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Après ce qui m'a semblé être une éternité, je suis enfin à New-York. Le bruit habituel et le mouvement perpétuel de "la ville qui ne dort pas" me font revivre mais je n'ai pas le temps d'en profiter pleinement. Je saute dans le premier taxi que je trouve et il me conduit rapidement chez moi. À peine arrivée devant le seuil de ma porte, je fond en larmes en repensant aux conditions dans lesquelles je suis partie mais surtout à ce qui m'attend derrière la porte: rien. Je ne me sens pas l'âme d'affronter la froideur de mon salon ou d'aucune pièce d'ailleurs et la gifle du vide qui s'abattra sur ma joue une fois que j'aurais ouvert cette fichue porte. Je plante mes affaires au beau milieu du balcon et me laisse glisser le long de la porte. L'endroit est tellement calme que les échos me parviennent lorsque mon postérieur touche le sol. Pas de doute, je suis bien seule! Tout en essayant de passer le niveau 377 de Candy Crush, je médite sur la réaction de ma pauvre grand-mère Elisabeth qui doit sans doute me trouver horrible à l'heure qu'il est,mais aussi à tous les autres: Henri, Jenny ,Andy , Hector et Candace.
        Je reste ainsi à terre une bonne trentaine de minutes avant de finalement me décider à affronter mon quotidien déprimant. Je me lève, ramasse mes affaires et enfonce la clé dans la serrure avec énormément d'appréhension. Le hall d'entrée est plongé dans le noir total et seules les lumières de la rue qui traversent la fenêtre du salon viennent l'éclairer. Tout est à sa place et ce qui devrait être confortable et réconfortant devient fade et angoissant. Rapidement, je m'enferme à double-tours, prend une bonne douche, et après avoir passé quelques coups de fils pour prévenir que je suis bien arrivée, me glisse sous la couverture pour entamer une bonne nuit de sommeil, probablement la seule chose positive qu'il m'arrivera dans la soirée.

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*Diiiiiing Dooooong*

        J'entend un bruit agaçant qui me sort d'un doux rêve dans lequel le personnage principal, moi, est une héroïne forte, intelligente et envoûtante et dont la vie est facilement comparable à des montagnes russes tant elle est mouvementée. Je tente de jurer mais il m'en manque encore la force à cette heure de la journée. D'ailleurs, quelle heure est-il ?  J'ai peine à ouvrir les yeux même si je sens la lumière sur mon visage. Quand je les ouvre enfin, je jette un coup d'œil rapide à mon réveil qui m'indique qu'il n'est encore que 6h30 du matin.

-Non mais qui sonne chez les gens à cette heure-ci?! Je grogne.

        Je ferais bien l'effort de me brosser les dents, de remettre mes cheveux en ordre ou même de me vêtir convenablement mais étant donné que je n'attend personne, je compte bien le faire remarquer à cet enquiquineur matinal. Je baille la bouche grandement ouverte et m'étire un peu avant de me diriger nonchalamment jusqu'à ma porte d'entrée. Je l'ouvre avec difficulté, mes mains étant encore en compote.
        Je relève les yeux sans trop le vouloir et mon cœur manque un battement quand je vois que ce n'est pas un enquiquineur mais un pauvre livreur qui fait son métier comme on le lui demande. Je sens la gêne qu'il y a entre nous, surtout parce qu'il n'arrive pas à détacher son regard de mon boxer. Je suis moi-même très embarrassée, mais ma fierté étant plus grande que ma gêne, je racle ma gorge pour lui signifier qu'il n'a pas arrêté de me reluquer depuis que j'ai ouvert la porte. Je le vois qui devient écarlate et qui tente de se rattraper en balbutiant:

-B.. B-B-bbonjour... C'est pour vous! Dit-il en me tendant la raison de sa visite matinale.

        On était tellement concentrés l'un comme l'autre, sur le fait que je ne portais qu'un sous-vêtement pour tout bas de pyjama, qu'on en a oublié l'essentiel: un bouquet de fleurs avec des couleurs toutes plus vives les unes que les autres. Il y en a de plusieurs sortes mais je n'en connais aucune malheureusement. Je me contente d'admirer la beauté de la chose.

Chute libreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant