6. Celle qui se faisait déjà remarquer

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Terrifiée. Belle était terrifiée. Figée devant les portes de son nouveau lycée, elle tenait fermement son sac surchargé contre son ventre pour contrer l'angoisse qui le tenaillait. Et, alors même qu'elle s'apprêtait à trouver le courage d'entrer, deux jeunes filles lui firent une queue de poisson, l'arrêtant net dans son élan. La plus grande des deux balança ses longs cheveux noirs dans son dos, dégageant un parfum qui devait certainement être hors de prix. Tout comme le reste de ce qu'elle possédait apparement. Les deux amies rirent aux éclats alors que Belle baissait doucement les yeux sur sa propre tenue. Pour cette rentrée, elle avait décidé de faire un effort : une jupe et des bottines à talons. Comme elle était ridicule !

La gardienne de l'entrée de l'école apparue alors dans son champ de vision et lui enjoignit d'entrer. Avec un regard circulaire, l'adolescente constata qu'elle était la dernière  à l'extérieur. Elle se pressa donc d'entrer.

_ Attendez ! Cria une voix masculine.

Tandis que les portes se refermaient, trois garçons déboulèrent en trombe dans le hall. Tous avaient les yeux rouges. La jeune fille ne pouvait qu'incomber cet état à une substance illégale. Ses nouveaux camarades s'annonçaient comme étant de véritables modèles de vertus ! Cela n'avait rien de vraiment différent de l'ancien environnement dans lequel Belle avait évolué jusqu'alors.

Au centre du groupe se trouvait un jeune homme plus grand que ses amis, aux cheveux blonds et aux yeux bleus, avec un visage si parfait qu'il ne devait pas manquer d'en jouer. Son style de mauvais garçon semblait lui coller à la peau. En apercevant Belle, il esquissa un sourire enjôleur.

_ Tiens tiens, murmura-t-il en avançant d'un pas, une nouvelle. Je sens qu'on va bien s'amuser cette année !

Avec un signe pour ses sbires, il gravit les marches avant de filer jusqu'a la cour intérieure sans un mot de plus, laissant ainsi une Belle pantoise, presque éberluée. L'adolescente secoua négativement la tête, reprit un semblant de contenance et courut à leur suite pour ne pas être en retard.

Victoria de Marret était postée sur une estrade au milieu de la cour, surplombant une foule de tout nouveaux lycéens qui formaient une marée bleu et blanche. Les filles portaient des jupes plissées ou des pantalons serrés avec des chemises immaculées quand les garçons arboraient des vestes brodées d'un écusson de l'institut. Perdue parmi les spectateurs, Belle se faufila discrètement pour ne pas se faire remarquer.

Dans la foule, son regard croisa les prunelles vert émeraude de l'adolescente qu'elle avait vu lors de sa première rencontre avec la directrice. Celle qui était sortie, débraillée et décoiffée, de la salle de classe avec le professeur. Nul doute sur la nature de leur échange. Aujourd'hui, elle arborait l'uniforme convenable pour école de cette renommée, mais avec une jupe plus courte que les autres et un chemisier un peu plus déboutonné. Encore une délurée.

Belle l'ignora et écouta attentivement le discours de Victoria. Elle souhaitait la bienvenue à ses élèves quand la jeune fille sentit une petite main tapoter son épaule.
Elle fit volte face pour tomber nez à nez avec l'adolescente aux cheveux noirs.

_ Je m'appelle Esmeralda, chuchota-t-elle avec un large sourire. Je crois que nous nous sommes déjà vues avant la rentrée, non ?

Belle resta coite, resserrant sa besace sur son épaule. Suite au regard insistant de son interlocutrice, elle hocha doucement la tête.

_ Et tu t'appelles ? Demanda l'élève de Molière avec un sourire qui dévoilait une rangée de dents blanches.

_ Belle. Belle Desjardins.

Esmeralda hocha la tête avant de tourner les talons et disparaître dans la foule.

Une fois les classes attribuée, les professeurs principaux accueillirent les élèves dans leurs salles de cours. Belle s'engagea dans les escaliers, accrochée à ses livres comme à une bouée de sauvetage. Elle ne connaissait personne et, hormis Esmeralda, aucun élève n'avait daigné lui accorder de l'attention. En montant les marches, un obstacle vint buter contre son épaules. Ses affaires se répandirent sur le sol au moment même où un concert de moquerie explosait.

La jeune fille fit volte face en replaçant ses lunettes rondes sur son nez. Son regard se posa alors sur le sourire machiavélique du garçon blond qu'elle avait vu débouler un peu plus tôt.

_ Alors Marie, lança-t-il en jetant un coup d'œil amusé à ses amis qui le suivait comme son ombre, on regarde pas où on va ?

L'adolescente rassembla ses cahiers éparpillés avant de se redresser. Tous les regards étaient braqués dans sa direction. Elle qui détestait être le centre de l'attention venait d'être servie.

_ Je m'appelle Belle, rétorqua-t-elle d'une voix timide.

_ Pour moi tu ressemble plutôt à une Marie... Une Vierge Marie.

Le groupe d'adolescents explosa de rire. Belle sentit le rouge lui monter aux joues. Comme elle s'apprêtait à répondre, une fille apparu dans son champs de vision : les cheveux aussi noirs que sa peau était blanche, elle se planta devant son bourreau. Ses lèvres d'un rouge sang se pincèrent en une moue contrariée. Belle crut qu'elle allait lui venir en aide, mais elle se contenta de lui servir un regard dédaigneux avant de se tourner vers le fauteur de trouble.

_ Adam, tu m'as littéralement raccroché au nez tout a l'heure. J'attends tes excuses.

_ Tu peux attendre longtemps Blanche. Arrête de faire ta tête de mule et viens.

Il enroula un bras musclé autour de ses épaules, déposa un baiser appuyé sur les lèvres et continua sa route en tournant la tête par-dessus son épaule pour se gausser 1 nouveau de sa victime.

_ Un coup de main mademoiselle ? Demanda une voix masculine dans son dos.

Belle observa le professeur qu'elle avait croisé en compagnie d'Esmeralda lui tendre ses livres. Sur la pile, la jeune fille remarqua la présence de Notre Dame de Paris. L'ouvrage qu'il lui avait pris lors de leur première rencontre. Dans ses prunelles bleues, l'adolescente capta un sous entendu : il lui demandait de ne pas révéler son secret.

_ Merci, répondit-elle en récupérant ses affaires.

L'homme hocha la tête puis ouvrit la porte qui donnait sur leur salle de classe.

_ Je suis ravi d'avoir une étudiante qui apprécie autant la littérature. Je suis certain que nous ferons du bon travail ensemble.

Les Princesses pas si charmantes...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant