15-17 ans

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De mes 15 ans à mes 17 ans, la vie à la maison n'a cessé de s'aggraver. Mon père continuait de me faire subir des choses insupportables, même après ma tentative de mettre fin à mes souffrances.

Chaque jour, je me retrouvais à m'occuper de mes frères et sœurs, à faire le ménage, à cuisiner, tout en supportant ses remarques et son contrôle constant. Je n'avais pas le droit de sortir, de voir des amis, ni de participer à des activités.
Mon quotidien était une boucle d'isolement et de souffrance.

À l'école, ce n'était pas mieux. Dans ma première option en cuisine, j'étais la cible de harcèlement constant.
Je me faisais bousculer dans les escaliers, des objets volaient en ma direction, on me parlait mal, on riait de moi derrière mon dos. Je ne portais pas de vêtements de marque, je n'en avais pas les moyens, et mon père refusait de m'acheter quoi que ce soit. C'était comme si tout ce que j'étais leur donnait une raison de s'acharner.

Un jour, à bout, j'ai pris mon courage à deux mains et j'ai demandé à mon père de m'acheter des vêtements.
Je lui ai expliqué que je me faisais harceler, que les moqueries et les remarques sur mon apparence étaient incessantes. Mais sa réponse m'a glacé :
"Fais la pute sur internet. Crée-toi un compte Instagram, parle à des gays, et demande-leur de l'argent."

Ces mots étaient comme un coup de poing. Et pourtant...
j'ai fini par le faire. Pas pour l'argent, mais parce qu'au fond de moi, je voulais comprendre. Est-ce que c'était normal ?
Est-ce que c'était ça, la vie qu'il voulait pour moi ?
J'étais perdu, manipulé, et je cherchais désespérément à donner un sens à tout ça.

Mais si j'avais su ce que ça allait entraîner, jamais je n'aurais pris cette décision. Très vite, sur cette application,
je suis tombé sur des personnes étranges.
Des conversations bizarres, des sous-entendus, des demandes que je ne comprenais pas encore entièrement.

Je découvrais des choses que je ne connaissais pas, des choses qui me faisaient peur et me troublaient. Et puis,
un jour, tout a basculé.

Une personne que je ne connaissais même pas m'a envoyé une vidéo. Au début, je n'ai pas compris ce que c'était.
Mais quand j'ai regardé... j'ai été choqué. Des enfants.
Des enfants qui faisaient des choses d'adultes.
C'était dégoûtant, incompréhensible, mais je n'arrivais pas à détourner le regard. Et plus je regardais, plus quelque chose d'effrayant se passait en moi : je me sentais moins seul.

Je me surprenais à penser à ce que mon père m'avait toujours répété : "Tout le monde fait ça." Ces mots, que je haïssais,
ont commencé à prendre un sens pour moi. À force de les entendre, je les avais intégrés, comme si c'était vrai.
Et au fil du temps, j'ai fini par accepter cette situation.
Par accepter ce que je savais pourtant être inacceptable.

Mais en y repensant aujourd'hui... qu'est-ce que j'ai été idiot, qu'est-ce que j'ai été faible. Ces vidéos se sont retrouvées enregistrées dans mon cloud, comme une trace indélébile de cette période sombre. Une trace que je n'ai pas su effacer,
et qui, je le sais, pourrait donner une image terrible de moi.

Pourtant, mon intention n'a jamais été mauvaise. Si seulement j'avais su. Si seulement je n'avais pas regardé.

Après cette année, j'ai décidé de changer d'option et je suis passé en puériculture, pensant que cette fois-ci serait différente. Là, j'ai rencontré cette fille, qui semblait gentille, différente des autres. Au bout d'une semaine, nous étions en couple.

Pendant un moment, j'ai cru que les choses allaient s'améliorer. Mais comme souvent, la réalité est différente. Notre relation a été marquée par des séparations, des erreurs, des blessures mutuelles. Ce qui s'est passé entre nous restera privé, mais cela a fini par nous éloigner.

Quand les autres élèves ont appris les raisons de notre rupture, ils s'en sont servis pour intensifier leur harcèlement. C'était encore pire qu'avant. Chaque jour devenait une épreuve, et je n'arrivais plus à faire face. J'ai arrêté d'aller en classe. Pendant un mois, je suis resté chez moi, enfermé dans ma chambre, incapable de trouver la force d'affronter leur cruauté. Mes absences s'accumulaient, et au final, je n'allais presque plus à l'école.

Après cette année, j'ai décidé de changer encore d'option et suis passé en informatique, pensant que cette fois-ci serait différente. Mais le harcèlement a continué. Là encore,
je me retrouvais isolé, moqué, exclu. Dans une tentative désespérée de m'intégrer, j'ai pris une décision que je n'aurais jamais imaginée. J'ai donné de l'argent à certains élèves,
de l'argent qui venait de mon père. Cet argent, je savais d'où il venait : il voulait l'utiliser pour tuer ma mère. Je savais que c'était une folie, mais je voulais tellement être accepté et aussi dépensé cette argent pour pas que ma mère se fasse tuer que je n'ai pas réfléchi aux conséquences.

Mais tout cela n'a fait qu'aggraver mon mal-être.
Plus je cherchais à fuir cette douleur, plus elle semblait m'engloutir. Entre le harcèlement à l'école, les humiliations à la maison, et ce poids constant sur mes épaules, j'étais à bout mentalement, physiquement, émotionnellement.

Et voilà pourquoi, dans un dernier geste désespéré, j'ai décidé de fuir.

Maintenant, revenons à la fugue...

Date inexpliqué au garçon jamais compris Où les histoires vivent. Découvrez maintenant