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Leïa d'Heaveron

Mon pouls s'accélère tellement que je l'entends bourdonner dans mes oreilles, il résonne dans mes tempes, je n'entends plus que ça.

Swanson appelle les noms, qui défilent. Ici, beaucoup de la population sont du début de l'alphabet, il y a beaucoup de "D" surtout. Je n'entends pas ce que le responsable nomme, je vois juste les désignés descendre les escaliers timidement, et s'approcher de l'homme qui leur tend un parchemin avec leur fonction inscrite dessus. Les adolescents ne restent pas plus de cinq minutes avant de retrouver leur place initiale, un grand sourire de soulagement affiché sur les lèvres.

- Soleyman Cayenn du Sud ! appelle vivement Swanson.

Je vois mon cousin avancer avec hésitation, tous les regards sont rivés sur lui, rien que son nom révèle son rang. Il ne s'attarde pas sur l'estrade, quand il a reçu son parchemin il rejoint ses parents sous les vivats de la foule.

Je vois des amis passer, et ils reviennent, heureux. Mais j'ai remarqué la disparition d'une jeune fille du Centre, dont je ne connais pas le nom, puis maintenant de deux garçons du Sud et de l'Est. Tout cela doit être très discret, car personne ne l'a remarqué sauf la famille du disparu.

Une autre scène attire mon attention, le débat d'une fille que je connais de vue, avec un garde qui l'entraîne pour la faire disparaître à son tour. Que leur arrive-t-il ? Sont ils "exclus" de la société ? Je me tourne vers ma sœur pour lui faire part de mes inquiétudes juste quand le dirigeant lance haut et fort :

- Laïla d'Heaveron !

Elle se lève, tremblante, et je l'encourage par une tape amicale dans le dos. Elle m'adresse un de ses beaux sourires dont elle a le secret avant de descendre les marches pour rejoindre la scène. Puis je me rends compte que c'est à moi après. Je me calme du mieux que je peux, c'est à dire en essayant de ne pas crier dans toute la salle. Je n'assiste même pas à la remise du parchemin de ma sœur, mais dès qu'elle commence son ascension vers nous elle déroule le parchemin pour voir la fonction qui lui est attribué.

- Leïa d'Heaveron !

Je déglutis lourdement, et me lève difficilement de mon siège vert pour descendre comme l'a fait ma jumelle quelques minutes auparavant. Quand je la croise elle me glisse discrètement à l'oreille :

- Écrivaine journaliste !

J'entends dans le ton de sa voix qu'elle est plus qu'heureuse, que c'est ce qu'elle attendait. Et j'en suis contente pour elle, mais mes espoirs de me retrouver avec elle s'effondrent, dans aucun cas je ne serais placée dans cette filière.

Je me place devant l'homme qui me fixe fièrement. Mais pourquoi ? Ai-je un avenir si prometteur ?

- Leïa, tu as un parcours sans erreurs, je n'ai vraiment rien à dire là dessus. C'est parfait, bonne continuation, félicitations.

Il me tend un parchemin identique à ceux de tous les autres mais qui doit renfermer quelque chose d'unique pour ma personne, qui renferme mon avenir. Mais avant que je m'en aille il murmure pour que personne d'autre que moi n'entende :

- Quand tu descends de l'estrade, va à la porte. On te conduira à l'intérieur, tu comprendras plus tard.

J'avale ma salive avec difficulté, j'entrevois le sourire rayonnant de Laïla qui n'attend que de connaître ma fonction, et je ne peux m'empêcher de la regarder avec tristesse. Je descends de l'estrade en prenant tout mon temps, évitant le regard de mes amis qui espèrent que je leur confierais vite de quoi était fait mon avenir, et je souris pour ce qui me semble être une dernière fois à ma sœur. Je ne vais pas riposter, j'ai vu ce qui est arrivé à la fille toute à l'heure, contrairement à la plupart des personnes présentes.

Le cercle des cinq magesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant