Prologue

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«Viens ici ! Regardes, tu veux monter là haut ?»

Il me regardait de haut, les yeux brillants, un grand sourire sur les lèvres, il ne regardait que moi, pour lui tout le reste n'existait pas. Son monde c'était moi, lui était mon soleil. Du haut de mes huit ans et demi, je criais en courant dans tous les sens pour que mon père me poursuive et m'attrape pour me poser sur un toboggan immense à travers mes yeux d'enfant.

«Pousses moi s'il te plaît !»

Je riais aux éclats alors qu'il me chatouillait avant de me pousser, et je glissais jusqu'au bas.

«Sur les balançoires s'il te plaît !»

Criais-je en sautillant et en désignant deux balançoires à quelques mètres de nous.

«Sur laquelle ?»

Il me souriait et je lui montrait la rouge, ma préférée.

*

«Alors laquelle tu veux ?»

Je regardais mon père, et les poupées, et encore mon père en mordant ma lèvre inférieure. Mon regard faisait des vas et viens entre les deux poupées qui étaient dans ses mains, je devais choisir, c'était mon unique problème, parce que à onze ans, les problèmes ne sont pas toujours très importants. Il me regardait en riant doucement et en secouant la tête.

«On va prendre les deux ma chérie.»

Mon regard se remplit de joie, et je le prenais dans mes petits bras en lui embrassant la joue.

«Merci papa !»

*

«Alors, laquelle ?»

Mon père me regardait, et les deux robes présentes dans mes mains. Il les regardait pour choisir, et je le sais très bien, regardait laquelle était la moins courte. Son regard s'arrêta sur celle qui était dans ma main gauche, la rouge.

«Celle-là ! Elle te va bien.»

Je le remercie en hochant de la tête et sourit avant de regarder le prix, et de baisser les yeux.

«Je vais en choisir une autre papa.»

Il hocha la tête négativement en me regardant dans les yeux, je savais bien qu'il voulait me faire le plus plaisir possible.

«Non, non, tu la prends peu importe le prix ! Et c'est pas tous les jours qu'on fête ses quinze ans ma chérie.»

Je lui sourit et le prend dans les bras et lui embrassant la joue.

«Merci, merci, merci.»

*

«Laquelle ?»

Je restais silencieuse, la tête baissée, les larmes menaçant de couler sur mes joues. Ma mère relevait ma tête du bout de ses doigts et me sourit, un sourire forcé, évidemment. Et elle me prend par la suite dans ses bras.

«Je sais que c'est dur pour toi, ça l'est pour moi aussi tu sais. Mais je comprends.»

Elle m'avait dit ça sur un ton doux et relaxant, mais pas assez relaxant pour cette situation, rien n'est assez relaxant pour cette situation.

«Oui maman je le sais, mais j'ai aucune envie de rester là à devoir choisir la cravate que.. qu'il.. va porter à son enterrement bordel.»

Cette fois-ci mes larmes n'ont pas tenu, elles ont coulées, je ne les ai pas retenu, à quoi bon ? Ma mère posa ses mains sur mes épaules en me regardant dans les yeux.

«Ton père nous manquera à tous, personne ne veut ça, tu peux sortir un peu avant si tu veux..»

«La rouge, la cravate rouge s'il te plaît.»

Sur ces mots je suis sortie et j'ai couru loin, pendant une dizaine de minutes pour tout oublier, jusqu'à ce parc dans lequel il m'amenait, je m'approchais du toboggan, et il faut croire que tout change, moi qui le pensait géant, il m'arrivait maintenant au niveau de la taille. Je m'allongeais contre celui-ci en pleurant, je criais et n'arrêtais pas de penser à lui, à son visage, par peur de l'oublier. Parce qu'il faut bien se le dire, le manque ne disparaîtra jamais.

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