Mes micros histoires.

L'aveu d'Ewak

           

Elle ne n'avait pas voulu de cette mission. En plus de l'ennuyer au possible elle ne voulait surtout pas être l'oiseau de mauvais augure, pourtant elle n'avait pas eu le choix. Son Alpha le lui avait ordonné, elle l'avait maudit à haute voix, se moquant éperdument de ce qu'il pouvait lui faire en guise de représailles. Plus rien de ne comptait depuis l'autre nuit.

La porte de la grande baptise ocre claqua avec force, elle s'en alla d'un pas rageur en direction du centre-ville. La louve voulut y aller à pied, elle s'était dit que cela la calmerait peut-être un peu. L'air chaud lui brulait délicieusement les poumons, elle avait toujours aimé cette fin de saison. Son débardeur foncé colla rapidement sur sa peau tannée par le soleil, elle du se retenir de le faire voler dans un buisson. Les humains avaient beaucoup trop de règles pour elle, dont une bonne quinzaine sur la nudité. Pour la louve, être nue était la chose la plus naturelle du monde.

Rien de tout cela ne détendit ses nerfs.

En arrivant aux abords du centre-ville, elle plissa le nez, il y avait bien trop d'odeur pour elle. Rien ne sentait bon, tout était une agression aussi particulière que typique. Quand elle était plus jeune, ses sorties scolaires se faisaient ici. Ils apprenaient à se comporter correctement en milieu urbain et surtout à ne pas céder à leurs pulsions d'animales sauvage aimant manger de la chair fraiche. Ses sorties comptaient pour cinquante pour cent de leur note finale, elle n'avait donc pas d'autre choix que de réussir.

Devant elle, un amas d'humains de tous genres se mouvaient dans tous les sens. La louve pouvait entendre leurs conversations et sentir leurs réels envies ou besoins. Aucun cœur ne battait de la même façon ni à la même vitesse. Cette cacophonie rassurait la louve, ce bordel ambiant, comme elle disait, était quelque chose de normal pour elle.

Un cœur qui bat c'était une vie qui pouvait être enlevée en un coup de crocs.

Elle soupira longuement quand elle ne fut plus qu'à une trentaine de mètres de sa destination. Elle s'adossa contre un mur et se concentra sur sa cible. Cette autre jeune femme, complètement humaine, était assise devant une petite table en métal. Elle se refroidissait les mains autour d'un verre de soda glacé. Cela frappa de plein fouet la louve, elle comprit beaucoup de choses et ce qu'elle avait beaucoup craint se produisit. Elle ressentit de la peine.

Son cœur animal se serra dans sa poitrine. Elle qui s'était efforcée à repousser sa propre peine pendant des jours au fin fond de son être, sentit ses barrières exploser dans son corps en un battement de cil.

« Plus vite je commence, plus vite ce sera fini » se dit elle sans grande conviction pour contraindre ses jambes à avancer. De la bile remonta dans sa gorge quand elle put sentir son odeur. La jeune femme puait la douleur, l'angoisse et la colère malgré son sourire radieux. La louve avala difficilement sa salive.

Sans un mot, la louve prit une chaise en métal et la plaça au côté de l'humaine. Elle prit un instant avant de la regarder franchement, ses mains ne tremblaient pas pourtant tout son corps lui hurlait de la fuir. Cette humaine était à l'origine de ces odeurs, elle était un danger potentiel, la louve devait donc fuir.

L'humaine soupira, la louve serra les dents.

-          J'imagine que vous savez ce que suis. Commença la louve en la regardant enfin. Brune, traits fins, yeux en amande, peau claire. Elle comprit ce qu'il l'avait fait flancher : tous ses petits défauts.

Les imperfections de sa peau, les petites rides aux coins de ses yeux, celle au milieu de son front, ses lèvres un peu trop charnues. L'humaine était belle à sa façon, pleine de vie et unique par tant de façon que la louve n'aurait pas pu toutes les lister.