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Ça fait maintenant deux heures que je suis chez moi et je n'ai pas encore fermé l'œil. Je dois être debout dans quelques heures et me préparer pour le boulot mais au lieu de me reposer, je ressasse cette soirée, affalée sur le sofa. J'en suis tellement heureuse que je n'ai pas encore appelé Nathan et Rebecca pour leur reprocher de m'avoir lâchement abandonnée à un dîner avec une personne qui n'était même pas sensée s'y trouver.
Je suis sur un petit nuage mais en même temps, je ne peux m'empêcher de penser que je dois donner l'impression d'être terriblement seule, pour que tout le monde veuille se mêler de ma vie privée comme ça. C'en est presque vexant. Ça a commencé avec Sonia qui m'a craché qu'elle savait que je finirais seule. D'ailleurs, maintenant que j'y pense, je ne lui ai pas rendu visite lors de mon week-end à Washington. Ce n'est pas plus mal. Mais maintenant que Nate et Becky s'en mêlent, je sens que je vais commencer à perdre patience. D'ailleurs, il faut que j'écrive à Blue. Ensuite, je réprimanderai Rebecca.

Moi: Blue?
Blue: Hey! Ça va toi?
Moi: Super. Qu'est-ce tu fais debout à cette heure-ci?
Blue: Ivy s'est réveillée et a fait un vacarme pas possible. Du coup je m'y colle. Il faut que je la nourrisse avant de la remettre au lit.

        Ivy est la fille de Blue, un bébé adorable avec des pupilles toujours scintillantes, de grosses joues roses et de beaux cheveux bouclés. Elle aura bientôt un an et je compte bien lui faire le plus beau cadeau qu'une marraine puisse offrir à sa filleule.

Moi: Et Derek? Demandé-je alors.
Blue: Ce gros flemmard n'a même pas bougé. Mdr je le comprend. Il travaille dur ces derniers temps. Alors quoi de neuf?
Moi: Tu te rappelles de ce garçon, Jason?
Blue: Ne me dis pas que tu l'as revu?
Moi: Si! ...

        Je lui raconte ma soirée avec Jason, du dîner à la petite marche le long de Elisabeth Street. Je lui explique le coup foireux que Rebecca et Nathan m'ont fait et lui dis à quel point ça devient lassant que tout le monde cherche à jouer un rôle dans ma vie amoureuse. J'en deviens presque spectatrice de ma propre vie. Nous discutons ainsi jusqu'au petit matin. Et si je n'ai pas eu le temps de me reposer pour entamer cette nouvelle journée, ce n'est pas plus mal car cela m'a fait du bien de parler à ma meilleure amie. J'ouvre la fenêtre de ma chambre et admire le lever du soleil. C'est quelque chose d'apaisant. Le ciel s'éclaircit peu à peu, les oiseaux chantent et les lève-tôt commencent leur journée. La fraîcheur de l'air est agréable. Les quelques déchets laissés à même le sol, -sûrement par les fêtards bourrés de la vieille-, virevoltent et les agents d'entretien passent. Bref, c'est une belle journée qui s'annonce.
        Je m'éloigne de la fenêtre et me dirige vers le placard où sont rangés aspirateur, balais, chiffons, et produits en tout genre. Comme j'ai du temps devant moi, je fais briller toute la maison en musique avant d'aller prendre une bonne douche chaude; j'ai toujours refusé de prendre une femme de ménage.
         Je sors de là toute propre, le teint frais mais tout de même épuisée. Je tend le bras pour attraper ma serviette et manque de glisser. Je sors donc entièrement, inondant le par terre de ma salle d'eau, attrape plutôt mon peignoir et m'enveloppe dedans rapidement. Je commence à avoir froid alors je met le plus gros pull que je trouve, avec un jean et des chaussettes. Pour la tenue classe et raffinée on repassera.
        Après un bon petit déjeuner et une tasse de café bien noir et bien chaud, je reconsidère enfin mon accoutrement. J'attrape un tailleur noir que j'accorde avec un chemisier blanc et une paire de talons châtains. Rien d'exceptionnel mais c'est déjà plus professionnel que le look de junkie de tout à l'heure. Je jette un coup d'œil et vois qu'il est 6h30 à ma montre. J'ai encore le temps de me poser et de regarder les infos; ce que je fais.
        Je suis en pleine réflexion sur la cause des guerres en Syrie quand.... Diiiiiing Doooong! La sonnerie retentit et me fait sursauter. Je n'ai pas très envie de me lever mais ma conscience me rappelle que dans la vie on n'a pas toujours ce qu'on veut. Là ce que je veux en l'occurrence, c'est que la porte s'ouvre d'elle même et que la personne qui se trouve derrière pose son problème et s'en aille promptement. Je reviens à la réalité après avoir essayé tant bien que mal d'utiliser "La Force" (référence à Star Wars) pour ouvrir cette maudite porte, je me lève et me dirige vers l'entrée en ronchonnant. J'ouvre et... Ça pour une surprise! Le livreur de l'autre fois est là, planté devant la porte comme un poteau, à me regarder avec un air faussement indifférent. Il a dû travailler dessus tout le trajet durant pour arriver à un tel résultat! Je l'ai reconnu, et je suis sûre que lui aussi. Alors sans vouloir le traiter de pervers, je suis sûre que comme moi, il pense à notre première rencontre, où il se tenait devant moi et moi devant lui, mais beaucoup moins vêtue que ça. Il me tend le bordereau de livraison sans dire mot et le reprend de la même façon. Aucun d'entre nous n'essaie de briser le silence pesant qui s'est installé à l'instant même où j'ai ouvert la porte. Il part en tentant quand même un "bonne journée" très timide et je referme rapidement derrière moi. Je regarde encore une fois à ma montre et il est 7h moins le quart. Je devrais peut-être me mettre en route. J'attrape mon sac qui trône sur la table à manger et sans un regard pour mon cher canapé, je m'en vais.
        Étant donné que je suis en avance, j'ai la chance de tomber sur les Grey qui sortent à peine de chez eux. Vous devez sûrement vous demander pourquoi je consacre autant de temps à la contemplation de cette famille. Ou peut-être y avez vous déjà trouvé une réponse; celle-ci étant, que je n'ai pas de vie et que par conséquent, je me concentre sur celle des autres. Non, vous n'y êtes pas. C'est simplement qu'outre le fait qu'ils font partie de mon voisinage, ils représentent ce dont je rêve le plus aujourd'hui: une belle petite famille avec au plus deux enfants.
        Enfin comme je le disais, les Grey viennent de sortir de chez eux. Je fais signe au chauffeur de taxi de les laisser passer et ils s'insèrent rapidement dans la file après nous avoir fait des appels de phares en guise de remerciements. Ils ont une petite Camry noire avec juste assez de place pour leur famille et un éventuel troisième enfant. Nos voitures se suivent jusqu'au bout de la rue puis, en moins de temps qu'il ne m'en faut pour le dire, nous arrivons sur la 5th avenue. Il gare juste devant Evans Home et je descend rapidement. Judy m'accueille comme à son habitude tout sourire.

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⏰ Dernière mise à jour : Oct 30, 2019 ⏰

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