Les Chiffrés sont, dans notre société, des êtres humains. Mais en toute honnêteté, ils ne le sont qu'à moitié. Je ne le suis qu'à moitié. Qui sommes nous ? Que faisons-nous ? Nous sommes des criminels. Nous avons commis une erreur, parfois si petite, que s'en est ridicule. On nous a enfermé, tatoué et pucé. Maintenant, nous sommes enchaînés à nos villes, à nos misérables vies.
Le train 1756, il n'y a eu que lui pour nous libérer, nous sauver de cet enfer. Et aujourd'hui, nous entamons notre dernier voyage, Nous les Transgresseurs de règles.
J'ignore si avec Duna, nous sommes les seuls chiffrés. Cela fait longtemps que je n'ai pas rencontré quelqu'un comme moi. J'ai peut être réagi trop négativement à la vue de son numéro XIX, c'est même certain. Tout le monde est tendu, désemparé et blessé. La seule différence est peut être que je suis le seul qui n'est pas soigné. J'ai d'ailleurs mal, aussi physiquement que mentalement. Et la mort d'Izzy et de groupe de John ne m'a absolument pas aidé à me sentir mieux.
" Anko..."
Je viens de fermer les yeux. Après avoir tout tenté pour réanimer Izzy, nous sommes partis avec Virgil, Kalvin, Duna et Keï retrouver les autres. Arrivés au bout du tunnel, j'ai senti la main de Keï se crisper sur mon poignet. C'était un contact rassurant. Cette punk était rassurante au plus au point ! Devant nous, six corps dont la tête avait disparu. John était adossé à un siège défoncé et se tenait le bras, ou du moins, ce qu'il en restait. Ses yeux étaient injectés de sang. Virgil l'éclaira à l'aide d'une lampe mais le faisceau lumineux tremblé, confirmant ma pensée: ils étaient tous traumatisés par la vision d'horreur sous leurs yeux. J'ai passé tellement de temps à soigner. John.
Et maintenant, je ferme enfin les yeux. Je suis avec le reste des vivants et je peux m'apaiser un peu, le temps que les secours arrivent. Qu'est ce que j'aurai aimé dire ça. Le penser ne serais-ce qu'une seconde.
"Anko...."
La voix de Keï hante même mon léger sommeil. Ne peut-elle pas me laisser dormir quelques secondes ? Me laisser oublier tout ça...
" Anko Eldebban, réveillez-vous..! "
je me sens secoué. Mais putain de bordel de merde ! J'ouvre les yeux difficilement et me redresse en grimaçant. Le sol n'est pas confortable du tout... Mon regard se tourne vers Keï. Elle tremble, ses écouteurs sont près de son coussin de fortune. Ses yeux luisent sous la lumière des lampes et des flammes en queue de train, à quelques centaines de mètres. Les larmes semblent prêtes à tomber à tout moment. je suis pris au dépourvu et tout mépris quitte mon visage. Ses mains remontent jusqu'à ses bras, ses longs cheveux auburn abandonnent les épingles qui tombent au sol dans un léger cliquetis et entourent son visage de poupée. De gamine. Elle pleure dans un silence terrifiant. Ses yeux fixent le sol, ses tremblements redoublent d'intensités. Je ne peux pas la regarder dans cet état de panique. J'ignore ce qui lui arrive. Habituellement, je juge les personnes qui m'entourent sur les habitudes, leurs gestes, les accessoires et leur corps. Mais cette jeune femme est une tornade, un tsunami près à rasé des montagnes.
Prête à sombrer dans des abysses trop noires pour moi, je tente un regard sur le côté, cherchant une quelconque aide, même passagère. Mais personne ne semble vouloir me venir en aide, car tout le monde dort. J'ai compris le message, en plus d'être médecin, je dois aussi servir de psychologue. Ou de grand-frère en l'occurrence.
Laissant ma fierté de côté et mon éternel froideur à la Anko, je prends Keï dans mes bras et l'attire contre moi. C'est une proximité dont je ne suis pas habitué. La plus grande que j'ai pu connaître n'été pas éveillé, mais sur une table d'opération et je lui triturais les organes...
Je ne peux pas dire que je m'attendais à ce qu'elle se blottisse contre moi, mais d'une certaine manière, cela m'a surtout rassuré. Et je l'ai laissé faire. Lentement, j'ai caressé le haut de son crâne et j'ai utilisé mes bras d'Alchimiste comme bouclier contre ses démons.
" Qu'y a t-il Keï ? Demandé-je doucement.
- Je les vois... Murmura t-elle. Avant, même si je devinais leur présence, je ne voyais pas les morts. Mais depuis cet accident c'est différent.
- Tout à l'heure, tu as fait une allusion à la gauche et à la droite. Tu as bien du déjà en voir non ?
- Je ne les voyais pas vraiment, c'était l'instinct. Comment faites-vous ?
Je reste silencieux. je suis médecin. Médecin d'une époque de guerre et de cadavres. Même si j'avais la réponse, je n'ai rien dit, seulement haussé les épaules. Maintenant que Keï fait allusion à ces étranges apparitions, je la comprend un peu mieux. Elle a du se réveiller, et voir les neufs morts précédents la fixer, comme des vivants. Comme je les vois maintenant. Lizzy s'avance et me sourit. C'est rare, une âme qui sourit. Puis s'en va, vers la droite avec tous les autres.
" Keï, qu'est ce que les Chants Interdits pour toi ? Ou Hydille ? Les chiffrés ? L'Oubli ?
La jeune fille se redresse légèrement et me fixe avec une telle intensité que je me serrai perdu dans leurs noirceurs corrompus. Elle réfléchit. Soudain, elle pousse un profond soupire, ayant repris pied face à sa crise.
- Les fondements de notre société."
Bienvenue en 2116.
18 Survivants 13 Morts
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Souviens-toi que tu vas mourir
PovídkyC'est une sombre histoire, Parce qu'elle commence par la joie, le bonheur et qu'elle termine dans la tristesse, et la douleur. Cent personnes, un train. La fin de l'histoire commence à 14h14, le train numéro 1756 traverse les montagnes et s'e...