La date approche

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La cinquième année toucha à sa fin, et la date inscrite dans leurs mémoires se rapprocha, inexorable. Ni Louis ni Émilie n'étaient capables de se concentrer pleinement sur leur quotidien. Le poids de la promesse, qu'ils avaient tenu à distance pendant si longtemps, s'abattait soudain sur eux avec une intensité qu'ils n'avaient pas anticipée.

À Toulouse, Louis ressentait une pression qu'il avait du mal à expliquer. Bien sûr, sa vie professionnelle restait chargée, et sa relation avec Alyzée continuait de suivre son cours. Pourtant, il ne pouvait plus ignorer ce frisson d'impatience et de nervosité qui s'immisçait dans ses pensées.

Une semaine avant la date fatidique, alors qu'il terminait une réunion tardive au poste, Jack passa le voir.

— Mec, ça va ? demanda-t-il en s'asseyant sur le bord de son bureau. Tu sembles encore plus à l'ouest que d'habitude.

Louis secoua la tête, exaspéré.

— Je suis juste... perdu, Jack. Je ne sais pas quoi faire.

Jack, fidèle à son habitude, n'hésita pas à répondre franchement.

— Fais ce que tu as envie de faire. Arrête de réfléchir à ce que les autres pensent, ou à ce qui pourrait mal tourner.

— Mais Alyzée ? Et si tout ça n'était qu'une illusion ?

Jack le fixa, l'air sérieux pour une fois.

— Une illusion ? Peut-être. Mais ça te hante depuis cinq ans, Louis. Tu ne peux pas passer le reste de ta vie à te demander et si....

Louis savait que Jack avait raison, mais cela ne rendait pas la décision plus facile.

Ce soir-là, en rentrant chez lui, il trouva Alyzée en train de lire sur le canapé. Elle leva les yeux vers lui, souriant doucement.

— Tu as l'air pensif, Louis.

Il hésita, puis secoua la tête.

— Rien de grave. Juste le boulot.

Elle hocha la tête, sans insister. Mais ce mensonge, même anodin, le laissa avec un goût amer.

À Bordeaux, Émilie vivait un tourbillon d'émotions similaires. La date du pacte approchait, et elle se demandait si Louis se souvenait encore de leur promesse. Elle n'avait aucune nouvelle de lui depuis des années. Peut-être avait-il oublié, ou décidé de ne pas honorer cet engagement qu'ils avaient pris à la légère.

Pourtant, une partie d'elle espérait qu'il viendrait.

Une semaine avant le jour convenu, Camille insista pour passer la voir.

— Alors ? Tu sais ce que tu vas faire ? demanda-t-elle en entrant dans l'appartement d'Émilie.

Émilie haussa les épaules, visiblement nerveuse.

— Je ne sais même pas s'il se souvient de cette date, Cam. Peut-être que je suis la seule à m'en faire.

Camille roula des yeux.

— Bien sûr qu'il s'en souvient. Les mecs n'oublient jamais ce genre de choses, surtout pas si ça les a marqués.

— Et s'il ne vient pas ?

— Alors tu sauras. Mais tu dois essayer, Émilie. C'est une chance unique.

Cette conversation résonna en elle pendant des jours. Elle hésitait entre l'envie de foncer et la peur de l'échec. Finalement, elle décida qu'elle irait, quoi qu'il arrive.

La veille de la date, Louis prit une décision. Il devait aller à Bordeaux. Peu importe les conséquences, il ne pouvait pas ignorer cette promesse. Il ne le fit pas sans appréhension. Il prit congé pour deux jours et prépara son sac, prétextant une formation auprès d'Alyzée.

— Tu es sûr que tout va bien ? demanda-t-elle, l'air légèrement inquiet.

Louis hocha la tête, souriant pour la rassurer.

— Tout va bien.

Pendant ce temps, Émilie se prépara également. Elle choisit une robe sobre mais élégante, se demandant pourquoi elle accordait autant d'importance à ce détail. La soirée qu'ils avaient partagée cinq ans plus tôt lui semblait à la fois si lointaine et si proche.

Le jour arriva, et Bordeaux brillait sous un soleil de fin d'été. Louis arriva en ville en début d'après-midi, nerveux mais résolu. Il marcha un moment dans les rues qu'il n'avait pas visitées depuis des années, se demandant s'il reconnaîtrait Émilie, si le temps avait changé ce qu'il ressentait pour elle.

De son côté, Émilie quitta son cabinet plus tôt que prévu, incapable de se concentrer sur ses consultations. Elle se rendit au lieu de leur rendez-vous, un petit café qu'ils avaient choisi dans leur pacte.

Elle arriva en premier, s'installant à une table près de la fenêtre. Son cœur battait la chamade alors qu'elle scrutait la rue, guettant une silhouette familière.

Quand Louis apparut enfin, elle sentit un frisson lui parcourir l'échine. Il semblait différent, plus mature, plus sûr de lui. Pourtant, son sourire était le même.

Il entra dans le café, et leurs regards se croisèrent.

— Salut, murmura-t-il en s'asseyant en face d'elle.

— Salut, répondit-elle, incapable de cacher son sourire.

Le temps sembla suspendu alors qu'ils se redécouvraient. Leurs vies, si différentes, semblaient soudain s'être arrêtées pour ce moment unique.

— Alors, on a tenu cinq ans, dit Louis avec un petit rire nerveux.

Émilie hocha la tête.

— On a tenu.

Mais ce qui allait suivre était encore incertain, comme un livre dont les pages n'avaient pas encore été écrites.

Le pacte Où les histoires vivent. Découvrez maintenant