Chapitre 1

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La nuit avait été rude, la veille, Polly parlait sans cesse de cette histoire de camion plein à craquer de fric, il affirmait que ça serait le plus gros coup de l'année. Un peu comme à chaque fois qu'il avait un plan en fait. Ce gars possédait la faculté de rendre tout ce qu'il disait incroyable. Aussi bien, un simple braquage devenait soudainement l'affaire du siècle. Comme à chaque fois, j'y croyais, je le suivais et mes rêves de gloire se réduisaient à néant devant quelques billets qui n'allaient même pas me payer un costard décent. La vérité, c'est que je n'avais pas vraiment d'autres choix que de le suivre, c'était lui qui m'avait permis d'introduire le cercle. C'était il y a deux ans et depuis ma situation n'a pas réellement changé. Nos chemins s'étaient croisés dans un bar du coin. A l'époque, mon avenir se limitait à trouver une gentille fille, lui faire des gosses et ramener le blé au foyer. Cela aurait satisfait mes parents et mon ennui aurait prit place maître au sein de ma vie. Je rêvais pas vraiment de tout ça. J'ai quitté l'Ohio pour New-York prétendant un poste à Wall Street auprès de ma famille. Je leur envoie un chèque de temps en temps, pour faire perdurer le mythe. Ils sont plutôt fières à ce qu'on raconte. Et comme toute vérité n'est pas bonne à dire, je me contrefiche de ce mensonge, après tout il arrange tout le monde. Le fait est que ma formation d'économiste a intéressé Polly, avec qui je n'avais échangé que quelques mots au coin d'un bar miteux de Brooklyn. Je savais très bien qui il était et ce qu'il faisait. A vrai dire tout ça me passionnait. Cette famille soudée, régit par une hiérarchie fascinante. Mais ce qui me plaisait le plus dans tout ça, c'était cette manie à faire de ses vices une force. Or, mon attrait pour l'argent était un atout considérable dans ce genre de milieu. Je le flaire à des kilomètres, je sais comment fonctionne le marché, la bourse, les magouilles des politiciens. La manière dont ces gens contournaient les règles du gains me plaisait au plus au point. C'était du génie, un pauvre immigré squattait les beaux quartiers et s'imposait dans un monde jusqu'à présent fermé. Ils brisaient les cercles de ses riches beaucoup trop sereins dans leur coin. J'adorais cette idée et j'adorais encore plus la pensée de pouvoir faire ça aussi. De plus que cette nuit avait su me rapprocher un peu plus de ce rêve de conquête. En effet cette fois-ci, Polly n'avait pas extrapolé, le coup avait été en or. Pas un simple camion rempli de contrebande, non, une véritable mine d'or. Des bijoux, des montres et des pièces certainement destinés à un musée du coin. C'était un véritable trésor et nous allions bientôt pouvoir toucher le pactole intersidéral. De plus, comme j'avais fait parti du coup, j'allais enfin être respecté, devenir important. Je ne serais plus le simple larbin de Polly. Je crois que je n'avais jamais été aussi heureux que ce matin là. Je me vois encore passer le pas de la porte du Nero pour m'asseoir à une table en tant que membre à part. La fierté me faisait perdre pied. J'entends encore la voix railleuse de Tony, son cigare à la bouche affirmer que ce coup avait certes été en or, mais que ça ne nous empêcherait pas de faire mieux. Il attendait nos propositions, nos plans et j'avais enfin ce sentiment d'appartenir à la famille. C'était jouissif. 


G.  RossiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant