Introduction :

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December était absente. Son regard ne laissait filtrer aucune émotion, pas plus que son visage qui arborait un air neutre imperturbable. Une cigarette pendait à la commissure de ses lèvres. Elle enroula ses fins petits doigts vernis autour du filtre et pris une grande bouffée de fumée, d'une façon aussi naturelle que celle avec laquelle elle aspirait l'oxygène. Puis elle l'expulsa lentement, la nuée blanche s'échappait de sa bouche en vagues indéfinissables. December continua de fumer sa cigarette, celle-ci se consumait rapidement, alors qu'elle dégageait avec précision la cendre d'un geste de l'ongle. Quand elle l'eut terminée, elle toussota légèrement, puis rentra. Ses cheveux d'un brun ébène luisaient dans la lumière artificielle du foyer. Quant à sa peau, d'un naturel tirant sur la pâleur cadavérique, elle paraissait d'autant plus translucide et livide. Seules ses joues, rougies par le froid semblaient apporter une preuve de vie à son blanc visage.

- « Ta valise est prête ? » lui demanda Ava, alors que la jeune fille s'apprêtait à pénétrer dans sa chambre. Ava était sa belle-mère, mais elle l'avait toujours considérée et traitée comme sa propre génitrice, elle qui était actuellement occupée à faire brûler le dîner, comme ça avait toujours été le cas.

- « Presque, ne t'inquiète pas pour ça ». Elle claqua sèchement la porte derrière elle, non pas pour clore définitivement cette conversation sans but ni intérêt propre, mais parce que cette porte avait toujours peiné à se fermer complètement. Il était nécessaire de le préciser. December fut parcourue d'un inéluctable frisson, celui-ci la fit vibrer, il se plaisait à arpenter son échine. Elle frémit. C'était probablement la dernière fois avant longtemps qu'elle pouvait se tenir seule, dans l'intimité de sa propre chambre, qui, il y a près d'un mois n'était rien de plus qu'un lugubre grenier. Elle avait tout aménagé à son image. Les murs peints de couleurs froides, étaient parsemés de photos de famille, de portraits, de paysages... Son père était photographe et elle était fière de lui, de son travail, cela se devinait tout de suite. Les meubles étaient sobres et se limitaient à un lit double, un large bureau et une armoire d'époque taillée dans un bois de chêne vernis. En réalité, elle venait d'emménager, enfin, elle, son père, sa mère et son frère, bien-sûr. December s'assit sur son lit. Elle était tellement angoissée et tendue, que la tête lui tournait. Elle s'apprêtait à intégrer la prestigieuse université irlandaise dont elle avait toujours rêvé. Le stress, qui avait toujours été omniprésent, s'insinuait dorénavant inlassablement en elle, la veille au soir de son admission sur le campus. Par le passé, et notamment au lycée, elle avait déjà eu grand nombre de soucis d'ordre disciplinaire. Elle avait, disait-on, toujours été exécrable avec ses autres camarades, ceux qui ne faisaient pas partis de son cercle d'amis restreint – qui ne s'étendait qu'à quelques rares figures. De prime abord, elle semblait tellement plaisante, son visage était d'une pureté immaculée. Elle était très grande et fine et elle se déplaçait toujours avec une grâce aisée. Mais l'on disait que ce n'était qu'une façade car tous ceux qui s'en étaient approchés de trop près affirmaient qu'elle était d'une violence et d'une arrogance innée, qu'elle avait toujours une remarque acerbe à lancer, qu'elle était franche, mais d'une franchise tellement mauvaise et destructrice, que le personnage en devenait détestable. Ce n'était cependant que la vision des gens, ce qu'elle leur inspirait... et ils ne se gênaient pas pour le lui faire savoir. La jeune femme soupira en y repensant. Elle n'avait pourtant jamais voulu se faire d'ennemis, au contraire. Elle était trop directe, c'était le seul défaut que lui trouvaient ceux qui cherchaient vraiment à l'apprécier.

- « Ember, Cade, le dîner est prêt », beugla Carl, son père.

Le lendemain promettait d'être mémorable.

Remember DecemberOù les histoires vivent. Découvrez maintenant