aux auditeurs qui en redemandaient dans leurs messages.

Parfois il se sentait pousser des ailes, comme ce soir, et il osait d'autres choses, comme ce qu'il s'apprêtait à faire.

« Mes petits chats... J'ai une petite surprise pour vous. J'espère que vous allez aimer. » Il s'approcha alors du clavier du piano électronique à disposition à la radio et ajusta son micro. « Cette chanson s'appelle Deep End. Vous êtes les tout premiers à l'entendre, j'espère que ma voix ne sera pas trop mauvaise. »

Le blondinet respira fortement plusieurs fois, pour calmer le stress qui commençait à monter. Qu'est-ce qui lui avait pris d'oser faire ça hein ? La faveur de la nuit sans doute, l'ambiance, et il avait surtout envie de partager cette chanson qu'il avait écrite et composée lui-même et qui lui tenait vraiment à coeur. Les mains tremblante au dessus des touches du piano, il se lança de sa voix grave, la mélodie simple, épurée, le rythme lent.

« How've you been?
I guess you're fine
It's been pretty long
Since we've last seen »

Il continua le couplet suivant de sa voix toujours aussi grave, avant de changer complètement de ton, alternant les voix médium, aiguës, changeant sa façon de chanter tout au long de la chanson, mais toujours dans cette sensibilité. D'énormes frissons le parcourraient alors qu'il poussait doucement sa voix. Il termina les dernières strophes de la chanson en reprenant sa voix grave, troublée par l'émotion, finissant dans un murmure rauque.