Chapitre 7

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Ils traînèrent les corps des Lycans à l'intérieur du bois. Une autre équipe de Runners, expliqua Mason, viendrait s'occuper de leurs dépouilles. A l'aide d'une chaîne solide et du moteur puissant du 4x4, ils dégagèrent les arbres abattus sur la chaussée. Puis ils chargèrent le Lycan évanoui sur le siège arrière, à côté de Jeremy. Torrance prit place à l'avant, près de Mason, qui avait remplacé Jeremy au volant. Il ne leur fallut pas longtemps pour arriver à Bloodrunner Alley, où vivaient les Runners. Mason avait décrit l'endroit à Torrance. C'était une clairière isolée, légèrement en pente, où se trouvaient les habitations individuelles des Runners qui vivaient hors de la meute Silvercrest. On comptait dix chalets, mais tous n'étaient pas habités. Et, même si les Runners étaient obligés de redescendre jusqu'à la civilisation pour se procurer les produits nécessaires qu'ils refusaient d'acheter à la meute, ils possédaient tout le confort moderne : électricité, eau chaude, et même une connexion internet à haut débit, comme à Shadow Peak, la ville des Silvercrest, bâtie plus haut sur la montagne.

Pour un observateur non averti, Shadow Peak ressemblait à n'importe quel village de montagne. Les habitants gardaient jalousement leur secret, et peu de visiteurs s'aventuraient jusque-là. Néanmoins, des éclaireurs étaient chargés de prévenir les villageois au cas où des humains débarqueraient à l'improviste.

Comme Shadow Peak, l'Alley était bâtie sur des terres qui appartenaient aux plus anciennes familles de la meute depuis des générations, et auxquelles l'on n'accédait qu'en empruntant des chemins privés. Quand ils quittaient la montagne, Lycans et Bloodrunners se fondaient imperceptiblement dans la société humaine ; ils avaient un permis de conduire, comme tout le monde, et un numéro de Sécurité sociale. Leur profil génétique lui-même ne permettait pas de les repérer. Rien, dans leur ADN, ne pouvait alerter le monde médical quant à l'existence de leur espèce. Le seul danger venait des loups rebelles, qui, afin de satisfaire leurs instincts les plus vils, outrepassaient les lois destinées à protéger tous les Lycans.

Torrance espérait avoir une vue d'ensemble de l'Alley en y arrivant, mais le soleil était couché depuis longtemps, et elle ne distingua que les silhouettes des chalets de bois.

Ils se garèrent devant le premier bâtiment. Pendant que Mason transportait l'adolescent évanoui au niveau inférieur, Torrance entra dans une grande pièce qu'elle prit le temps d'examiner soigneusement.

L'intérieur de la maison s'accordait parfaitement à l'homme qui l'habitait. C'était à la fois rustique, très beau et très masculin. Deux canapés en cuir brun étaient disposés devant une cheminée en pierre ; des tapis tissés à la main, dans des tons rouge foncé et gris pâle, réchauffaient un parquet de bois si sombre qu'il paraissait presque noir. Des éclairages indirects jetaient une lumière chaude et dorée qui invitait à la rêverie devant un grand feu ronflant. Un léger parfum de cèdre et de cire flottait dans l'air et se mêlait aux senteurs terreuses de la forêt qui les entourait.

L'ensemble était à la fois fonctionnel et plein de goût... et il témoignait d'une situation financière confortable.

La chasse aux rebelles était apparemment plus lucrative que Torrance ne l'aurait cru. La jeune femme grimaça intérieurement. Non seulement Mason Dillinger avait un corps de rêve, mais, en plus, il était riche. Voilà qui creusait une faille d'autant plus grande entre eux. Essayer de le garder lui semblait à présent mission impossible ; autant décrocher la lune ou cueillir une étoile filante. Il était de ces êtres qui restent toujours inaccessibles.

- C'est magnifique, murmura-t-elle en entendant les hommes arriver.

Leurs chaussures résonnaient contre le plancher de bois ciré. Du bout des doigts, Torrance caressa le cuir doux et souple du canapé à côté d'elle.

L'empreinte du loup | RéécritureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant