(7)Partie 4 - La nuit des violons

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Une terrible mélodie se jouait à mes oreilles. Une symphonie de violons et de flûtes traversières. Les genoux contre la poitrine, j'observai le ruisseau s'écouler lentement, imaginant la force que tous ces petits remous auraient sur une feuille. La déclaration de Naruto quelques heures plus tôt m'avait chamboulé. Des souvenirs que je croyais détruits refaisaient surface, et se fracassaient contre la fragile illusion de bonheur que je m'étais faite depuis la mort de mon grand frère. Je repensais aux combats que j'avais mené, aux vérités que j'avais apprises, à la solitude à laquelle j'avais fait face toutes ces années. Un véritable maelström de violence, de sang, et de larmes trop longtemps contenues. Aussi loin que je m'en souvienne, depuis le chagrin qui m'avait secoué en réalisant le massacre de mon clan, je n'avais pleuré qu'une seule fois : pour la mort de mon frère. Pour sa vie abominable et pleine de secret plus que pour son décès.

Je baissais le regard sur mes mains ouvertes. Ces mains qui avaient arraché la vie de la seule personne à qui je n'avais eu de cesse de penser depuis ma plus tendre enfance, que j'avais aimé plus que tout, et que j'avais ensuite maudit de toute mon âme. Et maintenant que ma vengeance était accomplie, il n'y avait rien que je souhaitais plus que de le voir assis en face de moi. J'ignorai quel comportement j'adopterais, mais il était certain que je voulais le savoir près de moi.

L'arbre sous lequel j'étais assis laissa tomber un pétale blanc, qui voleta quelques longues secondes, effectuant quelques rondes suivant la direction du vent, avant de se poser délicatement à la surface de l'eau. A peine avait-il voyagé un mètre qu'un gros poisson sortit sa bouche des remous pour le manger. Non. Pour l'engloutir.

Cette scène devait se passer plusieurs centaines de fois par jour, et pourtant, je ne pus m'empêcher de la trouver infâme.

"- Sasuke, ça va ?" Demanda Naruto en avançant vers moi, laissant le feu sans surveillance.

Je hochais la tête.

"- A quoi tu penses ?" Continua-t-il en s'asseyant à mes côtés.

Je haussais les épaules. Je ne voulais pas lui révéler que je pensais encore à ce qu'il m'avait dit, ou plutôt aux paroles qu'il m'avait lancé à la figure, quelques temps plus tôt.

"- En fait, à rien. J'écoute juste le silence."

"- Hm, tu avais pourtant l'air vachement concentré, pour quelqu'un qui n'écoute rien de particulier."

Je ne répondis rien, et il n'insista pas. Il se mit en tailleurs et observa à son tour le cours d'eau, tandis que je levai mes yeux vers la lune. C'était vraiment un bel endroit, simple mais merveilleux. Je me disais que si je devais un jour choisir le lieu de ma mort, ce serait ici : adossé à un arbre, l'eau en contrebas, éclairé par les tristes et pâles reflets de la lune. Seul, personne pour pleurer ma disparition. Sauf peut être une : Naruto. Naruto serait sûrement triste d'apprendre mon départ précipité vers l'autre monde, mais cette tristesse ne durerait qu'un moment. Il aurait toujours des amis pour lui venir en aide, pour le réconforter... Et il avait Hinata. La belle Hinata, amoureuse du blond depuis notre jeunesse... Je le regardais qui, doucement, emmêlait à nouveau ses doigts aux miens. Je me sentis nerveux. Je n'aimais pas les contacts physiques; je n'aimais pas voir Naruto tenir ma main si blanche, et pourtant si sale. Mais j'étais soulagé qu'il soit là, et heureux qu'il me montre sa présence de cette manière là. Oui, j'avais bien sûr connu la solitude, mais je n'avais jamais aimé ça : je n'avais jamais eu le choix de devoir être seul ou non.

Un pic de douleur me fit sortir de mes réflexion : ma jambe me faisait à nouveau souffrir. Je jetais un regard vers Naruto, qui était toujours absorbé par la contemplation de l'eau. Je le regardais brièvement, avant de me lever dans la plus grande difficulté :

Le kunaï à la lame bleueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant