I was alive but nothing is everlasting...

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J’entrai dans le hall d’entrée de mon nouvel immeuble tout en réfléchissant à une réponse concrète à la question que je me pose depuis un bon moment : Où est-ce que j’en suis ?

Je ne savais tout simplement pas, tout s’était passé si rapidement, et quand je repasse tous les évènements que j’ai vécus, dans un petit laps de temps, je me dis que c’est juste impensable ! Si quelqu’un m’avait dit que je pourrais vivre ça un jour, je lui aurai ri au nez. 

Pour l’instant, je me contente de scanner l’endroit avec mes yeux ; et le sol en marbre noir avait vite capté mon attention : j’aimais beaucoup cette matière. Les murs peints d’un beige clair et chaleureux quant à eux, me rappelaient bien des souvenirs enfouis dans les arcanes profondes de mon âme, où même moi je n’ai plus accès à ma guise. Les tâches de blanc dans les portes qui, je pense, mènent à la direction ou un truc du genre, rendaient l’atmosphère plus officiel, plus administrative. Les tableaux, eux, accrochés au long des murs interminables faisaient même penser que l’on marchait dans une galerie d’art plutôt que dans un hall d’immeuble : bref, le développement d’une seule réplique : «  sobre et chic. »

Je tournai à droite et vis au loin l’ascenseur, tout au bout d’un long couloir curieusement bien éclairée même s’il n’y avait pas l’ombre d’une fenêtre, et que l’entrée était déjà un peu plus loin. Mais ce n’était pas en cet état là que j’allais discuter l’architecture de mon nouvel immeuble… Je tournai ma tête légèrement dans tous les côtés, balayant l’espace de regards vides et plutôt négligents : personne en vue.

Je m’arrêtai devant l’ascenseur, rêveuse. J’eus quelques secondes de réflexion, puis prit la décision de monter les marches de l’escalier de granit noir qui se trouvait à ma gauche, plutôt que d’attendre l’engin mécanique et risquer d’y être emprisonnée à 3 heures du matin avec ma chère conscience. Notez le sarcasme. 

Je  connaissais chaque recoin de cet endroit devenu familier. Même si que du haut de mes cinq visites ici à Manchester, je ne vois pas comme est-ce qu’il aurait pu être autrement.

Je me surpris à rire nerveusement sur ma situation pathétique.  Je tournai rapidement la tête, et cette fois j’inspectai minutieusement les lieux. Toujours personne. Les concierges ça n’existe pas chez eux ? Mais ce n’est pas quelque chose dont je me plaindrai. Actuellement, le fait que ce couloir soit désert me rend un service incroyable, je ne voudrais pas que les gens croient que je suis une folle bonne à interner, qui rit toute seule, dès mes premiers pas ici.

Et à ce moment même, si je n’avais pas ce peu d’amour propre qu’on m’avait généreusement laissé, j’aurai éclaté de rire devant mes pensées presque hilarantes.  Tout le processus de venir ici, à Manchester, et d’y emménager,  devait être sur un coup de tête : Plus dans le genre je range une seule valise et je me casse, plutôt que j’envoie tous mes bagages par avion, que j’inspecte les lieux 5 fois avant de m’installer, que je prenne des cours intensifs en Anglais pour m’acclimater avec l’accent très prononcé de Manchester.  Mais le fait  que je sois une misérable fille qui cherche à tout ce que soit fait d’une certaine façon, et que tous ses mouvements soient planifiés à l’avance, n’est apparemment plus un secret pour personne.  La situation la plus stressante dans laquelle on pouvait  me mettre c’était qu’un évènement inattendu me prenne au dépourvu, je détestais ça à un point à en devenir malade

Je soupirai bruyamment, et entamai ma montée vers le cinquième étage où se trouvait mon nouveau «  chez-moi ». Je n’étais pas vraiment exigeante quand je cherchais un appartement. Je ne cherchais pas quelque chose en particulier, surtout pas un appartement au dernier étage avec une vue à couper le souffle. Non. Je cherchais un toit, un endroit où je pourrais rassembler les morceaux de mon être brisée avant que le vent de la vie ne les éparpille partout. Je cherchais avant tout une adresse discrète, éloignée du centre ville : Je détestais la foule.

Le problème n’était pas vraiment que je détestais la foule, c’était plutôt que je ne voulais pas affronter les gens. Je ne voulais pas les voir sourire et s’embrasser devant ma fenêtre pendant que je brûlais à petit feu, c’est tout. S’ils voulaient profiter de la vie, qu’ils le fassent ailleurs, je n’aurais jamais pu survivre à ce flot d’ « humanité ».

Le fait aussi que j’ai utilisé toutes mes économies pour emménager dans cet endroit très luxueux était aussi calculé. Je me suis dit que dans un endroit très cher les jeunes ne seraient pas en abondance, et que j’aurais plutôt affaire à des vieux, sourds, muets et aveugles. Vous l’aurez remarqué, la dernière partie était plus un souhait qu’une partie de mes calculs, mais on peut toujours rêver !

Plus qu’un étage, courage ! Oh, une rime !

La fatigue m’avait complètement vidée de toute énergie, et je trimbalais ma valise dans ces escaliers plutôt que je ne la portais. Le bruit que je causais été strident et intenable, les voisins pouvaient se plaindre, ce n’est pas que je m’intéresse.

Arrivée enfin dans mon étage, je vis une porte s’ouvrir. Et merde ! Dire qu’il y a quelques minutes que je me disais que j’étais chanceuse de ne trouver personne, c’est raté.

La porte continuait de s’ouvrir doucement pour laisser paraître une jeune fille d’environ la vingtaine je dirais. Elle était blonde ; ces cheveux étaient brillants, longs et ondulés à leurs extrémités. Une partie d’eux tombait en cascade derrière elle, alors que quelques mèches encadraient son visage angélique, et sa frange couvrait presque l’un de ses yeux verts éclatants. Je continuais de la fixer tout en marchant doucement. J’étais surprise du fait qu’elle soit bien coiffée, et portais une robe rouge qui faisait ressortir la couleur blé de ces cheveux. Je compris assez vite quand je vis un jeune homme sortir derrière elle. Bien sûr. Je soupirais, et ne prenais même pas la peine de bien voir le nouvel individu qui avait rejoint la scène.

-         «  Nous dire un petit bonjour serait peut-être bien un bon début, chère nouvelle voisine »

Sa voix résonnait dans ma tête. Une voix féminine, douce et angélique que je me demandais si elle avait vraiment prononcé ces quelques mots. Un rire maladroit suivit rapidement ses paroles. Cette fois c’était une voix masculine et rauque. Je relevais la tête pour croiser le regard de la fille que j’allais peut-être commencer à détester. Je m’arrêtais une seconde, puis reprit ma marche après avoir pris soin de lui lancer un regard noir dont j’avais seule le secret. Pour qui est-ce qu’elle se prenait ? Les filles peuvent vraiment faire n’importe quoi pour impressionner leurs «  chéris ».

Je passai devant eux pour me rendre compte que j’étais sa voisine… De porte ! Je sortis ma clé de ma poche de jean et l’insérai dans la serrure. Un petit clic retentit. Un dernier regard vers mes voisins, puis je m’engouffrai dans mon appartement.

Et avant de refermer ma porte, j’entendis la même voix de tout à l’heure criait de l’autre bout du couloir maintenant ces quelques mots, suivit d’un rire bien trop parfait pour coller à ses paroles.

-         «  Je m’appelle Em. On me surnomme aussi la XXX, donc si tu as des amis, tu sais où me trouver. On partagera. »

Mes yeux se fermèrent de dégoût, et je claquais ma porte bruyamment pour montrer mon mécontentement. Elle allait surement entendre parler de moi celle-là ! Quelle magnifique façon de commencer…  

Ne laisse pas mon souvenir te hanter.Where stories live. Discover now