Au delà d'une vie. [EN PAUSE]

Chapitre II.

   Pour vous remercier de l'intérêt que vous portez à cette histoire! :)

                                                                                                * * * *

   Des mains lui agrippèrent les épaules et ses poumons la brûlèrent. Elle recracha de l'eau pendant qu'une personne lui tambourinait la poitrine en criant. Les cris étaient lointains. Elle n'avait jamais eu aussi mal.

- Hélène ! Reviens-moi ! Putain qu'est-ce que t'as foutu ?

   Ambre ? Difficilement, elle ouvrit les yeux. Le visage apeuré de sa petite sœur lui fit face.

- Oh mon Dieu ! J'ai eu si peur ! Déclara Ambre en la ramenant contre elle afin de la serrer dans ses bras.

   Quant à Hélène, elle était incapable de parler. Elle avait l'impression que l'intérieur de son corps était brûlé.

- Qu'est- ce qui t'as pris bordel ? Imagine si j'avais laissé tomber avec mes appels, je serais arrivée trop tard ! Continua sa sœur en pleurs et en lui caressant ses longs cheveux bruns.

    Elle n'arrivait pas à reprendre ses esprits. Le retour à la réalité n'était pas prévu au programme particulièrement après ce qu'elle avait vécu dans le tunnel. Elle ignorait s'il s'agissait d'un rêve. Une chose était sûre, elle se rendait compte qu'elle avait fait souffrir sa sœur. Et cela n'était pas son souhait. Vivre était tellement douloureux qu'elle n'avait pas réfléchi au mal qu'elle ferait à ses proches. En cet instant, elle se sentait horriblement honteuse et égoïste. Les sœurs avaient eu de nombreuses disputes et pourtant, elle n'avait jamais vu Ambre dans cet état. Et cela lui fendait le cœur. Celui-ci n'était donc pas mort, il était juste endormi pendant ces longs mois.

- Excuse...moi, je vou...lais simplement... dormir. Articula t-elle difficilement.

    Ambre lui prit le visage dans les mains et lui caressa la joue. Sur les siennes son mascara avait coulé. Elle pouvait encore lire l'effroi dans ses yeux bleus. Elle lui embrassa fortement la joue et chercha son téléphone dans son grand sac crème.

- J'appelle les pompiers. En plus tu saignes à la tête!

- Cela n'est pas nécessaire, je vais...

    Avant qu'elle n'ait pu terminer sa phrase, elle tomba en arrière et son corps nu vint à la rencontre du carrelage froid. Elle était épuisée.

    Après cette tentative de suicide, elle avait dû rester quelques semaines à l'hôpital. Ces séances avec le psy ne l'avaient pas aidée. Elle passait ses journées, allongée dans le lit, dans cette chambre aux murs beiges, à regarder par la fenêtre. Seule sa sœur venait lui rendre visite. En effet, elle lui avait fait promettre de garder le secret sur cet incident. Elle l'appelait ainsi car elle n'arrivait pas à dire "Suicide". Elle avait souvent été submergée par divers sentiments, l'incompréhension d'en être arrivée à un tel point, la tristesse d'avoir fait souffrir sa sœur mais aussi... La déception de ne pas avoir réussi. Lorsque la tentative était manquée, il ne restait plus qu'à assumer. Depuis, elle avait l'impression d'être sortie de cet état second et ne comprenait pas comment elle avait pu arriver à ce point de non-retour. Un pas après l'autre. Vivre au présent et ne pas angoisser quant à l'avenir. Finalement, pour ne pas sombrer dans ce flot de sentiments, elle avait trouvé un but. 

- Madame, la bibliothèque va fermer dans dix minutes.

    Hélène leva les yeux de son livre et hocha la tête en guise de réponse à la bibliothécaire. Elle finit sa page, ferma le livre, le posa sur la pile de livres et les rangea sur les étagères. Elle sortit de la bibliothèque nationale de Paris et fut surprise de constater que la nuit était tombée. Elle serra les pans de sa longue veste noire et marcha jusqu'au métro. Cela faisait plus de deux mois qu'après le travail, elle arpentait les bibliothèques de la région à la recherche de son « Graal » : une explication à ce qu'elle avait vécu. Pour l'instant, ses recherches n'avaient pas porté ses fruits. Plusieurs fois, elle avait pensé à abandonner. Cependant, ses pensées et le visage de l'homme dans son sommeil comme éveillée, ne lui laissaient pas de répit. Elle était toujours aussi affligée par la perte de Paul mais au moins elle avait un objectif. Elle voulait comprendre.

    Tous les jours, sa sœur la harcelait et si elle ne répondait pas à un seul de ses appels, elle débarquait chez elle. Chaque appel lui rappelait le geste qu'elle avait eu... En fait, elle pensait devenir folle à cause de ses nuits agitées. Etrangement, les traits du visage de l'homme ne s'étaient pas estompés. Elle le voyait toujours aussi clairement que cette fameuse nuit. Elle était totalement perdue. Et le pire dans tout ça était l'impression qu'elle avait de trahir Paul. Et pourtant, elle continuait ses recherches sur le sujet après la mort. Dévorant tous les livres en espérant trouver des passages faisant référence a ce qu'elle avait vécu. Ses recherches n'avaient fait qu'accentuer sa déception : certains livres évoquaient uniquement le fait que des proches les attendaient dans ce fameux tunnel. Par ailleurs, elle, elle ne connaissait pas cet homme. Elle ne faisait que repasser sa vie à la recherche d'une quelconque rencontre, tentant d'amasser le plus de souvenirs mais il n'y avait aucune trace de lui. Si seulement elle connaissait son prénom. Parfois, elle se demandait si elle avait rêvé. Puis, elle se disait que cela avait été tellement réel que ce ne pouvait être un rêve. Cet événement la hantait. Le pire était qu'elle ne pouvait en parler à personne.

     Dès qu'elle passa la porte de son appartement, elle enleva sa veste ainsi que ses escarpins et courut dans le bureau pour allumer l'ordinateur portable. Elle tapota des doigts sur le bureau en chêne pendant que l'ordinateur faisait des mises à jour et décida de prendre une douche. Elle se rendit dans la salle de bain et une pensée lui traversa l'esprit. Elle se souvint que la bibliothécaire l'avait appelée « Madame ». Les larmes lui montèrent mais elle les retint. A vingt huit ans, il était normal qu'on l'appelle « Madame » et pourtant, elle n'avait eu qu'à peine le temps d'être fiancée. Elle posa son téléphone sur le bord du lavabo en prévention d'un éventuel appel d'Ambre et se déshabilla rapidement. Elle fit couler l'eau de la douche avant d'y entrer et tourna la tête vers la baignoire. Depuis sa tentative de suicide, elle n'avait pas osé y pénétrer à nouveau. D'un geste brusque, elle éteint l'eau de la douche, ferma les parois et se tourna vers la baignoire. Il était temps d'avancer. Elle se pencha et actionna le robinet. Pendant que la baignoire se remplissait, elle fut prise de légers tremblements. Comme si son corps appréhendait ce qu'elle allait faire.

- Je ne le ferai plus. Se parla t-elle à elle-même.

    Elle glissa un pied dans l'eau du bain et doucement se laissa glisser. Après un moment de malaise, elle commença à se détendre. Elle en sourit. Elle avait réussi. Elle laissa tomber la tête en arrière et ferma les yeux. Ensuite, elle hésita à se laver les cheveux et s'intima de le faire afin de passer cet étape une bonne fois pour toute. De manière hésitante, elle le fit. Dès qu'ils furent rincés, elle s'assit, releva les genoux et posa la tête sur ceux-ci. Ses pensées revinrent vers l'inconnu. Elle ne comprenait pas pourquoi il l'avait empêchée de franchir le tunnel alors qu'il ne la connaissait pas. Il ne savait rien d'elle et donc il était incapable de comprendre son choix.

- Qui es-tu ? Murmura t-elle, les yeux rivés sur le robinet.