Chapitre III

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Le lendemain, Maud se leva reposée. Elle avait le sentiment qu'elle allait passer une bonne journée. Elle se prépara et prit sa voiture pour aller en cours.

Les deux premières heures passèrent vite et ce fut l'heure de la pause. Maud avait un peu faim alors elle décida d'aller acheter un en-cas à la cafétéria. Pour cela elle devait traverser tout le lycée. Elle avait fait les trois-quarts du chemin quand elle aperçut Aaron. Il riait avec ses amis, enfin elle les supposait être ses amis. La jeune fille n'avait jamais remarqué à quel point ses yeux et ses cheveux étaient foncés. Peut-être qu'elle les appréciait. Quand il riait ses yeux pétillaient. Il était certainement attirant. Sûrement que beaucoup de filles ne le trouvaient pas à leur goût, mais ce n'était pas le cas de Maud.

Elle était tellement plongée dans ses yeux, qu'elle baissa sa vigilance un peu. Ce peu lui coûta cher, car un élève la bouscula. Elle cria. Instantanément son souffle se bloqua et elle fut envahie par une sensation de dégoût. Sa peau était en feu, elle entière était en feu. Les larmes montèrent bientôt à ses yeux. Elle s'enfuit alors vers les toilettes, non sans un regard vers Aaron qui l'observait aussi comme tous les élèves présents.

Ce dernier, était interloqué de la scène qui venait de se produire devant ses yeux. Il n'avait jamais vu une des crises de Maud, il en avait juste entendu parler. C'était en effet assez impressionnant. La jeune fille si calme tout à l'heure était devenue une véritable boule de nerf. Ses amis et lui n'en parlèrent presque pas. Ils n'y accordèrent pas plus d'attention que cela et continuèrent leur conversation. La pensée de cet incident resta quand même dans un coin de l'esprit d'Aaron.

Pendant ce temps, Maud était toujours tétanisée sur le sol des toilettes. Elle était assise là statique mais les pensées affluaient dans son esprit. Elle se sentait misérable, véritablement moins-que-rien. Les minutes passèrent et quelqu'un frappa à la porte. Une voix douce s'immisça dans ses tympans. C'était l'infirmière du lycée.

« Maud ? On m'a prévenu de ta crise, j'ai appelé ta mère. Ouvre la porte et viens avec moi, elle va bientôt arriver. »

La jeune fille ne dit et ne fit rien. L'infirmière l'appela une seconde fois et partit.
Quelques temps plus tard, une autre voix se fit entendre. Sa mère lui suppliait d'ouvrir. Ce fut à ce moment qu'elle se remit à pleurer. Elle se leva difficilement et quand elle vit sa mère, ses sanglots redoublèrent. À cet instant, sa mère eut une envie presque irrépressible de l'étreindre. Ce qu'elle ne fit pas, bien sûr. Elle lui chuchota juste des paroles réconfortantes, puis chanta une berceuse. Elles repartirent chez elles.

Un peu plus tard, dans la fin d'après-midi, Maud se rendit à son rendez-vous hebdomadaire avec la psychologue accompagnée sa mère. Bientôt, ce fut son tour et elle entra dans le bureau. Comme d'habitude, elle s'asseyait dans le fauteuil et saluait la femme d'une quarantaine d'années.

« Bonjour Maud. Alors que s'est-il passé cette semaine ?
- Eh bien, rien de particulier, mais j'ai eu une crise ce matin.
- Mais, dit-elle en fronçant les sourcils, cela faisant longtemps. Comment ça s'est passé ?
- Je, j'étais dans le couloir et un élève m'a bousculé. Je n'ai sûrement pas assez concentrée. »

La psychologue décida d'en rester là malgré l'incohérence de la situation.

« Ok, parle-moi de tes émotions pendant la crise.
- C'était comme toujours, mais en pire. J'ai le sentiment que plus je vieillis, plus ça empire. Les sensations s'estompent peu à peu, mais les émotions restent longtemps ancrées. Même maintenant je me sens mal à l'aise : mal dans ma peau, mal dans ma tête. Quand j'étais enfant, je n'avais pas ce problème, les sensations passées, j'allais beaucoup mieux. Malgré le fait que j'étais solitaire, je m'occupais et je jouais seule. Et cela me convenait d'ailleurs. Mais maintenant, je... je crois que je commence à souffrir du manque de communication. Mes parents m'encouragent à améliorer le social, mais... je leur fais croire que ça ne m'atteint pas, pourtant, c'est faux.
- Pourquoi penses-tu que tu leur caches ton malheur ?
- Sûrement parce que je leur inflige des problèmes depuis toute petite. Je traîne avec moi un lourd fardeau. Ce n'est vraiment pas facile à gérer. Je sais déjà que leur couple se fissure alors je ne veux pas aggraver.
- Mais, tu es leur enfant, tu passeras toujours en premier.
- Justement, je veux qu'ils pensent à eux même. »

Le rendez-vous se poursuivit. À la fin, Maud ne se sentait que très peu mieux, mais elle savait que cela allait passer. Elle monta dans sa chambre sans manger et alla dormir.

ThixophobieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant