Poussière d'étoiles, les nébuleuses diffuses Tome 1

Chapitre 2 : Le cadeau

                 

Il faisait doux sur la plage cet après-midi-là, en ce premier jour du printemps. Le thermomètre devait avoisiner les vingt degrés ce qui était plus que correct pour un 21 mars. Une brise marine venait nous caresser le visage de ses embruns rafraichissants tandis que le bouquet de senteurs qui se dégageait de l'océan émoustillait nos narines : un délicat mélange de sel, d'algues, d'eau et de poissons que l'on ne pouvait apprécier qu'en bord de mer.  Je marchais les pieds nus dans le sable, sentant la fraicheur sous la plante de mes pieds, en compagnie de Violette. Les vagues jouaient une harmonieuse mélodie et paraissaient vouloir nous chuchoter quelques chants marins à nos oreilles. Nos cinq sens ne pouvaient être qu'en éveil face à tel spectacle. Cette immensité bleue était un cadeau de la nature, mon cadeau, je n'en demandais pas plus en ce jour. Soudain, Violette troubla ma contemplation :

―    Ce soir, c'est ton soir! Un an de plus, ça se fête ma vieille ! Et pas n'importe où, à l'Oncle Sam Saloon! Et j'espère que tu vas pousser la chansonnette car tu chantes si bien ; Elle tentait de m'encourager car chanter en public me terrorisait.

―    Oui, oui mais c'est uniquement pour te faire plaisir, cédais-je.

Vio avait raison sur un point, c'était mon anniversaire et nous allions nous amuser. Un mois et demi s'était écoulé depuis cette nuit neigeuse. Le temps défilait à une vitesse vertigineuse surtout lorsqu'on avait l'impression de vivre ses nuits autant que ses jours. Depuis quelque temps, le même rêve perpétuel venait hanter mes nuits, toutes mes nuits sans exception. Je commençais à m'inquiéter d'un tel acharnement psychologique et me demandais ce qui clochait chez moi et par quels démons j'étais habitée. D'autant plus que des événements étonnants et semblables à ceux déjà éprouvés auparavant s'intensifiaient de  jour en jour.

―    Ca va Maylis ? s'inquiéta Violette, tu en fais une drôle de tête, on dirait que tu as vu un monstre marin !

―    En fait, je repensais à ce rêve que je fais tout le temps. Il m'intrigue.

Je racontais presque tout à Violette, après tout c'était ma meilleure amie et puis, à qui d'autre aurais-je pu en parler ? A mon frère, cet égocentrique ou encore à ma mère qui se serait peut être inquiétée de mon état mental ? Je ne voyais qu'elle dans ce rôle de confidente et lui déballer mes états d'âmes devenait plus facile.

―    Tu as encore rêvé de ton escapade nocturne à courir après une luciole ?  Je suis sûre qu'il n'y a aucune signification précise à tout ça. Tu te fais de la bile pour rien. Et  puis, les lucioles qui parlent, ça n'existe pas malheureusement ! Dommage car cela pimenterait notre misérable existence de terrienne. Si seulement... s'exclama-t-elle dans un style très théâtral.

J'éclatai de rire instantanément, elle était très bonne comédienne avec un talent certain pour la dramaturgie. Les professeurs du lycée en savaient quelque chose : petite moue faussement contrariée et prétextes bidons mais maitrisés étaient ses armes lors de dérapages scolaires.

―    Quel pitre tu fais ! Je te raconte des trucs sérieux et toi, tu te fiches de moi, petite ingrate ! Ma vengeance sera terrible, lui rétorquais-je en mimant un combat avec une épée imaginaire. Mais bon, peut être que tu as raison, je dois m'affoler pour rien, après tout ce n'est qu'un rêve stupide, concédais-je.

Et je n'insistais pas non plus sur les catastrophes que j'avais l'air de provoquer et qui elles  aussi, se multipliaient jour après jour. Je ne voulais pas paraitre pour folle à ses yeux, l'ouverture d'esprit de Violette était grande mais lui faire peur était exclu.

Je me mis à courir frénétiquement vers les vagues qui s'écrasaient sur le sable, essayant de toutes mes forces d'occulter ces pensées négatives. En animal apeuré, je fuyais un prédateur, ce rêve, cette vision dérangeante et répétitive qui s'acharnait contre moi. Les pieds dans l'eau glacée de l'Atlantique, j'attendais que Violette me rejoigne mais, moins téméraire que moi, elle ne mît pas l'ombre d'un orteil dans cette eau polaire.