Chapitre I

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Ce matin, je fête mes 22 ans. En soi, ce n'est pas mon anniversaire qui m'importe le plus, c'est d'avoir ma famille, mon homme et mes amis proches réuni. C'est peut être rabat-joie mais aux vues du changement de notre monde ces derniers temps, je pense que se réjouir de la présence de ses proches est la meilleure chose à faire.
Trêve de plaisanterie, je me lève dans la pièce noire et m'habille d'un jean slim noir et d'un t-shirt noir simple. Après tout ce n'est que ma famille et mes amis m'ont vu dans de pires états. Ne parlons pas de mon presque-mari.
On toque à ma porte, je fais un bond.
"_ Wandy?
La petite voix de mon frère apaise mes tensions. Je dégage l'entrée de ma chambre en mettant de côté le gros meuble qui est devant et tourne le verrou.
_ Qu'est ce que tu fais là bonhomme, tu as eu l'autorisation pour sortir de ta chambre ? Lui dis-je en le prenant dans mes bras.
Lonny a eu 8 ans il y a deux semaines. Je ne sais pas si je dis ça car c'est mon frère mais ce gamin est adorable. Ses bouclettes blondes et ses yeux bleus ronds font le même effet que le soleil un matin de printemps. De même que sa voix les chants d'oiseaux.
_ Bon anniversaire grande sœur ! Me dit-il tout souriant en me serrant fort dans ses bras.
Je le serre à mon tour, profitant de ces moments que je pensais intemporels jusqu'à ce que le monde commence à changer.
_ Merci Lonny, je t'aime.
Je ne pensais pas que ma voix tremblerait comme ça, je suis devenue sensible.
Il dépose un petit baiser sur ma joue et je le pose, nous séparant de cette belle étreinte. Il prend ma main, et je repense au fait qu'il n'ait pas répondu à ma question.
_ Lonny tu ne m'as pas répondu, papa et maman t'ont autorisés à sortir?
_ Oui c'est papa qui est venu me chercher.
Je souris et serre légèrement sa main. Depuis le début des changements, nous avons décidé de rester constamment dans la maison. De toutes façons, que faire d'autre ? Les écoles sont désertes, les hôpitaux abandonnés et brûlés. Tout est parti de ces derniers, en parti celui de ma ville.
Tim, mes parents, quelques amis et moi avons fait des travaux histoire d'assurer notre sécurité. Les fenêtres et les accès à la maison sont barricadés, seule la porte d'entrée est intacte mais nous avons innové pour qu'elle soit plus résistante. Mon père est un très bon bricoleurs, tout le monde lui fait confiance sur ça. Les CRS ont même eut pour ordre de faire sauter la ville, il y a maintenant un mois que la notre n'existe plus. Heureusement que nous nous trouvons dans la banlieue, notre lotissement a été épargné, du moins une partie. Nous ne sommes que quatre ou cinq familles, tous les autres sont partis, et nous ne savons pas ce qu'ils sont devenu. Je doute que nous le sachions un jour.
_ Bon anniversaire mon amour.
Un bras glisse autour de ma taille et m'attire contre un torse chaud et réconfortant. C'est Tim, mon fiancé.
_ merci.. Lui dis-je en souriant.
Lui et moi nous connaissons depuis le lycée, son père et le mien étaient de très bons amis. Nous nous sommes mis ensemble lorsque ma mère et moi ne nous entendions plus du tout, c'est à dire vers mes 17/18 ans. Tim a toujours été plus une amourette qu'un grand amour, mais je m'obstine à refuser de penser qu'il ne sera jamais plus. Lui et moi avons une relation assez atypique, bien que simple. Bizarre de dire ça comme ça. Mais j'ai l'impression, et encore plus par les temps qui courent, que nous sommes deux meilleurs amis qui partagent de bons souvenirs et qui essaient de se soutenir plutôt que deux amants prêts à se marier. Sûrement un problème de circonstance, peut être bien même de conscience.
Il dépose une lignée de baisers le long de ma mâchoire, que je ne lui refuse pas, bien au contraire, et glisse à mon tour mes bras autour de son torse pour me serrer contre lui.
_ C'est ton jour..
Il me sourit. C'est vrai, son visage est radieux, mais il est vide, depuis peu il s'est vidé de ce qu'il semblait ressentir, sentir, avoir en lui. Je ne lui reprocherait jamais d'avoir perdu ça, comment lui en vouloir ?
Je caresse doucement sa joue et passe mon pouce sur sa fossette. Ses yeux bruns fixent les miens, il est beau. Ses cheveux noirs en bazar et les quelques gouttes de sueur sur ses tempes me racontent qu'il a passé une nuit longue et agitée, j'aurai dû le rejoindre, mais les circonstances m'en empêchent. Je ne veux pas foutre le bordel dans un chaos qui est déjà immense. Alors je me plie aux règles, encore, mais je le fais pour nous.
_ je t'aime, tu le sais..
Il hoche légèrement la tête et pose ses lèvres délicates sur les miennes.
Je sens le goût amer de ses larmes sur sa bouche. J'essaie de le rassurer, de lui montrer qu'il n'est pas seul et qu'on ne l'abandonnera pas, ni moi, ni ma famille car il en fait désormais parti.
La vie n'a jamais été simple pour lui, sa mère était dépressive, et son père est tombé malade lorsqu'il avait douze ans. Les Hallen étaient des gens honnêtes et gentils, nous nous entendions très bien avec eux. Tim venait souvent ici lorsque son père était hospitalisé, car nous savions tous dans la maison et dans le quartier que sa mère n'avait plus la force de s'occuper d'elle-même lorsque son mari était dans ses périodes de faiblesse. Nous essayions de l'aider, mais un jour où Tim et moi parlions assis sur le capot de la vieille Mercedes de mon père, nous avons entendu des sirènes se rapprocher à vitesse grand V, puis avons vu un camion de pompier passer devant le porche, se diriger vivement vers la maison des Hallen.
Ce jour-là, j'ai vu ce visage poupon se décomposer, ces lèvres contre les miennes se déformer, ces yeux qui me fixaient il y a encore deux minutes se vider, et cette voix enchanteresse qui me souhaitait mon anniversaire il y a un instant se briser. Nous avons couru jusqu'à chez lui, tandis que mes parents se trouvaient déjà là-bas. Tim a couru plus vite, les passants et les riverains s'attroupaient pour voir ce qu'il se passait, et au moment où nous arrivions devant la maison, les grands hommes sortaient par la porte d'entrée un brancard couvert d'un drap blanc. Tim s'est précipité, certains pompiers inactifs essayaient de le retenir mais finirent par le laisser passer, le cœur brisé par les pleurs d'un gamin déjà à moitié orphelin.
Ce corps contre le mien, chaud et bien formé, ce jour-ci, s'est effondré sur le porche 56 de notre avenue. Comme si ses os tombaient un à un, comme si on l'avait assommé.
Je glisse ma main dans sa nuque et plaque mes lèvres plus vivement contre les siennes, je dois rester là pour lui, je ne pourrai jamais le laisser seul dans ce merdier.
Nous avions 18 ans lorsqu'il a perdu sa mère. Il y a un mois que nous n'avons plus de contact avec son père qui se trouvait à l'hôpital lorsque tout a commencé.
C'est dingue qu'il ait tenu le coup, mais il a perdu quelque chose, il y a des lumières qui se sont éteintes chez lui.
Et c'est flinguant.

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Hey tout le monde ! Voici le premier chapitre d'une houleuse histoire. J'espère que cela ne vous paraît pas trop plat ou descriptif pour le moment !
Comment avez vous cerner le personnage de Wandy pour le moment ?
Much love !
xx

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