Le Buisson d'or - Tome 2

chapitre 5

5.

« Rien de tous cela n'était prévu dans notre accord ! Vous deviez simplement récupérer la luminescente, pas éliminer mon reproducteur ! »

L'indignation d'Ouria se déverse dans mon oreille. Je l'entends comme un murmure lointain.

Le noir m'entoure tel un épais manteau dans lequel l'on m'aurait ligoté. Tout mon corps est engourdi. Il m'est impossible d'ouvrir les yeux. Je n'éprouve aucune douleur. Je dirai plutôt que je flotte à la dérive, sur un océan...tantôt calme et qui soudain tend à se déchaîner.

Lorsque le son de sa voix répond à l'attaque qu'Ouria vient de lui lancer, dans mon esprit, tout redevient clair.

Mon cœur se serre. Un poids énorme compresse ma poitrine m'empêchant de respirer. Le nœud qui grossit dans ma gorge me fait si mal que j'en appelle à l'explosion de ma trachée pour en être soulagé. Je n'ose affronter la réalité. Je refuse de me confronter à cette vie que je ne veux plus. Sans lui, je n'en vois pas l'utilité. Pourtant, les images reviennent hanter mon esprit et s'impose à moi tel des flèches touchant leurs cibles en plein centre à chaque jet. Me répétant sans cesse :

Kyo est mort ! Kyo est mort ! Kyo est mort !

La dague des Kamase fiché dans ce que je pensais éternellement à moi : son cœur, son âme, son être.

« On dirait que ma bien-aimé revient parmi nous ! »

Je le sens qui s'agenouille à mes côtés alors que je gis sur le sol inerte. Certainement non loin du corps de son propre frère qu'il a lui-même assassiné.

Il à raison, ma conscience ressurgit de même qu'une gigantesque vague de nausées. Je la laisse déferler en moi espérant vicieusement que le contenu de mon estomac lui bouchera la vue ! Ou tout au moins giclera sur lui et agira tel de l'acide pour le réduire en un morceau fumant de chair immonde.

« Allons, allons ma Princesse ! Il est inconvenant de ta part de penser à de tel chose. Ce n'est pas gentil pour moi.»

Je ne comprends pas ce qui a pu pousser Kone, lui autrefois si doux, attentionné et protecteur envers moi, à radicalement changer de comportement voir de personnalité.

Kyo m'avait expliqué que son frère refusait de se nourrir pour se laisser mourir. Le manque de sang aurait annihilé le peu de compassion, d'amour et de bon sens qu'il avait en lui ?

J'ai du mal à admettre que le Kone d'il y a quelques mois ai totalement disparu au profit de cette créature sans remord ni compassion qui aujourd'hui surplombe mon corps sans défense.

Pourtant, il vient de tuer son frère. J'ignore s'il est conscient de ses gestes. Dans le cas contraire, je n'aimerais pas être à sa place, lorsque sa raison reviendra. Si elle refait surface un jour.

Dans ma tête tout résonne. Mon cerveau est compressé contre les parois de mon crâne tant le brouillard qui l'entoure est épais. Mes yeux refusent de s'ouvrirent et je ne les y force pas.

Un frisson de dégout me traverse jusqu'à me piquer le bout des doigts. Kone vient de poser sa main sur mon ventre. A l'endroit même où ma peau affiche encore les cicatrices de l'intervention que Rooth et Ouria m'ont fait subir.

D'un côté, je suis heureuse de ne plus porter l'enfant de ce monstre, même si ce petit être qui grandissait en moi ne méritait pas cela.

Mon cœur se broie à nouveau en réalisant que maintenant, je suis seule au monde. Sans Kyo ni Xiales. Les filles ne sont plus elles, tout comme ma famille et mon enfant.