<< les bons amis t'aident à retrouver des choses importantes lorsque tu les as perdues ; ton sourire, ton espoir et ton courage. >>
- Elser ! Elser !?
Je reçois un violent coup de coude de la part de mon voisin de table en pleines côtes. Dans un sursaut, je me redresse et m'assieds correctement sur ma chaise, tout en répliquant.
- mhumm... quoi monsieur Miller ?
Je panique tout en essuyant la bave de mon menton, sous le regard amusé de mon meilleur ami.
- Mademoiselle Mills, votre deuxième trimestre va être un vrai fiasco si vous ne vous mettez pas enfin au travail ! En étant élève de terminal, il serait temps de vous y mettre !
Elser Mills, c'est moi. La fille qui change de couleur de cheveux tous les mois parce qu'elle est indécise. D'ailleurs, elle n'arrive pas à se décider sur à peu près tout. Ses études, ses amis, sa vie en générale. Bref, une adolescente pure et simple.
Côté famille, entre un père trop riche et une mère surprotectrice, je n'ai pas spécialement une vie que je qualifierais d'idéale. Il y a moins d'un mois, maman a perdu sa fille et j'ai perdu ma sœur. Un bébé d'à peine trois heures... qui a préféré donner son âme à Dieux, nous laissant dans un deuil sans fin.
Moi, je n'en vois pas le bout.
Il m'arrive souvent de me mettre à pleurer au manque de cette petite chose. Si petite, mais si importante qu'elle était déjà pour moi ; cette sœur. Si fragile et vulnérable dans son petit lit blanc, mais au chaud et bercée jusqu'à son dernier souffle par le bruit strident de chaque battement des appareils de l'hôpital.
Tout cela semble pourtant tellement insignifiant aux yeux d'un professeur d'anglais, dans sa salle de cours, qui préférerait donner ses leçons plutôt que de m'entendre gémir. C'est peut-être pour lui plus facile. Moi... je préfère me souvenir.
Nous pourrions être en train de mourir qu'il nous dirait " in english please". Heureusement qu'il me reste quelqu'un à qui me raccrocher. Gabriel, mon meilleur ami. Le garçon qui sera toujours là pour moi. Et qui m'a empêché de me noyer pendant que j'écumais dans l'eau, à mes heures les plus sombre. Il y avait toujours son bras pour me remonter à la surface, et ses mains pour m'aider à ne pas basculer. Il est vraiment tout pour moi...
La sonnerie résonne, me permettant de me libérer de cet homme inhumain qu'est mon professeur.
- N'oubliez pas de réviser pour l'interrogation de demain, avertit-il à toute la classe tout en confrontant son regard au mien, comme pour me dire que j'avais intérêt à ne pas rendre une copie blanche.
Je range vite ma pochette dans mon sac et m'empresse de sortir de cette salle de cours. Je rattrape Gabriel au pas de course car il a déjà pris de l'avance et fait de grandes enjambées, tandis qu'il se dirige vers les escaliers ; au hall d'entrée, et enfin à la liberté. Nous marchons, sans rien dire. Sans même nous regarder. Mais observer ses jambes du coin de l'œil suffit à me rendre heureuse et plus forte. Nous avançons dans un même rythme jusqu'à l'arrêt de bus, et cela me fait sourire.
Commencent les neuf minutes interminables d'attente ; dans le grand froid d'hiver. La température fait sortir une fine buée de mes lèvres, à chacune de mes expirations. Je regarde autour de moi. Le verglas a attristé le paysage et figé la route. Tout est devenu plus sombre et plus inerte. Il ne manque plus que le blanc de la neige et nous pourrions fêter noël dans les traditions d'ici un mois. C'est fou ce que les semaines passent vite quand on est en pleine scolarité. Déjà bientôt noël.
Je reçois à nouveau un coup de coude.
- Tu boudes ? me demande Gabriel.
- Moui, répondis-je toute mollassonne.
- préviens-moi quand tu auras fini ! Que je puisse reprendre une conversation normale avec toi !
Sa réponse me fait rire. Il se met à me regarder de ses grands yeux bleus et je lui souris. Puis je remets correctement mon bonnet d'un vert foncé sur le dessus de mon crâne. Laissant apparaître aux rebords, mes long cheveux tintés d'une claire couleur nageant entre le bleu pâle et le blanc, au-devant de mes épaules.
- Enfin un sourire ! Je commençais à désespérer ! s'exclame-t-il dans un rire des plus charmeur.
- Pfff ! soufflé-je, tu as mauvaise mémoire. Je souris presque tout le temps ! Et je suis de très agréable compagnie, rigolé-je.
- Enfin je retrouve la Elser que je connais !
Le bus arrive et nous fait face, m'empêchant de réprimander ses mots. Je farfouille, à la vue du grand autobus se dressant devant moi, dans les poches de mon manteau et en sors ma carte de transport. Je rentre ensuite à l'intérieur, suivis de près par Gabriel. Enfin, il fait chaud ! Je passe devant le conducteur à l'air mollasson et lui montre mon "billet d'entrée", qu'il regarde sans grande attention, avant de me faire un signe de tête, me donnant le feu vert. A l'intérieur, toutes les places sont déjà prises. L'allée centrale est encombrée par une masse de gens. Le passage est impossible. Je m'accroche donc à l'une des barres jaunes du bus pour ne pas tomber, étant obligée de rester debout.
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Frôlement de l'âme
RomanceTout amour nourri d'une grande passion et de beaucoup de sentiments est prêt à braver tous les obstacles. Une caresse, un mot doux, des frôlements... tous ces petits signes qui embellissent les sentiments d'un amour sincère et profond. Elser se rapp...