Le coeur d'une morte.

45 9 5
                                    




Devant le soleil levant, douce aube, je me suis assise, là, sur ce vieux ponton où nous avons passé tant de temps, regardant l'eau du lac onduler au gré du vent.

Puis, j'ai laissée le flot de nos souvenirs inonder ma mémoire ; je me suis rappelée de toi, de moi, de nous, de nos échanges, de nos regards qui voulaient tant dire et de ton sourire qui me donnait la force d'affronter la vie.

Je suis restée assise là je ne sais combien de temps, perdu dans ce qui me semble être les plus beaux moments de nos vies.

Puis la faucheuse, grande dâme tout de noir vêtu, m'a dit d'une voix douce et hors d'âge qu'il était temps de partir. Elle me tendit une main douce et osseuse que je pris sans aucune once d'hésitation. Car, oui, ma vie s'en est allée il y à quelques heures, et ce vieux ponton à côté de toi fût le seul endroit où je voulais être pour dire adieu à notre monde.

En me levant, je te jetais un dernier regard, toi, mon beau blond aux yeux vairons. Ta beauté si particulière m'a toujours chamboulée. Chaques courbes de ton visage sont gravées en moi au fer chaud, cette douce douleur est mon fardeau le plus précieux.

Dans la brise, je te suppliais égoïstement de me laisser partir librement, je te suppliais égoïstement de sourire encore et encore, je te suppliais égoïstement de n'en n'aimer aucune autre autant que moi. Car, oui, je suis une morte terriblement exigeante ! En échange, je veillerais sur toi chaque jour que Dieu t'accordera, je serais ta lumière dans l'obscurité, je serais la main tendue quand tu chuteras, je serais ta couverture qui te protégera de la froideur de l'hiver, je serais le miel qui adoucira la rudesse de ta vie.

En m'élevant vers les cieux, tu étais encore là, devant cette entendue d'eau, les yeux dans le vague. Je te fis mon dernier cadeau, le plus beau levé de soleil que nous n'avions jamais vu, apparut devant tes yeux aux milles contrastes. Alors que le ciel s'embrasait de nuance de rose, d'orange et de bleu pastelle, tu levas les yeux vers l'immensité qui te surplombait.

Tu regardas ce dernier présent à travers moi sans pour autant me voir. Comme pour m'éviter la douleur de ma disparition, tu me fis ton plus beau sourire, ce fameux sourire qui n'était que pour moi. Celui qui atteint tes yeux, celui qui me faisait croire que j'étais spécial, unique. La douceur de ton visage m'a permis de m'envoler le cœur léger. Laissant mes peurs et regrets derrière moi sans aucune once de honte.

De là-haut mon amour, je nous prépare un doux avenir, un somptueux foyer, ou plus jamais nous ne serons séparés ou nous savourerons chaquess seconde de notre éternelle vie à deux. Malgré ma hâte de te tenir la main, mon amour, je ne te veux pas à mes côté tout de suite. Je t'aime bien top pour te couper de ton avenir.

Mon amour vie ! Vie encore ! Vie pour nous deux ! Hurlais-je à plein poumon dans le vent. Je fus persuadée que ces mots t'ont chatouillés les oreilles puisque tu as murmuré dans la brise : promis ma vie.

Je dois être la seule morte à avoir le cœur qui se ravive...

Je fis un clin d'œil a la faucheuse, qui nous observait d'un œil critique et attendrit, celle-ci me suivit vers son domaine soudainement plus légère.

Car oui je suis une morte terriblement audacieuse.

Mes micros histoires.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant