Emma, ta chère voisine.

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Je marchai tranquillement au milieu du noir. J’étais seule, et je ne voyais rien devant moi. Je marchais sans vraiment savoir où j’allais, sans vraiment me rendre compte que je « marchais ».

Le temps, l’espace… Cela ne me disait rien. Combien est-ce que j’ai dû marcher ? Je ne sais pas, la notion du temps n’est pas une option ici… Quelle distance j’avais parcourue ? Je n’en ai pas la moindre idée…

Je ne ressentais pas  mon corps. Il n’y avait ni de la fatigue, ni du froid, ni de la chaleur, rien. Nada. Aucune sensation.

Soudain, tout s’illumina... Mais je fermai les yeux, comme si j’avais refusé d’accepter cette lumière, comme si je voulais rester à jamais dans cette obscurité. 

J’entendis des voix. Souvent familières. J’entendis des cris, des pleurs, des rires, des coups de gueules. Mais je décidai de faire la sourde oreille, comme si je me refusai de me rappeler d’eux, comme si je voulais à jamais oublier leurs voix, leurs visages, « eux ». 

J’entendis une voix m’appeler et je ne pus résister d’ouvrir les yeux quand je reconnus la voix de ma mère. Elle me tendait la main, elle me souriait tout en mimant quelques mots que je ne pouvais comprendre. Je la suppliai du regard de me parler, de me dire quelque chose. Mais elle n’arrêta pas de sourire.

Elle disparut soudain, laissant un vide atroce dans mon cœur, la première sensation que je ressentis depuis le début. Pourquoi est-elle partie ? Pourquoi m’a-t-elle laissé seule entre tous ces monstres ?

Je sentis une ombre s’approcher dangereusement de moi, arrivée à ma hauteur, elle empoigna mon cou avec ces deux mains, et appliqua une grande force. Je ne me sentais pas suffoquer, je ne sentais rien et j’avais peur de ça.

Elle me dit ces quelques mots qui me figèrent sur place : «  Jamais tu n’oublieras, c’est pour ça que tu vivras toujours dans les ténèbres. Refuses de voir la lumière, jusqu’à ce que la mort te tire de ta misérable vie ». Puis tout disparut.

Je me levai en sursaut, des gouttes de sueurs perlaient sur mon front… Un cauchemar… Un simple cauchemar, tentai-je de me rassurer, mais je savais bien au fond de moi, que ce n’était pas qu’un simple cauchemar. C’était quelque chose de révélateur, j’avais vu ce que je refusais de m’admettre : J’allais droit dans un mur. Je n’étais plus aussi sensible qu’avant, je  ne laissai rien paraître… Du moins jusqu’à l’incident du restaurant…

Le restaurant ! Que s’est-il passé ? J’essayai de me rappeler les détails, mais ma tête me faisait atrocement mal. Je réussis néanmoins à en arriver à ma chute dans le parc. 

Mais comment est-ce que j’avais atterri ici ? Où est-ce que je suis déjà ?

Je tournai ma tête pour identifier la chambre dans laquelle j’étais. Ce n’était absolument pas ma chambre !

Sur la table de nuit à ma droite se trouvait un verre d’eau et un sachet de médicament. Je retirai les draps de mon corps puis m’assis à l’extrémité droite du lit. Je lus le nom du médicament et me rendis compte que c’était un contre les maux de tête. Je diluais le contenu du sachet dans le verre d’eau, puis le bus d’une traite. 

Petite attention que moi, fainéante mondialement reconnue, je n’aurais jamais faite même pas pour moi-même. Où est-ce que j’étais bordel ?

Je descendis mon regard sur mes habits doucement, avant d’être complètement choquée. Je portais un t-shirt  gris bien plus grand que moi, qui ne m’appartenais visiblement pas, et en dessous je portais une sorte de short rose très serré.

…………………..Okay………………  Ce serait un peu inapproprié de crier, non ?

J’entendis du bruit dehors, alors je décidai d’aller enfin découvrir, chez qui j’étais. Avant d’atteindre la porte, je remarquai mon portable sur une commode. Je lus  l’heure : 15 heures.

Alors, soit je devenais folle, soit mon téléphone s’était  trompé,  soit j’avais dormi pendant toute une journée…

Je sortis de la chambre pour longer un couloir jusqu’à une autre pièce : Une cuisine. J’ouvris grand mes yeux quand je vis qui y était assis sur une chaise.

Le gars du restaurant.

Calme-toi d’accord. Il y a une explication rationnelle à tout ça. Il DOIT y avoir une explication rationnelle à tout ça !

J’étais dans un foutu t-shirt qui était probablement le sien, et un short dont je m’en foue du propriétaire, mais quelqu’un m’avait enlevé mes vêtements d’origine, pour me mettre ceux-là. Et je ne voyais que lui dans mon champ de vision.

Relax. Il a sans doute une sœur, ou je ne sais pas moi… Ou alors c’est lui qui…

Il releva la tête pour m’apercevoir dans l’embrasure de la porte de SA cuisine. Je rougis un peu me rappelant de mon accoutrement qui ne m’arrivait qu’à la mi-cuisse, puis je me dirigeai vers lui, et m’assis en face.

Il me sourit gentiment, et me passa un chocolat chaud. Quelqu’un lui avait-il dit que le chocolat chaud était un remède à tout ou quoi ?

Je pris la tasse, et bus une petite gorgée, avant de l’entendre racler sa gorge. Je relevai mes yeux vers lui, et attendis qu’il dise quelque chose.

Il était visiblement bien plus gêné que je ne l’étais  ce qui était, croyez moi, très difficile dans cette situation.

-          «  En fait, je… Vous êtes tombé dans le parc, et comme je ne savais pas quoi faire, je vous ai ramené ici. » Me dit-il en baissant les yeux  tout au long de son bref discours.

Oui mais ici c’est où ? Et les vêtements ? Et comme s’il avait entendu mes interrogations internes, il reprit aussitôt.

-          «  On est chez ma mère » Cool. On n’est pas chez lui au moins. «  Et c’est ma petite amie qui vous as changée » Finit-il par dire, avant de se lever, et de porter ma tasse et la sienne dans l’évier.

Je ne savais pas à quoi je m’attendais, mais j’étais partiellement contente que nous n’étions pas chez lui, et que ce n’étais pas à cause de lui que je n’étais plus dans mes vêtements. Par contre, savoir que j’étais chez la mère d’un inconnu, et que sa petite amie s’est chargée de moi, me rendait mal à l’aise à un point incroyable.

-          «  Merci. Pour tout. » Finis-je par lâcher poliment fixant la table comme si c’était la chose la plus précieuse au monde.

Avant qu’il ne puisse dire mot, une femme entra dans la cuisine et me sourit. J’assume que c’est sa mère.  Je me lève, ne sachant que faire.

-          «  Je suis ravie de voir que tu t’es réveillée ma chérie. » Son ton était doux et rassurant que je ne pus m’empêcher de sourire faiblement et de me sentir plus à l’aise.

Elle s’approcha de moi et me donna un câlin. Je voulus en pleurer. Je donnerai n’importe quoi pour recevoir ce câlin chaque jour…

-          «  Maman, je pense que c’est bon… » Interrompit le jeune homme, dont je ne connais toujours pas le nom, à ma plus grande déception.

Fichue garçon trop poli !

Une autre fille entra dans la pièce, et je fus surprise de voir ma voisine. Cette blonde dont l’image m’avait hanté. Je restais interdite pendant qu’elle me fit la bise et  qu’elle prononça quelques mots.

-          «  Heu… Voici Emma, ma petite-amie. » La présenta le jeune homme.

Je la revoyais devant sa porte, en robe rouge, maquillée, prête à sortir, aux bras d’un autre homme, clairement pas son « petit-ami », et sa phrase abjecte  sur la nature du boulot qu’elle mène…

                                       Je la déteste !

Ne laisse pas mon souvenir te hanter.Where stories live. Discover now