Pulling a Bradbury

Floraline et le raton laveur

Son fidèle raton laveur à ses côtés, Floraline dévalait gaiement la colline. Son coeur faisait une danse toute douce dans sa poitrine. Elle respirait à plein poumons l'air parfumé. Les senteurs de lavandes et de fleurs des champs se battaient presque pour arriver les premières dans ses narines.

Avant de partir à son rendez-vous d'amour Floraline s'était inspectée dans la glace. Elle avait fait des grimaces à son reflet dans le miroir qui les lui avait bien rendues. Dans sa tête c'était une salade folle de pensées : « il va m'embrasser en premier », « je n'oserai jamais lui dire à quel point je l'aime » et « c'est impossible d'être plus beau que lui ».

Enfin arrivée en bas de la colline, Floraline apercevait la clairière où il lui avait donné rendez-vous. Elle ne voyait pas encore le banc où il était déjà sûrement en train de l'att

Madame, monsieur, excuse moi s'il te plait. Je me suis permis de pirater le wifi de l'internet de monsieur Van Humbeeck. Je vais écrire autre chose à la place de son texte. Je m'appelle Aldo. J'habite au-dessus de monsieur Van Humbeeck. J'ai des ennuis. Je te raconte mes ennuis.

Je suis le mac de Claudia. Elle fait pas le trottoir, elle fait l'escort. On a un site web. Le client appelle. Claudia le rejoint. Elle revient avec l'argent et c'est bien.

Claudia a été chez le gynécologiste. Il a dit que Claudia ne peut plus travailler pendant au moins deux mois. Du coup on ne gagne plus d'argent. Du coup j'ai repris mon ancien métier. Je travaille pour Ga Er Exhorta. Si tu n'as jamais entendu son nom c'est normal. Avec Ga Er Exhorta c'est simple : tu lui rapportes de l'argent : il t'aime. Tu lui rapportes beaucoup d'argent : il t'aime beaucoup. Tu lui coutes de l'argent : tu n'as plus très longtemps à vivre.

Je te jure sur ma tête que je n'ai jamais tué personne. J'ai déjà vu Ga Er Exhorta claquer des doigts. Quand il claque des doigts Moulouss s'empare du gars et l'emmène à la cave. On ne revient jamais vivant de la cave de Ga Er Exhorta.

Si Claudia ne travaille pas je n'ai pas de rentrées d'argent. Si je n'ai pas de rentrées d'argent, je ne peux pas verser ma cotisation à Ga Er Exhorta. Je dois verser ma cotisation sinon je vais avoir des ennuis. C'est comme ça que j'ai eu les ennuis.

Ga Er Elhorta m'a dit que je pourrais payer ma cotisation en allant voler dans une maison. Il m'a donné le nom de la personne que je devais voler. Je l'ai demandé à Google. Google m'a dit que c'était une grande perche qui change souvent de couleur de cheveux et de temps en temps de parti politique. Elle était bleue et maintenant elle est rouge.

J'ai été repéré sa maison plusieurs fois. Une fois un matin, une fois une après-midi et deux fois le soir. J'ai décidé d'y aller le soir parce que c'est un quartier à barbecue. A partir de 22 heures les voisins seront trop bourrés pour remarquer.

J'étais tranquillement en train de chercher des choses de valeur quand j'ai entendu du bruit. C'était ma victime. Elle faisait des aller-retours devant la porte en parlant dans son téléphone. Elle portait le téléphone devant elle comme un miroir pour regarder la lune. La voix d'un homme sortait du téléphone. J'entendais tout ce qu'ils disaient. Elle appelait l'homme mon chéri et elle lui disait vous. A un moment elle a dit « j'ai un deuxième appel ». J'ai entendu la voix d'un autre homme. Elle l'a aussi appelé « mon chéri ». Elle l'a tutoyé. Elle lui a dit qu'elle était chez elle et qu'il pouvait passer. Elle a repris la conversation avec celui qu'elle vouvoyait. Elle lui a dit « je suis impatiente de sentir votre corps sur le mien. Ce soir c'est pas possible : j'ai mes petits ennuis mensuels. » Le type a dit qu'il l'aimait et lui a demandé sa fleur préférée. Il lui a dit qu'elle aurait une surprise le lendemain.

La femme est rentrée. Je me suis caché derrière le canapé. Son smartphone a encore sonné. J'ai entendu la voix d'un troisième homme. C'est là que les ennuis ont vraiment commencés. J'ai reconnu la voix de l'homme. Je ne regarde pas souvent les actualités mais c'est une voix très connue. Je ne veux pas d'ennuis pour toi, Monsieur, Madame. Je peux juste te dire que c'est un homme politique connu de toute la Belgique. Pas un homme du parti de la femme de la maison. Elle lui a dit « mon amour, mon chéri » et elle lui a donné rendez-vous pour le lendemain.

Le politique a deux fois mon âge environ. J'ai trente-cinq ans dans douze jours. Elle lui parlait comme à un bébé. Il lui répondait comme un bébé avec des petits mots.

Je n'aime pas dire du mal des gens que je cambriole. Je dois aussi dire la vérité. Derrière le canapé c'était plein de poussière. Je suis allergique à la poussière. J'ai éternué. Elle a raccroché et m'a dit de sortir. Elle avait un balai en main et elle était prête à me frapper avec.

J'étais devant elle, habillé en noir. J'avais une lampe de poche dans une main et un sac de sport noir dans l'autre.

- Ne bougez pas. J'appelle la police.

- Tu appelles la police, je dis à tout le monde que tu as trois chéris dont un politique.

- Vous avez entendu ?

- J'ai entendu.

Elle a levé le baiai. J'ai cru qu'elle allait me frapper. J'ai crié « Gal Er Exhorta sait que je suis ici ! »

- Qui ?

- Gal Er Elhorta, madame.

- Ah oui, je connais.

Là je me suis dit que c'était la plus grande menteuse depuis la naissance de l'univers. Si tu n'es pas albanais de Bruxelles, si tu n'as pas grandi dans le même village que lui, personne en Belgique ne connait Ga Er Exhorta. Il entre et sort de Belgique comme il veut. La police sait qu'il existe mais elle ne connait pas son nom.

- Je le connais d'ailleurs il me doit un service.

Ga Er Exhorta il ne doit rien à personne. Il ne doit rien au fisc. Il ne doit rien à sa banque. Il ne doit rien à son boulanger. C'est là que j'ai su qu'elle avait un rat dans le grenier la dame.

- Tu me rapportes le dossier qu'il a sur moi et j'oublie que tu es venu ici. Vide ton sac.

J'ai ouvert le sac. Le sac était presque vide. Il n'y avait que deux vieilles chaussettes de sport sales qui sont tombées sur le carrelage. Ca a commencé à sentir mes pieds dans son salon.

Elle s'est approché de moi et m'a embrassé sur la bouche comme je défend à Claudia de le faire avec les clients. J'ai commencé à avoir les jambes en caoutchouc. J'ai pensé très fort aux photos de Claudia sur le site.

- Tu me rapportes le dossier qu'il a sur moi. Je le veux ici dans les 24 heures. Il est 22h18. Je le veux avant 22h17 demain. Sinon je fais de toi ma chose. Je fais de toi un de mes prétendants. Tu feras des kilomètres de nuit, dans le noir, à pied pour gratter à ma porte et je jouirai de ne pas t'ouvrir. Tu quitteras ta femme pour moi. Tu te ruineras pour moi. Rapporte-moi ce dossier.

Tar Er Exhorta il n'a pas de dossiers sur personne. Il a une mémoire. Tu lui dis un nom : il ferme les yeux. Il rouvre les yeux il te sort le numéro de la maison, la rue, combien la personne lui doit au centime d'euro près. Gal Er Exhorta est trop malin pour laisser des papiers.

Je suis rentré chez moi et j'ai fait le mort. Si je vais chez Gal Er Exhorta sans les bijoux de la folle, il me tue. Si je n'apporte pas un dossier qui n'existe pas à la femme, elle me dénonce à la police.

C'est pour ça que je me suis connecté sur l'Internet de monsieur Van Humbeeck et que je t'écris, Monsieur ou Madame. Si tu peux passer nous prendre discrètement Claudia et moi, je te laisse tout ce qu'il y a dans mon appartement. Tous les meubles, la télé, tout. Je demande juste que tu nous conduises à Anvers. Je connais un gars qui me doit un service. Il peut me trouver deux places sur un cargo. Merci d'avance.

Main dans la main, Floraline et Sébastien regardaient vers un avenir radieux. Dans leurs têtes, les anges de l'amour jouaient doucement de la harpe.

- Je partirais avec toi n'importe où dans la minute, Sébastien.

- Viens dans mes bras, tu y trouveras le monde, Floraline.

Ils s'embrassèrent longuement en caressant le raton laveur qui les avait réuni pour toujours.