J'entend le souffle irrégulier d'une survivante. Elle a mal, un bout de métal est enfoncé dans son ventre. Je sais qu'elle ne tiendra pas longtemps sans secours. Keï donne une bouteille d'eau à une petite fille. Ma vision se brouille un instant, je me mords la lèvre. J'ai des séquelles graves. Combien de temps vais-je vivre moi aussi ? Reprenant lentement mon souffle, je m'adosse contre le mur et regarde notre pauvre groupe. Je ferme les yeux, épuisé.
" Vous aviez le choix non ?"
"Nous avions cru en vos paroles ! Vous nous avez berné ! "
" Sauveur ? Mon cul ! Tu n'es qu'un assassin"
Ah... ces images me font mal au crâne. J'essai de les oublier et cela depuis plus d'un an mais à chaque fois, c'est peine perdue. J'ai 23 ans, ma vie, mon nom, tout n'est qu'un mensonge et aujourd'hui, nous devons choisir quel chemin prendre. J'ignore si ce qu'ils nous arrivent est le destin ou le karma mais ça n'a pas vraiment d'importance. Le résultat sera probablement le même.
" Hé, Eldebban ! Elle est en train de mourir !
- J'arrive "
C'est vraiment fatiguant, j'ai envie de me coucher et de dormir pour l'éternité... Or, ce n'est pas raisonnable, j'ai peut être une chance de me racheter, alors autant en profiter. Les prochaines minutes sont cruciales pour l'Américaine entre mes mains. Elle s'appelle Joy Davis et a peu de chances. Keï s'accroupit à mes côtés et suit mes ordres à la perfection.
Dix minutes plus tard, sous le regard de trente vies, Joy nous quitte. Un filet de sang s'écoule de sa blessure. Sa peau est blanche, ses yeux vides. Elle est morte.
Je pousse un profond soupire de dégoût et passe ma main sur mon crâne. Mes poings se serrent et je tape le sol, une terrible rage m'entoure avant que John attrape le corps de la décéder et disparaissent dans le train avec. Si je m'écoute, je l'étrangle mais il n'y est pour rien, rien de tout ceci n'est sa faute, et pour nous préserver de l'odeur des morts, il l'amène loin de nous. Loin de moi. Et alors, pour la unièmement fois, je vois. Joy est assise à côté de moi, mais personne ne la voit, personne d'autre que moi. Son sourire me gèle sur place. Elle pose sa main sur ma joue, froide peau, translucide... Je comprend son message : Ne soyez pas triste pour moi, je suis bien là où je vais. Oui, mais vous ne méritez pas ça ! Elle dépose un baiser sur mon front et par vers le fond du train, là où il fait sombre, là où les pierres sont tombées. Cette douce forme spectrale disparaît dans l'ombre. Ses souvenirs pénètrent mon âme, et je pleure en silence. Je sens des yeux braquaient sur moi.
" Ressaisissez vous s'il vous plait. Murmure Keï. Une fillette hurle et un homme a perdu sa jambe.
- ...Oui, je sais. J'entend, je vois, je ressens tout ça.
Je me tourne vers Virgil qui tenait entre ses bras sa petite amie.
- J'ai besoin de serviettes et de tissus propres, de désinfectants et d'un truc tranchant ainsi que d'un stylo et de papier."
Pendant que les ordres sont effectués par Virgil et Duna sa femme, Keï me tend un stylo et un carnet.
" Je sais ce que vous voulez faire. Mais ça ne servira à rien...
- Si, ça allégera ma conscience. Nous ne serrons pas nombreux à survivre. Joy n'était que la première et cet homme ne sera pas le dernier. Expliqué-je à la jeune fille.
- Pourquoi vous battez vous ainsi avec les mémoires de ses gens ?
- Qui se souviendra d'eux à leur mort ? Personnes. C'est comme ça que marche notre société et je pense que tu le sais aussi bien que moi. L'Oublie est la meilleure forme de protection."
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Souviens-toi que tu vas mourir
Short StoryC'est une sombre histoire, Parce qu'elle commence par la joie, le bonheur et qu'elle termine dans la tristesse, et la douleur. Cent personnes, un train. La fin de l'histoire commence à 14h14, le train numéro 1756 traverse les montagnes et s'e...