Chapitre 4

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                  Avant même que je n'ouvre les yeux, j'ai su que quelque chose n'allait pas. Un sentiment, mais surtout une sensation. Un instant j'ai essayé de ressentir le moelleux de mon lit après une nuit cauchemardesque, à la recherche d'un peu de chaleur et de réconfort, mais l'endroit dans lequel je me trouvais était à mille lieux de ça.

Je n'avais pas froid, ni chaud d'ailleurs. Les sons qui me parvenaient semblaient étouffés, comme venant d'un lieu bien au delà de la réalité. Sourd et omniprésent, ce brouhaha indescriptible envahissait l'atmosphère, des voix peut-être, ou autre chose. Dans ce rêve étrange il me semblait être debout ou presque...Non...Je flottais. Les scénarios de mes songes ne m'avaient jamais procurés de telles sensations.

Je pouvais sentir mes cheveux ondoyer doucement autour de moi, et au fur à mesure que ma conscience revenait et quelques bribes de souvenir avec, il me semblait reprendre une forme de vie. Incapable du moindre mouvement, comme engourdi, mon corps se trouvait à la merci du va et vient calme du liquide dans lequel je baignais. Je respirais, mais l'air qui traversait mes narines , ma bouche, avant de pénétrer mes poumons avait un goût qui m'était inconnu, loin de ce que je connaissais du monde extérieur. Celui-ci était chaud et frais à la fois, et venait d'un masque qui me recouvrait une partie du visage. 

Les yeux mis-clos, je tentais de prolonger ce moment où la réalité borde le songe, retardant au maximum l'instant de décider s'il s'agissait d'un rêve ou non.

 Quelque chose n'allait pas.

J'ai enfin ouvert les yeux avec appréhension, pensant enfin lever le voile et me réveiller, mais le cauchemar n'a pas cessé. Ce n'étaient plus les regards inquiets et bienveillants des pompiers qui se posaient sur moi, pas même ceux des infirmières, ou que sais-je... Mais les regards avides d'un groupe d'hommes en blouse blanche.

Je n'étais jamais arrivé à l'hôpital.

Au travers d'une vitre qui déformait ma vision et m'empêchait de distinguer leur visage, je les voyais évoluer près de moi, sourire,froncer les sourcils me semblait-il, noter. Je remarquai alors que je flottais en fait dans une sorte de tube, rempli d'une espèce de liquide épais et bleuté, au milieu de ce qui semblait être une vaste pièce d'un blanc immaculé aux nombreuses installations.

Un laboratoire pharmaceutique ou quelque chose du genre ? Non...car plus que des scientifiques, des hommes armés allaient et venaient au pas.

Je devais être sous le coup des sédatifs car je n'arrivais à faire pour seul et unique mouvement que celui des yeux, mes bras pendaient mollement dans l"eau", bardés de liens, de fils et de tuyaux. La panique afflua lentement dans le brouillard de mes pensées, insidieuse et muette. Je n'arrivais toujours pas à saisir la situation, à comprendre pleinement ce qu'il se passait. Ma seul certitude à cet instant : j'étais sujet des attentions.

Oui,l'on me regardait avec des yeux froids, méthodiques, calculateurs même ! Avec un brin de curiosité presque malsaine, pas tout à fait comme l'on regarde un homme. Ils devaient être au moins une dizaine dehors à scruter mon corps nu exposé dans ce cercueil de verre. Mais je n'eus pas le temps de ressentir la moindre gêne eu égard à ma nudité, car leur attention fut décuplée à l'instant même où je pus esquisser un mouvement de tête dans leur direction.

Comment avais-je pu en arriver là... Ce n'était pas la place d'un lycéen sans histoire. Je devais sans doute me trouver en cours à cet instant, pas admiré comme un poisson rouge ! C'était à ne rien y comprendre.

Combien de temps étais-je resté inconscient ?

Le laboratoire était plein à craquer de matériel médical qui m'était inconnu, et d'une multitude d'ordinateurs qui affichaient des choses que je ne distinguais pas bien. Chiffres, courbes, silhouettes humaines déformées et présentées sous toutes les coutures...

Dies iræOù les histoires vivent. Découvrez maintenant