NIGHTMARE-Harry

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Ça fait depuis une semaine que nous sommes au Canada et une semaine que j'ai posé mon ultimatum.
Depuis aucune réponse, aucun geste ou regard de sa part, comme si la vie avait repris son cours. Louis évite de me regarder, de me toucher et passe tout son temps avec sa copine. J'ai bien deviné son choix et mon cœur en périt chaque jours.

Mais toutes ces poussières, sont bien plus surmontables que l'avalanche de cette terrible nuit.


Ma mère se tient devant moi, elle pleure. De grosses larmes dégringolent de ses joues. Elle me regarde, ravagée. Ses cheveux bruns encadrent son visage triste et son sourire me manque. Je ne l'ai pas revu depuis trop longtemps.
J'ai envie de la prendre dans mes bras mais je n'arrive pas à me lever. Un fauteuil m'emprisonne. C'est le fauteuil de ma maison d'enfance. Son bois me retient. Les sanglots de ma mère sont plus violents, elle ne les contrôle pas. Je veux la prendre dans mes bras pour la consoler. Je fais tous les efforts du monde pour me lever mais je n'arrive toujours pas à me libérer de ce putain de fauteuil.

J'entends des ambulances, des sirènes de pompiers passer sans cesse derrière la fenêtre, dans la rue. Je vois des ombres en mouvement, il y a de l'agitation. Mon instinct me procure l'impression qu'il s'est passé quelque chose de grave.
J'essaye de regarder à travers le rideau mais une pression se pose sur mon bras. Des doigts fins et froids pressent doucement ma peau, je me retourne. Ma mère est assis devant moi. Elle prend mes mains dans les siennes. Son visage paraît plus apaisé, ses pleurs se sont calmés. Elle me presse un peu plus fort la main et commence à me parler de sa voix de maman rassurante, réconfortante:

-Trésor, écoute-moi s'il te plait.

Je me concentre sur sa voix apaisante. Sa douceur me fait ressentir un sentiment de sécurité.

-Il s'est passé quelque chose de terrible.

Elle regarde par terre, les yeux dans le vide. Sa voix est tremblante et je me prépare à sa révélation. Je suis assez fort pour tout entendre.

-Ne cherche pas un coupable, il ne l'aurait pas souhaité.

"Il ne l'aurait pas souhaité" Sa phrase me surprend et j'essaye de comprendre au maximum le message qu'elle me passe. Son regard est fuyant et triste, il s'est passé quelque chose d'horrible. Je le sens à son contact de mère protectrice.

-Il voulait te voir mais il n'a pas pris assez de précautions.

Un frisson s'empare de mon corps. Les pièces de puzzle s'imbriquent lentement dans ma tête. Je commence à comprendre de qui elle parle, de la situation, du drame. Les larmes de ma mère réapparaissent quand elle chuchote:

-Personne n'a rien pu faire. C'était trop tard.

Elle pose sa main douce sur ma joue alors que je suis tétanisé par ce qu'elle vient de m'annoncer.

-C'est fini Harry.

Ces mots me glacent le sang et je me lève violemment du fauteuil. Ma mère lâche un sanglot étouffé. Ce son me donne la nausée. Mon cœur bat trop vite. Mes oreilles bourdonnent, les bruits autour de moi sont flous.
Je marche en chancelant, choqué par ce que je viens d'apprendre. Je m'appuie quelques secondes contre le mur et je réprime l'envie de vomir. 

Je m'avance vers la porte d'entrée, ignorant les protestations peu convaincantes de ma mère.
Je l'ouvre et le spectacle devant mes yeux me fait l'effet d'une bombe. Je reste pétrifié à cause du choc violent.
Les gyrophares des camions teintés de rouge, les personnes habillées de gilet jaune fluorescent éclairent cette nuit sombre, cauchemardesque. Quelques voisins sont comme moi devant leur porte, leur main sur leur bouche, choqués par cette vision de l'enfer.
Sur ma droite, l'arbre où je me cachais petit, n'a plus la même vision enfantine, innocente. Sa voiture est emboîtée dans celui-ci. Elle est broyée, on ne distingue plus ses formes. Sur la route, on distingue les traces de pneus grasses, preuves de ce drame.

Devant mes yeux, il est là.

Des personnes sont autour de lui et font je ne sais quoi. J'ai envie de hurler, de crier, de taper. Mais je ne fais rien de tout ça. Je fixe son corps. Son corps si jeune, si robuste, si parfait. Sans vie. Un homme me fait signe d'avancer, c'est ce que je fais. Je m'approche difficilement, contrôlant chaque mouvement.
Quand j'arrive à côté de lui, tout le monde s'écarte. Je m'accroupis difficilement et je le regarde. Ses traits sont doux, son visage est léger. On a l'impression qu'il dort. Comme un ange.
Mais c'est trop tard.
C'est fini.
Je ne le reverrai plus jamais. Je ne sentirai plus jamais son cœur battre contre le mien, à l'unisson. Je ne verrai plus jamais son sourire envoûtant, son rire magique, ses doux yeux bleus réconfortants.
Je pose ma main sur son visage glacé et sans vie. Aucune sensation ne me vient à part de la douleur. Une douleur indescriptible brisant chaque partie de mon corps. Je m'écroule à ses côtés, et je lâche prise. Mes barrières tombent et je pleure. Je ne me contrôle pas, ma souffrance prend le dessus. Un son à peine audible sort de ma bouche. Un espèce de rugissement de douleur et d'anéantissement.

En plein milieu de cette scène horrible, je perds mes moyens. Je crie, je pleure, je subis, je me sens vide. Je ne distingue plus rien à part son corps, plus un bruit à part mes cris stridents, bestiaux. Ma voix se casse alors que la douleur atroce continue à s'insinuer dans mes veines. Je commence à prononcer son prénom en le criant.

-Louis!

Je le répète en boucle. Je répète ce que je viens de perdre.

-Louis!

J'hurle son prénom. Les larmes coulant sur mon visage fissuré. Pas lui, pas Louis. La douleur étant tellement insupportable, je perds le contrôle. Mon esprit et mon corps ne réfléchissent plus logiquement. Ils n'ont plus la force de subir cette souffrance cruelle, ils veulent s'en débarrasser. Alors je laisse mon poing frapper le sol, m'imaginant que ce geste m'aide. Mes mains cognent le sol, avec plus de rapidité, de férocité. Mes jointures saignent, s'abîment et son visage souriant me revient en souvenir.

-Louis!

Je sens une main se poser sur mon épaule, je crois que c'est celle d'un pompier. Mais je continue, j'évacue ma souffrance. Je continue de taper, de pleurer, d'hurler, de lâcher prise.

Puis une main claque violemment ma joue. Et j'arrête de hurler, j'arrête de pleurer et le paysage autour de moi disparaît. Tout part dans un flou indescriptible, dans un trou noir. Plus rien.

J'ouvre les yeux. Niall est en face de moi, les sourcils froncés, la main levée en l'air.
Je secoue violemment la tête et reprend mes repères. Ma mère n'est pas là, je ne suis pas chez moi, il n'est rien arrivé à Louis.
Niall me presse doucement l'épaule et me regarde inquiet. Mon tee-shirt est rempli de sueur et ma respiration est saccadée.

-Harry, calme-toi. T'as fait un cauchemar.

Je m'assieds un peu plus droit, regardant partout autour de moi pour vérifier que c'est bien la réalité. Mes yeux font le tour de la pièce et je reprends petit à petit mes esprits.
Je suis dans une loge, allongé sur un canapé, tout transpirant et perdu. Niall est à mes côtes et me parle comme si j'étais un petit garçon.

Il n'y a pas un bruit à part une chaise qui grince. Je me retourne vers le bruit. Ses yeux bleus me glacent le sang.

Louis est là. Vivant. Il me fixe, la bouche grande ouverte, les sourcils froncés.

Il semble paralysé.


INAVOUABLE-Larry stylinsonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant