Le jardin est envahi par une horde d'invités, et je m'aperçois rapidement que je ne connais pas la moitié d'entre eux.Sous les tentes de réception se pressent des quinquagénaires élégamment vêtus, qui discutent de politique et d'économie endégustant des canapés au saumon. Près de la fontaine, des enfants jouent bruyamment et imitent en riant les carpes qui évoluentdans l'eau fraîche. Et dire qu'il ne s'agit que des fiançailles ! Je vais être obligée de réfréner les ardeurs de cette chèreElizabeth Bieber, sans quoi mon mariage ressemblera à celui de la reine d'Angleterre.
— Des fiançailles ? Est-ce que ça n'est pas un peu démodé ? avait demandé ma mère lorsque je lui avais annoncél'événement.
Si, ça l'était certainement, mais les Bieber y tenaient. Elizabeth, surtout. Afin de que nos relations restent à peu prèscordiales, j'avais cédé – ce qui avait évidemment soulagé Oliver, ce dernier redoutant un crêpage de chignon en règle en casde refus de ma part.
Attrapant une coupe de champagne, je rejoins Sally qui fume une cigarette sur la véranda. Notre amitié est demeuréeintacte malgré le passage des années.
— Ton cher et tendre n'est pas avec toi ? demande-t-elle tout en me tendant une cigarette que j'accepte volontiers. Engénéral je ne fume pas, mais la nicotine est parfois un précieux soutien pour les nerfs.
— La dernière fois que je l'ai vu, il était en grande discussion avec sa mère. J'ai donc préféré les laisser.
— Tu m'étonnes ! s'écrie Sally en grimaçant. Je lui ai parlé à peine cinq minutes, en arrivant, et je n'ai aucune envie derecommencer. Elle m'a d'abord regardée comme si j'étais un tas de fumier, puis a failli me sauter dans les bras quand elle acompris que j'étais l'héritière Forster. Tant de sincérité, c'est bouleversant...
Sally vient elle aussi d'une famille fortunée, mais ses parents sont très différents des Bieber. Ce sont des gens simples,agréables, qui se fichent bien de connaître les revenus annuels de leurs amis ou la marque de leur voiture.Le champagne aidant, je me détends peu à peu. L'arrivée de ma mère y est aussi pour quelque chose. Heureuse de la voir,je la serre dans mes bras. Son parfum aux notes fleuries me rappelle les petites joies quotidiennes de mon enfance, lorsqu'ellerentrait du travail et que je courais vers elle pour obtenir un baiser. Desserrant mon étreinte, je fais quelques pas en arrière pour la regarder. Vêtue d'une jolie robe d'été jaune pâle et juchée sur des escarpins noirs, elle est particulièrement en beauté.Ses cheveux bouclés, d'une superbe teinte brun sombre, cascadent librement sur ses épaules. Elle parait moins que sescinquante ans et, en ce jour particulier, son sourire ravi est presque celui d'une jeune fille.
— Tu es superbe, ma puce.
— Toi aussi !
— C'est vrai, approuve Sally. Vous êtes resplendissante, Mme Hopkins. Ça tombe bien, cette réception regorge de beauxpartis.
Ma mère éclate de rire et secoue la tête.
— Oh non, je n'ai plus l'énergie nécessaire pour séduire un homme ! Mais c'est gentil d'y penser, Sally.
Un pincement de regret me serre le cœur. Je sais bien que ma mère n'a aucune envie de se remettre en couple, et je ledéplore. Elle adorait mon père et, bien qu'il soit mort depuis longtemps, elle ne se sent toujours pas prête à refaire sa vie.J'aimerais pourtant la voir heureuse auprès d'un homme bien, un homme qui prendrait soin d'elle et lui permettrait de débuterune nouvelle vie.

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Bad Guy
RomanceCassidy Hopkins, vingt-trois ans, est une jeune femme heureuse : elle exerce un métier qui la passionne et s’apprête à épouser le beau Oliver Bieber, son petit ami depuis le lycée. Mais le frère d’Oliver, Justin Bieber, pourrait bien compromettre ce...